La technique de Jericho
Cela faisait longtemps que nous n’avions pas eu une bonne ségolade à nous mettre sous la dent. Heureusement, privée de parti, Ségolène Royal entend faire exister sa faction. Un mélange malhabile d’orgueil démesuré, de goût du scandale et de moralisme revisité l’a ainsi conduite par deux fois à présenter ses excuses à l’étranger pour des propos tenus par Nicolas Sarkozy.
Qu’importe le fond de ce qu’elle critique, la technique est la bonne : en transgressant le code des us et coutumes de la vie politique, Ségolène Royal parvient à faire parler d’elle à peu de frais tout en se positionnant sur un créneau politique singulier, celui de la Dame des Vertus.
Admirons donc au passage tout la subtilité venimeuse de sa stratégie qui consiste à prendre d’assaut la scène nationale par l’extérieur – une vieille antienne dans l’ »arsenal Royal » de conquête du pouvoir – tout en empruntant à Sarkozy ce qu’elle lui reproche, l’art de la transgression.
Royal est adepte de la technique de Jericho pour prendre les place-fortes qui lui résistent : tourner autour en soufflant dans des cors de chasse.
La repentitude
Ceci étant dit, je ne sais trop si nous devrions nous réjouir d’avoir deux voix de la France, un canal officiel et un canal réservé à Jeanne d’Arc et à la « résistance à l’occupant ». Non seulement nous devons apparaître comme passablement ridicules à l’étranger, mais notre message politique risque de se déligitimer de lui-même. La route est droite, mais la repentitude est pentue…
Mais n’est-ce pas finalement l’objectif de Ségolène ? Provoquer la Crise qui la placera en état de sauver ce pays ?
Dé-légitimer. Telle est l’arme de guerre que Ségolène Royal entend opposer à tous ceux qui, à un moment ou à un autre, ont été en mesure de questionner son ambition d’accéder au pouvoir suprême, qu’il s’agisse de Martine Aubry (« Nous avons rassemblé la moitié des voix et sans doute un peu plus…« ), de Nicolas Sarkozy, ou d’un simple journaliste (« M’auriez vous posé cette question si j’étais un homme ? »).
Il y a finalement chez Ségolène Royal, la femme des jurys-citoyen, un déni de réalité et un idéalisme un peu illuminé qui la rapproche de Maximilien de Robespierre, l’homme des comités de salut public. Les deux ont en commun un parcours peu éblouissant et des idées très générales et très théoriques sur la société.
Qu’on se le dise, comme Robespierre, Royal se sent investie par un Peuple idéalisé dont elle entend être la Pythie de Delphes unique. Son peuple ne se partage pas. L’ordre juste est-il un ordre de Saint-Just ?
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