La fermeté plutôt que l’empathie. Invité de France Inter ce matin, François Fillon a fixé la ligne de son gouvernement. Celle d’un autisme dangereux qui ne semble pas appréhender le désespoir d’une France aux abois. En service minimum, l’Etat mise sur le dialogue social et stigmatise les petites minorités qui rendent les choses difficiles et les hommes politiques irresponsables.
Alors que les tensions sociales s’exacerbent à l’image des retenues de dirigeants ou le saccage de la sous-préfecture de Compiègne par des salariés de Continental, François Fillon reste dans sa bulle de Matignon. Le Chef du gouvernement loue la réussite d’un dialogue social très intense et le sens de la responsabilité des dirigeants syndicaux.
Selon le Premier ministre les syndicats, eux, “savent très bien les enjeux qu’il y a pour les salariés à laisser éclater une violence qui ne débouchera sur rien“. A l’inverse, il stigmatise le discours “irresponsable” de certains hommes politiques, citant en particulier Dominique de Villepin qui estimait ce week-end qu’il y avait en France un risque de révolution du fait de la colère légitime des salariés.
Pourtant si François Fillon tendait bien l’oreille, il s’apercevrait que la radicalisation sociale qui s’opère est en partie alimentée par un manque de crédit à l’égard des corps intermédiaires dont, les syndicats. On finirait par croire que le pouvoir Sarkozyste cherche à entretenir cette radicalisation en versant de ci et de là un peu d’huile sur le feu par des déclarations inutilement provocantes afin de se trouver une nouvelle légitimité dans un réflexe sécuritaire face à la chienlit. Moi ou le désordre somme toute. Un choix binaire comme les affectionne le locataire de l’Elysée. “Pour chaque question compliquée, il y a une réponse simple, claire et fausse” écrivait a contrario l’américain HL Mencken.
Droit dans ses bottes, François Fillon assure donc que le dialogue, ça marche… sauf à Clairoix. La stratégie encensée du “laissez-faire”, de l’auto-régulation à ses limites. Luc Chatel secrétaire d’Etat à l’Industrie s’est vu confier un rôle de monsieur “bons offices”. Une médiation de la dernière heure qui arrive un peu tard, lorsque des points de non retour ont été atteints.
Les syndicats ne s’y sont pas trompés, dénonçant “le double langage de l’Etat” dont les représentants ont refusé de discuter mardi avec des salariés. “C’est une déclaration de plus. Le jour où Luc Chatel me téléphonera pour me dire la réunion est tel jour, à telle heure, on verra”, a résumé Xavier Mathieu, délégué CGT.
Le conflit de Clairoix et ses 1.120 salariés est hautement symbolique au moment où François Fillon se targue d’avoir remporté la bataille idéologique sur la gauche et d’avoir terrassé ses fausses bonnes idées. En 2007, la direction de Continental et certains syndicats avaient signé un accord par lequel les salariés acceptaient un retour aux 40 heures de travail par semaine contre la promesse de la pérennisation du site. Aujourd’hui François Fillon a indiqué que tout était fait pour trouver un repreneur sans avancer de piste concrète.
Une annonce dangereuse, aux allures de promesses de gascon à l’aune de ce qu’il est advenu du site de Gandrange. Hypothèse d’un côté et promesses bien concrètes de l’autre. François Fillon a assuré que les violences “pas acceptables” commises par des salariés de Continental donneraient lieu à “des poursuites judiciaires”.