Le Président de l’Assemblée nationale, M. Bernard Accoyer, envisage d’appliquer aux députés absents les sanctions financières prévues par le règlement. Je dois avouer que cette annonce m’a laissé pantois. Les lois et règlements sont faits pour être appliqués. On a même réussi dans certains cas de leur non-respect à déclencher automatiquement des sanctions. Je ne comprends donc pas qu’en soit exempté le temple de la souveraineté populaire, là même où les lois de la République sont élaborées. Nos députés bénéficient d’une immunité parlementaire. Celle-ci n’a aucune raison d’être s’ils ne remplissent pas leur tâche.
Si, depuis fort longtemps, de nombreuses infractions routières donnaient lieu à l’établissement d’un procès-verbal, la sanction étant ensuite prononcée par un juge, depuis quelques années on n’a pas hésité à s’affranchir de ces servitudes d’un autre âge, avec la mise en place de radars automatiques. Ces engins déclenchent l’émission d’amendes, voire le retrait de points sur le permis de conduire, citant comme contrevenant le propriétaire du véhicule, ce qui n’est pas nécessairement le cas. Je m’étonne donc qu’il soit nécessaire au sein de l’Assemblée nationale de décider d’appliquer le règlement, alors que l’immense majorité des autres citoyens n’ont d’autre choix que de se soumettre au leur.
Pour justifier leur régime de retraite particulier, nos députés avancent que, à la différence des autres salariés, leur carrière de député peut se trouver interrompue à l’occasion d’une élection et qu’il importe de ne pas décourager des vocations. Je ne sais s’il est possible de signer un contrat à durée déterminée de cinq ans mais, si c’est le cas, on pourrait les considérer comme titulaires d’un CDD de cinq ans. A ma connaissance, on n’a pas tant de prévenance pour les autres CDD, alors que, de surcroît dans la pratique, beaucoup nos députés réussissent à voir leurs « CDD » renouvelés.
Je me permets de rappeler à nos députés qu’il est des métiers où ce sont, non seulement les manquements à l’assiduité qui sont sanctionnés, mais également ceux à la ponctualité. J’ai assisté un jour de grève des transports, dans un hôtel, à une scène qui m’a révolté. Alors que je réglais ma chambre arrive précipitamment dans le hall d’entrée une femme mise très simplement. A cet instant, une dame l’interpelle : « C’est à cette heure-ci que vous arrivez, je vous attendais ce matin à six heures, retournez chez vous, je ne veux plus de vous aujourd’hui !» Bel exemple d’humanité, une femme de ménage privée de ses transports publics qui s’efforce de gagner malgré tout son lieu de travail et sa supérieure qui se préoccupe avant tout d’économiser le paiement de quelques heures de travail.
Il est indispensable que nos députés, si soucieux d’égalité, aient conscience du fait qu’ils sont des privilégiés. Ils bénéficient de nombreuses commodités parce que, comme ils nous représentent, on a voulu qu’ils aient toute facilité pour accomplir leurs tâches et donc, comme tout salarié, ils ne sauraient y manquer. Bien évidemment, leur réponse est toute prête : nous avons tellement à faire. C’est ce que je considérerai dans un autre billet.