Biodynamie: de l'interêt du recours à l'enherbement des vignes selon les régions

Par Ochato

Pour qui conduit une culture en biodynamie, le recours à l'enherbement s'impose. Il correspond en effet à deux des principes premiers de la biodynamie, à savoir respecter et protéger l'environnement et la biodiversité, et utiliser cette dernière pour soutenir la culture.

L'enherbement de la vigne consiste à maintenir et à entretenir un couvert végétal entre les rangs et autour de la parcelle. Naturel ou semé, sans tonte, il permet à la biodiversité, nécessaire au bon équilibre de la vigne et du sol, de se développer.

Des prédateurs utiles, comme la coccinelle, les syrphes, et bien d'autres encore en période estivale, peuvent ainsi proliférer et "veiller" sur la vigne.

Côté flore, cela permet l'apparition de plantes intéressantes, dont les racines favorisent le développement d'un "réseau" souterrain retenant les éléments fertilisants, auxquels la vigne aura un meilleur accès.

Le développement de mouron est par exemple un indicateur très favorable: il est révélateur de la présence d'azote, d'une bonne vie microbienne et d'un bon taux de matières organiques.

C'est bien sûr sur le sol que l'enherbement a le plus d'effets bénéfiques, dont bénéficient les ceps par ricochet.

Le système racinaire développé fissure le sol, et le rend ainsi plus perméable. Il améliore également sa structure et sa portance, et le protége des agressions climatiques, notamment les érosions hydrauliques et éoliennes.

L'enherbement peut également être pratiqué afin de "concurrencer" la vigne: en limitant la vigueur de chaque cep, on obtient des raisins de qualité, riches en saveur et en parfums intenses.

Cette pratique peut cependant présenter des inconvénients, et doit être surveillée, faute de quoi elle pourrait finir par être néfaste à la vigne. C'est pourquoi on parle souvent d'enherbement "raisonné" ou "contrôlé".

Beaucoup de vignerons ne souhaitent pas que leurs vignes soient enherbées pendant la période végétative, la présence de couvert végétal pouvant être catastrophique au niveau des gelées tardives du mois de Mai. Ainsi, l'enherbement n'est maintenu que pendant l'hiver, et supprimé naturellement quand vient le printemps (passage du crover crop et de la charrue, qui va permettre de faire sortir l'herbe et de la faire faner).

En outre si la concurrence est trop importante pour la vigne, celle-ci peut au final en souffrir.

  

L'enherbement doit donc être adapté à la vigne, au cas par cas, ce qui explique les disparités quant à son usage entre les différentes régions vitivoles françaises.

Ainsi, ce sont l'Alsace et le Bordelais qui pratiquent le plus fréquemment l'enherbement, avec respectivement 85 et 80% de leur surface enherbée. Les Charentes viennent compléter le peloton de tête, avec environ 60%. Arrivent en queue de peloton la Champagne (12%), la région Paca (15%) et le Languedoc-Roussillon (18%).

Alors que les vignobles d’Alsace et du Bordelais recherchent à limiter la vigueur de leurs vignes ou le développement du Botrytis, en Charentes, on enherbe pour améliorer la portance du sol et pour réduire les coûts d’entretien du vignoble.

A l’inverse, les viticulteurs du Languedoc-Roussillon ou de Provence, qui connaissent des problèmes de sécheresse, craignent une trop forte concurrence entre les deux plantes. Pour pallier à ce problème, ces deux vignobles, avec la Bourgogne, enherbent peu de manière permanente, et pratiquent un couvert uniquement hivernal. L’objectif est alors de lutter contre l’érosion et le ruissellement.

Le très faible enherbement de certaines régions, en particulier la Champagne, est dû au faible écartement entre les rangs, rendant impossible le passage d'engins nécessaires à l'entretien. Les vignobles champenois expérimentent ainsi la pratique dite du "mulch": utiliser de la paille et de l'écorce pour couvrir le sol, et ainsi prévenir l'érosion sans concurrencer la vigne, tout en contournant le problème de l'écartement. 30% du vignoble de Champagne sont ainsi recouverts.


PS: les photos illustrant l'article sont celles du Domaine Guignier, en Beaujolais, converti en Biodynamie depuis prés de 10 ans