Gainsbourg célébrait la Silver Ghost de 1920 « dont les voiles légers volent aux avants postes », Rolin faisait de la DS, le « vaisseau Remember », et Roland Barthes voyait même dans ses Mythologies de 1957 « la nouvelle Citroën » comme un « nouveau Nautilus »...
Mais qui dira assez l’élégance relative de la petite Fiat 500 ?
Miteuse, pneus crevés, carrosserie piquée de rouille, mais sans bosse, derrière l’écran d’élégance d’un mannequin aux yeux de braise, aux jambes fuselées, qui pose pour les photos d’un magazine, la Fiat 500 a des airs de star déchue….
On la voit partout en Sicile. Depuis des temps immémoriaux, elle fait sa promo. C’est une voiture tout en rondeurs, en ventre gonflé et en fesses, et pourtant tellement passe-partout. Voiture poisson-pilote, pour circuler dans le madrépore palermitain, à Messine, à Catagne. Cuirasse de lamproie, créature des profondeurs, sans branchies, sans rétroviseurs. La masse de la ville glisse sur le fer de sa carlingue.
Epave à la sortie du « mercato » dans un coin de Palerme ; douairière, sommeillant dans l’arrière-cour d’un vieux palais ; cavalière, à cheval sur un trottoir dans une rue de Messine ; audacieuse, sinuant dans la circulation à l’entrée de Catagne ; jeune fille silencieuse dans la vitrine d’un concessionnaire Fiat ; dragon de vertu, sagement garée entre une alfa Roméo et une grosse Fiat ; commère torse nu, toutes portes ouvertes sur le port de Cefalù ; légère, au sprint, carosserie bariolée, maillot à pois rouges, « éléfantino » sur la montée pavée qui, de la plage, monte à l’assaut des collines...