L'étude dite « d'imprégnation » de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), en partenariat avec l'Institut de veille sanitaire (InVS) vise à savoir si les consommateurs de poissons de rivière ont été plus exposés aux PolyChloroBiphényles (PCB) que l'ensemble de la population. Alors qu'elle devait débuter en novembre dernier et livrer ses premiers résultats en juillet 2010, elle n'aura finalement démarré qu'en avril. Cette enquête implique 900 foyers de pêcheurs amateurs sur 6 zones de pêche contaminées ou non par les PCB , commentent dans un communiqué l'Afssa et InVS.
Les deux organismes ont été chargés, dans le cadre du plan national d'actions sur les PCB lancé par les ministères chargés de l'Ecologie, de l'Agriculture et de la Santé, de réaliser une étude sur l'exposition et l'imprégnation par les PCB des consommateurs adultes, de poissons de rivière, principalement les pêcheurs et leurs conjoints. L'objectif : mesurer l'imprégnation des consommateurs de poissons de rivière dans des secteurs où une pollution a été identifiée et à les comparer à l'imprégnation de populations non exposées. Réalisée sur 4 sites présentant différents niveaux de contamination aux abords de certaines portions de la Somme, du Rhône, de la Moselle, du Rhin et de la Seine ainsi que sur deux sites témoins non contaminés des bords de la Loire et de la Garonne, l'étude porte sur 900 personnes qui ont été sélectionnées de manière aléatoire à partir des listes des adhérents des Associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique (AAPPMA).
Les teneurs sanguines en PCB et les habitudes de consommation alimentaire des participants, consommateurs et des non consommateurs de poissons de rivière, vont être analysées. En parallèle, le niveau de contamination des poissons de ces zones sera mesuré. Les collectes et analyses des données devraient durer plusieurs mois et permettront d'aboutir à des recommandations quant aux fréquences de consommation sans danger pour l'Homme. Celles-ci seront définies selon les espèces de poisson et par population cible et seront disponibles en février 2011, précise l'Afssa.
Rappelons qu'en réponse à la mise en évidence en 2005 d'une pollution de grande ampleur du Rhône par les PCB, la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire de l'Assemblée nationale avait confié à Philippe Meunier, député du Rhône, le soin de faire le point sur la portée de la crise et l'ampleur de ses répercussions sanitaires, économiques, sociales et écologiques. Présenté le 25 juin dernier à l'Assemblée nationale, le rapport d'information mettait en relief l'inadaptation des structures administratives à la gestion de crise. Eu égard au précédent épisode de pollution des années 1980, force est de constater que l'administration s'est quelque peu laissée surprendre par la crise survenue à compter de 2005, pouvait-on lire dans le rapport. De manière à faire réagir les pouvoirs publics face aux risques sanitaires liés à cette pollution, le WWF et l'Association Santé-Environnement Provence (ASEP), constituée de 300 médecins de la région avaient lancé leur propre étude sur l'impact de la pollution aux PCB dans le Rhône.
Les PCB n'existent pas à l'état naturel. Ils ont été produits par l'Homme dans les années 30 en raison de leur grande stabilité thermique et leurs caractéristiques électriques avant d'être interdits progressivement dans les années 80 au regard de leurs impacts néfastes sur l'environnement et la santé. Peu solubles dans l'eau, peu biodégradables et bioaccumulables, les PCB rejetés dans l'environnement se fixent dans le temps sur les matières en suspension et les sédiments des cours d'eau. Ils contaminent ensuite par ingestion la chaîne alimentaire, des crustacés aux poissons dans lesquels ils s'accumulent via les tissus graisseux. L'homme risque alors d’être contaminé à son tour par l'ingestion de produits pollués. L'homme est exposé aux PCB essentiellement par la consommation de produits gras d'origine animale : poissons, viandes et produits laitiers , explique l'InVS.
Si une exposition accidentelle de courte durée aux PCB n'a pas de conséquence grave, une exposition chronique même à faible dose présente divers effets néfastes chez l'animal, notamment des effets cancérogènes. Ils ont d'ailleurs été classés en tant que substances probablement cancérogènes pour l'homme. Les effets chroniques des PCB peuvent être également des dommages du foie, des effets sur la reproduction et sur la croissance.
Les techniques de dépollution étant encore au stade de la recherche, la dépollution n'est pas encore au programme. Plusieurs travaux de recherche sur les eaux douces et les eaux marines sont en cours au sein de différents établissements privés ou publics. Le pôle de compétitivité Axelera a obtenu notamment un budget de 12 millions d'euros pour étudier cinq des technologies de dépollution : le dragage et le criblage pour identifier la fraction concernée par la pollution aux PCB, le confinement sur site, les méthodes d'absorption, le traitement thermique et les approches biologiques. Ces dernières consistent à mettre au point un réacteur permettant de développer des bactéries spécifiques mais également de déterminer comment sélectionner des champignons ou des bactéries dans le milieu pour activer la dégradation des polluants. L'ensemble des techniques sera testé sur deux plates-formes expérimentales : l'Institut National des Sciences Appliquées (INSA) de Lyon et une seconde pouvant accueillir de gros volumes de sédiments sera mise en place dans le sud de Lyon. Ce programme de recherche doit durer trois ans et aboutir à la définition de 13 nouvelles technologies de traitement et 14 outils et méthodes pour maîtriser les PCB et autres polluants aquatiques.