Le grand pardon

Publié le 20 avril 2009 par Chroneric

La droite reproche à Ségolène Royal sa liberté de parole pour faire parler d'elle. Mais, en tant que personnalité politique, elle agit comme les autres ! Au royaume des politiciens, les plus médiatisés sont rois. Alors, la classe politique se déchaîne. Xavier Bertrand parle de manipulation : quand on sait que notre président joue avec les membres de l'UMP comme avec des pions sur un échiquier (remaniement, Européennes) et qu'il est le premier à manipuler l'opinion avec de grands rendez-vous télévisés ("Gandrange ne fermera qu'un four"). Dominique Paillé l'a qualifie de "dévorée d'ambition" : quand on sait que le candidat le plus nerveux de la droite attendait d'entrer à l'Elysées depuis des décennies en se rasant le matin… Frédéric Lefebvre, la tête à claques de service (oui, je ne l'aime pas du tout celui-là, qui a été à bonne école pour manipuler l'opinion à chacune de ses interventions), conseille une aide psychologique et la traite de folle.

Ils ne savent plus quoi dire. Quand on manque d'arguments, on insulte. A gauche, beaucoup se taisent car certains doivent penser autant de l'ancienne candidate. Que ça soit à droite ou à gauche, Ségolène Royal, toujours perçue dans l'opinion publique comme une opposante sérieuse à la majorité, est le poil à gratter du paysage politique. Dès que Nicolas Sarkozy fait un faux pas, elle est la première à réagir, prenant de court les démentis et les interprétations correctrices des fidèles au président, mais aussi Martine Aubry qui n'a pas le temps de s'opposer comme elle devrait le faire ou qu'elle essaye de faire (mais ces déclarations derrière le pupitre passent inaperçues).

Ségolène Royal marche sur les plates-bandes de tout le monde, on ne peut pas lui reprocher d'agir comme les autres, il me semble. C'est la règle du jeu de la communication. Nicolas Sarkozy est le premier à avoir agit comme ça alors qu'il n'était que ministre : il intervenait dans tous les domaines, coupant l'herbe sous le pied de ses collègues du gouvernement. Aujourd'hui, ils prennent sa défense car il est le chef, mais dès que l'occasion se présentera, ils vont tous lui marcher dessus. Retourner sa veste est une pratique qui a déjà été rodée par certains : je passe de droite à gauche ou de gauche à droite en passant par le centre, je soutiens Chirac puis je passe à Balladur, etc. C'est chacun pour soi. Alors, je dis que Ségolène Royal agit comme il se doit, en respectant les usages et les règles politiques en vigueur dans le monde entier : "moi d'abord, les autres après".

Au lieu de lécher les bottes du président, les copains de la majorité devraient peut-être jouer le rôle de modérateur : "Attention Nicolas, fais gaffe à ce que tu dis, surveille tes paroles". Mais non, Nicolas ne surveillera pas ses paroles puisqu'il suit la règle numéro une à la lettre, à savoir faire parler de soi pour ne pas être oublié et occuper la scène. Surtout que notre président cherche à s'imposer face à un Barack Obama encensé dans le monde entier. Notre petit caporal ne supporte pas, son ego non plus. Il conviendrait il me semble de remettre un peu d'ordre dans cette classe politique. A l'instar d'un plan de relance économique qui cherche à moraliser et calmer les financiers, il faudrait une sorte de plan pour nos politiques. Insulter et entraver l'autre finira par porter préjudice à tous. L'opinion publique n'est pas dupe de ces petits jeux et ces petites phrases.

En attendant, Ségolène Royal est bien partie pour endosser le rôle d'un nouveau Christ. Après la Sainte Vierge pendant la campagne de 2007, la voici dans son rôle de grand pardon. Le message est clair : "Voyez comment ça se passe avec celui que vous avez élu ? Moi, je n'aurais pas fait comme ça". Ce qui agace ses adversaires et ses "amis", c'est qu'elle fait parler d'elle d'une manière peu conventionnelle. Elle se lance dans une nouvelle pratique et apparemment ça marche puisqu'elle fait la une des journaux et déclenche les réactions assassines de ceux qui peinent à s'imposer. Ce sont les autres qui font sa publicité, elle a tout compris ! L'important est de faire parler de soi, que ce soit en bien ou en mal. Les électeurs ont quoi qu'il arrive, la mémoire sélective, pour ne pas dire courte. Des scrutins locaux ont bien vu triompher d'anciens élus déchus et condamnés en justice.

De toute façon, qu'a-t-elle à perdre ? N'étant ni à la tête du parti, n'étant pas sûre d'être la candidate des Socialistes en 2012 (à moins d'être dissidente), elle joue le tout pour le tout. Avec un Napoléon, il fallait bien une Madame Sans-Gêne.