J’ai fait une expérience incroyablement merveilleuse… A vrai dire, ça pourra sembler pittoresque ou assez saugrenu… Mais moi, j’adore ça…
Il s’agit d’une nouvelle façon de lire.
De lire en étant tout « ouïe ».
Il m’avait initié à la chose au tout début de notre relation, lorsqu’elle était encore épistolaire. Je savais alors qu’il faisait beaucoup de longs trajets en voiture et qu’il écoutait Michel
Onfray lui causer philosophie et lui causer surtout de Nietzsche…
Il m’a offert pour notre Noël, en février, parce qu’on ne fait rien comme tout le monde, nous ;o) « Une gourmandise » de Muriel Barbery, une de mes auteures préférées… Un petit
bijou de littérature, qu’on a croqué à pleines dents, jusqu’à se remplir les oreilles d’une langue si suave, si limpide que le cœur en était serré. Serré de ressentir ces émotions par les
oreilles, celles qui,
en temps habituel arrivent par les yeux…
Moi, souvent, j’ai même pleuré (une serpillère, je vous dis !!!).
Il s’agit de livres « racontés » par des acteurs.
Le grand bijou fut « Ensemble, c’est tout » de Anna Gavalda.
J’avais vu à l’épaisseur et au nombre indécent de pages que ce n’était pas un livre de PD, si je puis dire (rassurez-vous, je n’ai rien contre eux, que ce soit bien clair, mais la formule
consacrée me plaît bien).
Comme vous savez, depuis de longs mois, je ne lis que très peu. Trop peu pour qui a étudié les lettres. C’est ainsi. Je ne sais pas tout faire. Et lire un livre par tranches de 2 pages, quand le
lendemain on reprend et qu’on a oublié où on en était parce qu’on espace trop les temps de lecture, je n’y arrive pas.
Il me faut du temps pour y entrer, pour m’y faire une place, pour m’habituer à la langue utilisée et par petites touches, ça me frustre. Il me faut des heures de disponible. M’y jeter à corps
perdu, lire 20 pages, en ressortir presque sonnée et recommencer le lendemain, ou juste quelques heures plus tard.
Je ne peux lire qu’en totale liberté. Sans contraintes d’aucune sorte. La contrainte empêche ma tête de s’évader et je n’adhère pas aux mots que je lis, je n’adhère pas au message de transport
que véhicule le livre choisi avec parcimonie.
Sans liberté, je préfère ne pas lire. C’est ainsi. Je m’abstiens. Je garde en réserve pour plus tard…
Alors, lorsque durant des trajets en voiture, mon amoureux a inséré ce disque dans le lecteur et que je me suis laissée transportée par le jeu des acteurs, par leurs voix tantôt tristes, tantôt
gaies et enjouées, tantôt empruntes d’une grande émotion, j’ai adoré.
Je me suis sentie transportée ailleurs. Loin. Comme au cinéma. Cela demande une grande concentration. Des heures d’écoute fatiguent énormément. Les personnages sont extraordinaires. Et ça m’a
redonné envie de lire. Comme si jusque-là, depuis des mois, j’avais oublié ce qu’était la lecture. Ce voyage intemporel. Ce voyage que la tête choisit et dans lequel elle se fond durant ces
longues plages horaires.
Ce furent des heures d’écoute délicieuses en vérité. Des heures de partage de ces beaux textes qu’on apprécie tellement l’un et l’autre. Lorsque, simplement en écoutant les mots qui
s’enchaînaient, on sentait les moments où l’autre allait vibrer.
L’intimité de la lecture qui est l’activité ultime du « soi », en solitaire… Parvenir à partager cette intimité-là avec son amoureux, ça relève d’un moment jubilatoire et parfait.
Infiniment beau, magique, doux et riche.
Lorsque les trajets en voiture étaient trop courts pour parvenir à la fin du roman, nous prenions le CD à la maison, le mettions dans le lecteur du salon. Installés comme pour visionner un film,
l’un contre l’autre, au plus près de l’autre en vérité, ma tête dans son cou, le plaid nous recouvrant tous deux, la lumière tamisée, nous nous laissions transporter par les jeux des voix, par
cette littérature offerte avec facilité.
J’ai aimé ces moments. Des moments d’une sensualité incroyable. Alors que pourtant, on ne se touchait presque pas. Je ne soupçonnais pas une telle magie possible, lorsque les goûts se rejoignent
à un point tel qu’on a la sensation d’être soi avec soi.
Et les enceintes qui répandaient leur magie sur nous deux.
Il y a des pépites de bonheur insoupçonnées.
Ces moments de lecture auditive étaient de ceux-là. Des moments parfaits. Où rien ne manquait.
Lui, moi et les beaux textes…
(soupir)
Nota : si vous ne connaissez pas, tentez le coup… Pour un voyage en voiture, ça change de la musique à tue-tête, des
radios qui passent inlassablement les mêmes titres… c’est reposant. Tout simplement : parfait…