« Le » 11-Septembre s’écrit désormais avec tiret et majuscule, comme 18-Juin ou 18-Brumaire. Il s’agit d’un Evénement. Sur Google version anglaise on compte environ 997 millions d’item pour « 11 Septembre », et pour la version française, près de 16 millions. Imaginé dès 1994 par Tom Clancy dans son thriller « Dette d’honneur » (Livre de Poche), cet acte terroriste de masse a visé la modernité au travers de New-York, ville cosmopolite et cœur financier des Etats-Unis. Il a pour origine la haine religieuse d’un nouveau Savonarole rigoriste qui a utilisé la base islamique d’Afghanistan dans le schéma de Lénine : de l’Islam dans un seul pays à la révolution mondiale, via l’internationale fondamentaliste. Il s’agissait de se venger d’un Occident impie, matérialiste et impérial.
Cet acte a fortement bouleversé les Etats-Unis et traumatise encore les citoyens américains. Oh, certes, on peut dire qu’ils ne sont pas « innocents » (ce mot utilisé à tort et à travers par les démagogues) de ce qui leur arrive : cette Amérique impériale a une politique cynique « d’intérêts vitaux » qui l’ont conduite à soutenir des régimes ou des réseaux ayant peu à voir avec les libertés ou la démocratie.
Les Etats laïques aspirant au progrès (Egypte de Nasser, Iran du Shah, Turquie kémaliste, Irak baasiste) ont tous été déstabilisés par des Etats-Unis qui considèrent la « libanisation » du monde utile à ses compagnies pétrolières. Oussama Ben Laden lui-même n’a-t-il pas été financé par la CIA, au moment où « tout était bon » pour contrer l’empire soviétique, comme le rappelait – juste avant les attentats – Richard Labévière ?
Les Talibans ont été soutenus par des groupes saoudiens, entraînés par le Pakistan et bénis par les Etats-unis, pour jouer les extrémistes sunnites contre les chiites d’Iran. Les richesses en pétrole de la Caspienne (10 à 20% des réserves mondiales) et en gaz du Turkménistan (4èmes réserves mondiales) attirent les convoitises des voisins dans ce carrefour d’influences entre Russie, monde turc, Chine, Pakistan et Iran.
Les rodomontades belliqueuses du « Bien contre le Mal » sont à lire dans ce contexte. Ce vocabulaire religieux, classique aux Etats-Unis, fait tout pour précipiter ce « choc des civilisations » qui rassure les idéologues, mais qui n’est pas la réalité. Le monde a plus d’épaisseur que ce simplisme biblique.
Mais le mal est fait en Amérique ; l’attentat a précipité une paranoïa latente, « à l’israélienne », du style « personne ne nous aime, tout le monde nous en veut, on ne va pas se laisser faire ». La paranoïa est une psychose. C’est un délire chronique, structuré et logique, fondé sur un sentiment de persécution Réaction compréhensible, mais que nous autres, non-Américains, ne devons pas encourager. L’Europe est peut-être vieille, lasse de l’Histoire et aspirant au repos sous protection OTAN, mais elle a le recul nécessaire à l’analyse. Pourquoi, dès lors, reprendre hors contexte américain les théories du Complot, des Secrets d’Etat et autres « révélations » ?
Car toutes les interprétations alternatives aux informations officielles se résument à deux affirmations :
1. on nous cache des choses,
2. le gouvernement américain et ses alliés, la CIA, les néoconservateurs, etc… ont voulu les attentats
Le but serait de :
1/ prendre le pouvoir,
2/ domestiquer la société libérale trop critique,
3/ se ranger résolument du côté israélien pour faire la guerre à l’Oumma (la communauté musulmane),
4/ dominer le monde (vieux mythe attaché aux Juifs depuis le faux Protocole des Sages de Sion).
Or l’Amérique paranoïaque peut avoir un comportement classique de paranoïaque, caractérisé par la surestimation de soi, la méfiance à l’égard des autres, une susceptibilité à vif et un jugement faussé – mais pourquoi nous, Européens, devrions-nous suivre ce délire ?
De plus, Les Etats-Unis ne sont pas l’Europe et ce qui s’y passe ne saurait être transposé tel quel :
• Oui, il existe des secrets d’Etat provisoires liés à la Défense Nationale et au bon travail des agences anti-terroristes – rien à voir avec le massacre volontaire de plus de 3000 citoyens !
• Oui, le traumatisme fait perdre le sens commun et l’opinion exige alors des réponses immédiates ; elle a besoin d’une grille de lecture de l’événement. Si le gouvernement flotte, il est aussitôt mis en accusation dans une société d’hypermédias. Si aucune explication rationnelle n’est donnée, place est laissée aux fantasmes et à la quête active de boucs émissaires. - Doit-on suivre cette paranoïa ?
• Oui, la presse des Etats-Unis s’est laissée bercer par le marketing de l’Administration, n’a rien vu, rien cherché, rien pensé sur les affirmations gratuites que l’Irak possédait des armes de destruction massive. Oui, les médias américains veulent se venger du gouvernement Bush à ce sujet, ils cherchent désespérément et obstinément tout ce qui peut être encore « caché » - mais cette quête n’est pas la mise à jour d’un Complot pour prendre le pouvoir !
• Oui, les perdants politiques systématiques (gauche radicale, Verts), les sensationnalistes qui veulent se faire un nom comme Thierry Meyssan (qui n’a pas de carte de presse), ou même les nouveaux médias français comme « AgoraVox », qui débute et veut se faire une place, exploitent le fond de commerce facile du secret et du Complot, dans la lignée du « Da Vinci Code », tellement à la mode ! Ils ne sont ni les seuls, ni les premiers, tout est bon pour « faire vendre » - mais est-ce pour cela vérité ?
• Oui, l’activisme des blogs, qui se veulent naïvement « citoyens » sans avoir la moindre idée du traitement d’information, montre qu’il est toujours plus fascinant d’évoquer le mystère, d’accuser le non-dit, plutôt que d’enquêter sérieusement. Shootés aux jeux vidéos depuis leur plus jeune âge, les internautes les plus actifs préfèrent les « révélations », ils gagneront ainsi plus d’audience. – Est-ce pour cela que les citoyens de bon sens doivent les croire ?
Bien sûr qu’il reste des zones d’ombre ! Eric Laurent, journaliste spécialiste des Etats-Unis, qui a enquêté en 2004 dans un livre « La face cachée du 11-Septembre », note à ses yeux les trois principales :
1. Pourquoi Oussama Ben Laden, qui a avoué en être le commanditaire dans au moins trois vidéos, n’est-il toujours pas inculpé par la Justice américaine pour les attentats du 11-Septembre ?
2. Pourquoi les organismes qui surveillent les marchés financiers n’ont-ils pas détecté puis dénoncé un délit d’initié portant sur l’achat des actions des compagnies American et United Airlines dont les avions furent détournés par les terroristes, dans les jours précédant le 11 septembre ?
3. Quelle est la véritable identité des pirates de l’air ? Contrairement aux affirmations officielles, cinq d’entre eux ont usurpé l’identité de personnes toujours vivantes, Eric Laurent déclare en avoir retrouvé les noms et la trace et noté les vives protestations à la découverte de leur visage sur la liste diffusée par le FBI.
Mais ces zones d’ombre sont affaires américaines : en faire la Une des blogs français évite confortablement d’enquêter sur nos propres « affaires ». Est-ce bien sérieux, bien « citoyen » ?
Il y aurait donc une autre « explication » à cette contagion paranoïaque : celle par la modernité égalitaire. Alexis de Tocqueville, dans « De la démocratie en Amérique », évoquait une nouvelle forme de servitude démocratique : celle où l’homme se trouverait privé en douceur de son humanité. Voire même, il y aspirerait, afin d’être « comme tout le monde ». Les dérives peuvent être légion via l’activité scientifique, l’autonomie de la technique, la concentration des firmes, l’uniformisation des mœurs, le conformisme ambiant, l’individualisme conjugué (particulièrement aux Etats-Unis) à l’anonymat de masse, et la socialisation des individus par les médias (dont internet est le dernier avatar).
Il y a donc désir d’Etat protecteur et organisateur de la société, de grand frère/Big Brother, ce qui permet – dans le même temps – la pseudo-liberté de se chamailler tranquillement, d’avoir l’illusion d’exister en proférant n’importe quel délire « personnel ». Nul besoin de coller à la réalité, l’Etat est là pour ça - ce pourquoi on répugne à critiquer au fond le sien. Protégés, nourris, assurés, les petits individus peuvent alors donner libre cours à leurs fantasmes, juste par jeu, comme les chats domestiques qui n’ont plus besoin de chasser mais étranglent la balle en plastique en lieu et place de la souris.
Laissons donc s’amuser les ados, fantasmer les infantiles, délirer les paranos. Pour notre part, nous préférons la froide analyse.
La présentation des faits :
Le site qui ramasse toutes les informationsBBC archives
CNN memorial
United Airlines Fly full transcript of cockpit conversations
Digital archives on September 11L’information officielle :
Pentagon video on YouTube
The National Security Archives
The 9-11 Commission Report
Congressionl reports
NPR audio chronicle of The Commission Report
Seismic observation on 11-SeptL’analyse académique :
Analyse géopolitique des suites par un Ambassadeur de France
Alexander Cockburn dans Le Monde Diplomatique
Opinion d’un ingénieur de SupAéro
Yale University press release
Academic info
National Academies claim openness for scientific exam on 9-11
St Andrews University (UK) Centre for the Study of TerrorismLa presse d’opinion :
Agoravox dossier 11-Septembre
TF1 vidéos
Guardian on CIA 9-11 Report et autre article
New York Times on American bureaucracy
The Neo-Conservative opinion
Al Jazeera point of view on 9-11 ReportLes complotistes :
Thierry Meyssan et son Réseau Voltaire
Loose change le film sur Dailymotion
Alien detainees
Plot speculations on 9-11