On a beaucoup, sans doute même trop, parlé ces derniers jours des confidences de notre Président sur ses homologues. Ses thuriféraires pourfendent ceux qui s’en sont faits l’écho, les accusant de porter préjudice à l’image de notre pays. Il n’est pourtant guère douteux que ces propos, peut-être sortis de leur contexte, ou à interpréter comme des traits d’humour, aient bel et bien été tenus. Ils sont en effet cohérents avec un registre parfois utilisé par notre Président. Celui qui dégrade l’image de la France, ce n’est pas tel ou tel commentateur, mais bien celui qui maîtrise insuffisamment sa langue. Catherine Philp, rédacteur diplomatique de The Times, a publié un article que j’ai trouvé significatif de l’écho que peuvent susciter des propos peut-être tenus « off the record ». Je vous en fournis ci-dessous ma traduction.
Pourquoi Sarkozy ne peut supporter Obama
Les confidences du Président français sont dérisoires
Quiconque imagine que seuls des gays et des filles peuvent se comporter en salopes auraient dû être dans mon lycée à l’arrivée de ce nouveau garçon. Il était grand, beau, élégant et sportif, et les crêtes des mâles se dressèrent aussi rapidement que les défenses des filles s’écroulèrent. On entendit un ancien meneur ricaner : « Il n’est pas si beau que ça »
Il est des garçons qui ne deviennent jamais adultes. Alors, ils entrent en politique. Les tactiques de méchantes filles des Damian McBride[1] et Derek Draper[2] ne devraient pas surprendre grand monde ; il s’agit de calomniateurs et de salauds qui calomnient et salissent en vue d’un résultat concret, la mise à bas d’un rival – tout en ricanant sur leur conduite qu’ils qualifient de « collégienne ».
Nicolas Sarkozy n’a pas ce genre d’excuse. Il n’est pas employé dans quelque officine, il est un chef d’Etat. Il est supposé diriger un pays. Cela n’a pas empêché que l’arrivée d’un nouveau président – plus grand, plus beau et plus populaire – le transforme en cette petite princesse garce qui réjouirait Graham Norton[3].
Barack Obama? « Pas au niveau pour la prise de décision et l’efficience », chuchote le Président Sarkozy. « N’a jamais dirigé un ministère ». Ce serait drôle si ce n’était pas si évidemment pathétique. M. Sarkozy a entrepris de dépouiller le petit nouveau de son éclat.
Ou n’importe qui d’autre dans le voisinage. José Luis Rodríguez Zapatero d’Espagne ? « Pas très intelligent ». José Manuel Barroso, Président de la Commission européenne? « Totalement absent ». Même la loyauté politique n’importe guère. Angela Merkel qui, au G20, travailla au coude à coude avec M. Sarkozy pour une meilleure régulation financière globale fut tournée en dérision pour avoir pris en marche le train français une fois qu’elle eut réalisée combien était précaire l’état de l’industrie allemande. Sarkozy est le traître authentique qui vous sourit et vous fait des grâces, prêt à vous frapper, quand vous aurez le dos tourné, du poignard qu’il dissimule.
Il est un chef d’Etat que l’hyper-président prétend admirer : Silvio Berlusconi, en dépit de son flot continuel de gaffes. Mais M. Berlusconi est un pitre, pas un salaud. Peut-être que M. Sarkozy aspire à sa hauteur. S’il avait un gramme de l’assurance sans bornes de M. Berlusconi, il n’aurait pas besoin de rôder furtivement alentour tel un Iago minuscule perfusant sa bile dans des oreilles prêtes à la recevoir.
Il y a peu de signes que ceci l’aide à se faire des alliés en France. Un sondage publié hier crédite son prédécesseur Jacques Chirac de 30 points d’avance sur lui en popularité. Il n’y a qu’une chose plus menaçante qu’un brillant nouveau président : un brillant ancien. Surveillez votre dos, Jacques.
[1] Conseiller de Gordon Brown ayant mené une campagne calomnieuse contre les Conservateurs
[2] Conseiller de campagne des Travaillistes, impliqué dans le même scandale que McBride
[3] Animateur d’une émission de télévision dans la veine de Sébastien Cauet