Pitreries pascales

Publié le 15 avril 2009 par H16

C'est la trêve pascale. L'actualité semble au plus calme : les députés, après une brillante démonstration de toute l'étendue de leur pusillanimité, sont partis en vacance, rendant à l'auguste bâtiment de l'Assemblée un peu de sa dignité depuis bien longtemps évanouie. Même Le Monde tente mollement de lancer une vague polémique papale supplémentaire en l'accusant, avec aplomb, de christianisme sans borne puisqu'il aurait déclaré croire, le (Saint) Bougre, en la résurrection du Christ ! Où va-t-on ? Ou plutôt, où va Le Monde pour en être réduit à lancer des accusations aussi fantaisistes ? En fait, tout se passe comme si l'actualité politique devait, pendant ces derniers jours, se remplir de toutes les bêtises et gamineries qui passent par la tête de nos élites et de ceux qui les adulent, sont dans leurs petits papiers et nous en fournissent.

Bon, je suis un peu (un peu seulement) méchant avec le Monde, puisque ces abrutis de pisse-copies se sont contentés de reprendre les conneries de calibre cosmique du gang de connards épais de l'AFP.

Comme je l'avais souligné à plusieurs reprise dans ce blog, la France dispose de la meilleure presse du monde et nous savons maintenant qu'elle dispose du meilleur Monde qu'on puisse avoir, dès que le Pape entre en jeux.

Au passage, je ne suis pas le seul à goûter au sel de cette nouvelle bêtise de l'AFP, puisque mon confrère Chafouin des Kiwi relate aussi les pathétiques tentatives des journalistes pour créer une nouvelle tornade médiatique sur le pape en ces temps de morne actualité.

Il est vrai que lorsqu'on ne tape pas sur le pape, on doit retourner vers les clowns qui nous gouvernent. Et, pour certains journalistes, en France, c'est devenu délicat tant leur collusion avec les zouaves aux commandes est forte. On ne peut pas trop taper, trop fort, tout le temps. Ça finirait par envoyer son honnête folliculaire au RMI, ça, madame...

Alors, on se contente, discrètement et par exemple, de relayer le bruit qu'un remaniement ministériel serait en vue, puis de relater les petits désidératas de certains ministres sur les nouvelles positions qu'ils seraient susceptibles d'occuper.

Oui, certes, c'est bien de l'information. Et, honnêtement, il est assez croustillant de constater que ça agace le patron au point qu'il soit obliger de recadrer ses sous-fifres. Mais pour une fois (qui n'est pas coutume, hein), je suis obligé d'être d'accord avec Sarko lorsqu'il déclare à ce sujet que "les Français traversaient actuellement une période difficile et que le rôle du gouvernement dans cette période c'était de se concentrer sur les préoccupations des Français" ... Je pousserai cependant la remarque plus loin en l'appliquant aussi à ces journalistes plus prompts à trifouiller dans les discours papaux, ou dans les petites phrases politiques obtenue dans les couloirs dorés de la République, qu'à essayer d'aller voir exactement l'état général du pays, vu par ses habitants.

En effet, du point de vue des politiques, il est assez facile d'envisager, avec la décontraction feutrée qui caractérise un sénateur, une hausse des impôts. Depuis les locaux spacieux et bien tenus des principales mairies de ce pays, il n'est pas encore trop difficile d'évoquer, sans trop sentir la sueur perler au front, une augmentation des impôts locaux.

La différence est surtout dans la proximité des élus aux électeurs. Pour les sénateurs, très très loin du troupeau de moutontribuables, la laine est déjà récoltée, nettoyée, filée, bobinée et quasi-prête à l'emploi. En demander deux ou trois (milliards de) bobines de plus, ce n'est pas trop compliqué, et, vu de loin, les paisibles herbivores ne sont que des petits points inoffensifs sur la prairie fiscale. Depuis la mairie, évidemment, les animaux de tonte sont nettement plus proches : on en sent l'odeur âcre de pauvre sans mandat, sans privilège et sans passe-droit démocratique ; on les voit même se masser, petit à petit, d'abord pour éviter le froid mordant qui les enveloppe une fois tondus, puis par peur parce qu'à la prochaine tonte, faute de laine, ce sera la peau qui sera arrachée.

Mais diable, où sont les journalistes pour aller voir toute cette classe moyenne, celle des gens qui gagnent de moins en moins leur vie en travaillant ? Ceux qui, justement, payent, plus ou moins joyeusement, des impôts, de la TVA, de la TIPP, des cotisations à ne plus savoir où ça va ? Ceux qui entendent qu'ils sont des salauds de riches qui doivent participer à l'effort général ? Ceux qui sentent nettement qu'il vaut mieux ne pas travailler qu'être ponctionné, qu'il vaut mieux être ponctionné que prendre le risque de créer de l'activité ? Ceux à qui, justement, sera réclamé, pendant les 40 prochaines années, de payer la dette colossale que ces politiciens ont déjà accumulée, sans même parler de celle qu'ils fabriquent en s'agitant actuellement ?

On n'en entend pas parler.

Eh oui.

Et le journaliste moyen a une réponse toute faite pour ne pas avoir à parler de ceux qui payent des impôts. Ce serait sombrer dans le populisme, mon brave ! Dire que nos parlementaires sont des guignols gavés de privilèges qui rackettent les citoyens, ce serait du poujadisme, enfin ! Oser prétendre qu'en réalité, dans ce -foutu- pays, le problème vient de l'avalanche d'impôts et de taxes d'un état obèse présent dès avant le téton jusqu'à bien après le sapin, ce serait faire le jeu de l'ultra-néo-libéralisme, voyons, vous n'y pensez pas ! Quant à dénoncer les gabegies, c'est à peine digne de J.P. Pernault, voyons ! Comme le messager est patelin et trop France-profonde, on tirera sur lui et on mangera le message, hein.

Ainsi, prenant une posture furieusement tendance, on prendra bien soin de ridiculiser ou faire semblant de mépriser les questions d'argent, alors que, très manifestement, le Kapital est en réalité la principale occupation des collectivistes de gauche (qui reprochent, aigris, aux autres d'en avoir toujours trop) et des collectivistes de droite (qui aiment surtout l'Etat pour le pouvoir qu'il offre de le diriger là où leurs intérêts se trouvent).

Au final, l'information jugée essentielle sera donc qu'il faut augmenter les impôts, parce que... parce que bon ! C'est comme ça ! D'ailleurs, tout le monde sait que les impôts résolvent les problèmes : en France, à chaque trou, à chaque crise, on a usé de cette solution et à chaque fois, par un habile accroissement de l'état, on est parvenu à résoudre le problème, n'est-ce pas ?

Comme du côté des politiques, il est facile et doux de carburer aux impôts, et que du côté des journalistes, il est commode et apaisant de ne surtout pas remettre en question les dogmes collectivistes (Répartissons la pauvreté ! Répartissons la pauvreté !) et keynésiens (Dépensons en pure perte, vite, vite !), chacun se confit de sa propre assurance et creuse, tête baissée, toujours plus profond : les premiers, dans les poches des contribuables ; les seconds, dans les profondeurs insondables de la bêtise humaine. Laissez mijoter pendant quelques décennies, et vous obtenez des clowns et des pitres.

Les clowns passent leur temps à faire entrer des petits fours de l'Elysée ou du Palais Bourbon à l'une de leurs extrémités et à faire sortir des lois par l'autre, en croyant que ceci constitue l'essentiel de l'action de fond(s) nécessaire à la résolution d'une crise qui leur échappe totalement. Quant aux pitres, ils détaillent par le menu l'ordre de préséance qui gouverne les gobeurs et les pondeurs de lois compulsifs, le tout à douze centimètre des orifices en mouvement, ce qui leur permet de récupérer des miettes tout en excluant toute espèce de prise de recul.

Le constat est, malheureusement, sans appel : en France, décidément, on n'a jamais eu de pétrole, on n'a plus d'idées, mais on a des pitres et des clowns.

Au moins, la crise nous paraîtra plus amusante.