Ted Carpenter - Le 16 avril 2009. L’annonce par la Corée du Nord de son retrait des négociations sur sa dénucléarisation en réponse à la réaction plutôt tiède du Conseil de Sécurité des Nations Unies suite au tir de missile test nord-coréen le 5 avril pose un dilemme. Les Etats-Unis et les Etats d’Asie de l’Est ont jusque là fait l’hypothèse qu’une solution diplomatique au programme nucléaire nord-coréen était possible. Ce règlement du différend entrainerait la renonciation par Pyongyang à ses ambitions nucléaires en échange de concessions diplomatiques et économiques. Mais si cette hypothèse était fausse ?
Et si depuis six ans le régime de Kim Jong Il avait gagné du temps pour construire des têtes nucléaires et un système fiable de missile ? Il aurait été relativement facile pour Pyongyang d’ignorer les condamnations des Nations Unies et de rester à la table des négociations. L’action du Conseil de Sécurité lundi 13 avril a été timorée puisque le résultat n’a même pas été une résolution contraignante. C’était juste une déclaration du président du Conseil condamnant le lancement de missile et une demande aux Etats membres de faire respecter de manière plus efficace les sanctions, peu sévères, imposées en 2006 suite à l’essai nucléaire nord-coréen. La Corée du Nord a prétexté de la réponse du Conseil pour quitter la table des négociations.
Que peuvent faire les Etats-Unis et les voisins de la Corée du Nord en Asie de l’Est si Pyongyang n’accepte pas d’abandonner ses ambitions nucléaires ? Quel est le « plan B » si les négociations à six échouent ? Puisqu’une action militaire contre la Corée du nord est bien trop dangereuse, il n’y aurait que trois autres options, et aucune n’est complètement convaincante et sans risque.
La première option serait de suivre la suggestion de l’ancien ambassadeur américain aux Nations Unies John Bolton et celle d’autres partisans de la ligne dure en imposant des sanctions économiques multilatérales bien plus sévères. Cette stratégie a un gros défaut cependant. Pékin et Moscou sont tous deux opposés à des sanctions accrues. Le refus de la Chine est crucial, car sans la coopération chinoise, des mesures économiques coercitives n’auraient que peu d’impact sur Pyongyang. Et étant donné la dépendance des Etats-Unis à l’égard de la Chine sur la question du bon vouloir de cette dernière à continuer à financer la dette américaine qui explose, les dirigeants américains ne sont pas véritablement en position de négocier.
La deuxième option consisterait à accepter que la Corée du nord deviennent un Etat possédant des armes nucléaires et de se reposer sur la dissuasion pour empêcher un comportement agressif. Cette approche est crédible puisque les Etats-Unis ont réussi à dissuader par le passé d’autres acteurs nucléaires ennemis comme l’URSS ou la Chine maoïste, et l’important arsenal nucléaire américain pourrait dissuader des Kim Jong Il. Mais être capable de dissuader une attaque directe n’écarte pas la possibilité d’autres « bêtises » nord-coréennes. Les activités de prolifération de Pyongyang sont particulièrement inquiétantes. Sa probable assistance nucléaire à la Syrie soulève la question de quels autres pays – ou même, de manière plus inquiétante encore, quels autres acteurs non étatiques – pourraient bénéficier de cette aide.
Une dernière option mérite qu’on s’y attarde. Elle reviendrait à inciter la Chine à déposer le régime de Kim Jong Il et de mettre en place un gouvernement plus pragmatique à Pyongyang, et de s’assurer que le pays n’ait plus d’ambitions nucléaires. La négociation impliquerait aussi un engagement de la part de Pékin à promouvoir la réunification des deux Corées dans la génération à venir. Lors de mon voyage en Chine l’année dernière, si les décideurs politiques affichaient leur loyauté envers l’allié de longue date de Pékin, certains avaient du mal à cacher leur exaspération à l’égard de Pyongyang.
Les Chinois pourraient renverser Kim avec un coup au Palais. Mais le prix de ce deal pour les Etats-Unis et leurs alliés serait sans nul doute très élevé. A tout le moins, Pékin pourrait souhaiter un engagement des Etats-Unis à mettre un terme à leur présence militaire dans la péninsule coréenne et, probablement, à diminuer peu à peu leur alliance de sécurité avec la Corée du Sud. Il est fort probable par ailleurs que les dirigeants chinois exigent des concessions sur la question de Taïwan.
Les décideurs américains et est asiatiques sont donc confrontés à des choix difficiles, qui impliqueraient des sacrifices pour mettre un terme à la menace nucléaire nord coréenne. Dans tous les cas, les Etats-Unis et les Etats de l’Asie de l’Est doivent aujourd’hui se poser la question d’un plan B. Etant donné le passif de la Corée du nord, il ne parait pas prudent de simplement espérer que les négociations produiront une solution qui soit respectée.
Ted Carpenter est analyste au Cato Institute.