Libération consacre un article à l'essai publié par la philosophe Sylviane Agacinski sur la "barbarie" des mères porteuses : Corps en miettes (Flammarion).
"On peut se demander si la leçon du nazisme a réellement été tirée tant l'opinion semble se soucier peu de ce que signifie notre humanité ou de l'esprit de nos lois. Elle privilégie la puissance technique et la demande individuelle. Certains techniques permettent de confectionner des enfants, et il y a des individus qui "demandent" à utiliser ces moyens. Le reste a-t-il vraiment de l'importance ?", écrit-elle.
Elle dénonce par ailleurs l'usage du mot "gestatrice" qui "relève d'une ruse rhétorique qui contribue à secondariser la femme portant un enfant, pour faire un sac, une sorte de logement temporaire, simple entrepôt où stocker l'enfant conçu par d'autres qui en attendront la livraison". Idem pour l'abréviation "GPA" (pour "gestation pour autrui") : "trois petites lettres (...) sans doute rassurantes" mais qui "constituent une mystification et maquillent une forme inédite de servitude et d'abaissement des femmes".
La philosophe s'élève contre l'exploitation du corps d'autrui au centre du "baby business", "l'aliénation biologique" qui "s'installe dans la procréation artificielle". "Devant l'indifférence à l'égard de ces femmes, dont on fait aujourd'hui des couveuses "indemnisées", on ne peut s'empêcher de reconnaître la froideur égoïste et le vieux mépris de classe de ceux qui estiment normal de mettre la vie des autres à leur service." Elle se demande enfin si le fait que les mères porteuses justifient leur "don" par générosité ou altruisme n'est pas "l'aspect le plus répugnant de l'affaire".
Par ailleurs, Le Parisien publiait, vendredi 10 avril dernier, un dossier sur les mères porteuses, au lendemain de l'appel lancé par 60 personnalités en faveur de la légalisation de cette pratique (cf. Gènéthique, synthèse de presse du 31/03/09) et alors que le sujet devrait être évoqué au cours de la révision de la loi de bioéthique. Secrétaire d'Etat à la Famille, Nadine Morano s'est de nouveau prononcée en faveur de la légalisation de cette pratique.
En réponse à la position de Nadine Morano, Jean-Frédéric Poisson, député UMP des Yvelines et porte-parole du Forum des républicains sociaux (FRS), a déclaré que : "défendre les mères porteuses, c'est aller vers une société libertaire et utilitariste". "C'est une chose de déclarer vouloir dépassionner le débat, c'en est une autre de traiter les questions de société à coup de bulldozer", a-t-il poursuivi.
Source: Gènéthique.
Repères
- Sylviane Agacinski : «La gestation pour autrui est un commerce dégradant»
Le dernier livre de la philosophe Sylviane Agacinski est un vibrant réquisitoire contre la gestation pour autrui
La Croix.
- En Ukraine, des femmes louent leur ventre.
L’Ukraine autorise la pratique des mères porteuses. Particulièrement libérale sur le sujet, sa loi ouvre la voie à un véritable marché de la procréation, accessible aux étrangers.
La Croix.
- Mères porteuses, à quel prix ? Caroline Eliacheff, René Frydman.
Au fond, de quoi s'agit-il ? Tout simplement de faire un enfant. Mais encore ? Un enfant génétiquement de soi. Et pour y satisfaire quand on n'y arrive pas à deux, on n'hésiterait pas à faire courir des risques à de nombreuses personnes. Comment ? D'abord en pratiquant une fécondation in vitro (FIV) avec les ovules de la femme dépourvue d'utérus et le sperme de son compagnon. Puis en transférant l'embryon ainsi obtenu dans l'utérus d'une femme porteuse. Ce qui compte, c'est l'enfant de soi, de ses gènes.
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- Mères porteuses. Va-t-on en France pouvoir "acheter" des enfants ?
Dans le journal France Soir, Bernard Debré, professeur de médecine, revient sur le cas de la petite Donna, pour dénoncer les problèmes posés par la pratique des mères porteuses.
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LES COMMENTAIRES (1)
posté le 25 avril à 01:18
Merci madame, "la gestation pour autrui" est une vraie barbarie, qui réduit le corps de la femme à l'état de machine. Le désir et la souffrance de couples stériles ne peut pas justifier que la société fasse des choix qui aille à l'encontre de la dignité humaine.