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Pourquoi Richard Kelly est un génie incompris...

Publié le 15 avril 2009 par Exnight
Quant on parle de réalisateurs "pop", quels sont les noms qui viennent immédiatement à l'esprit ? Judd Apatow et sa clique (40 ANS TOUJOURS PUCEAU, SANS SARAH RIEN NE VA....). Jason Reitman (THANK YOU FOR SMOKING, JUNO). Ben Stiller (TONNERRE SOUS LES TROPIQUES, GENERATION 90...). Edgar Wright (SHAUN OF THE DEAD, HOT FUZZ). Kevin Smith (CLERKS, JAY & SILENT BOB...). Mais si tous bourrent leurs scripts et mise en scène de références diverses au cinéma, au web, à musique ou à la télé, tous exercent leur style dans un registre comique.
Rares sont en effet ceux qui utilisent la culture pop pour des drames ou d'autres genres : il y a bien sûr Quentin Tarantino, le plus célèbre d'entre tous. Mais la rock-star du movie business a légèrement tendance à s'auto-parodier et à devenir le bouffon de service, à mon humble avis.
La vrai héros pop du nouveau millénaire cinématographique, c'est Richard Kelly. Il n'a réalisé que trois films : les deux premiers ont été largement ignorés lors de leur sortie salle alors que le troisième doit sortir en novembre prochain et il en a écrit un quatrième complètement méprisé par la majeure partie du public et l'ensemble de la critique. Bref, Richard Kelly, jeune metteur en scène de 34 ans, a la poisse.
C'est pas faute de talent pourtant.

Son premier film DONNIE DARKO (2002) a beau n'avoir récolté en salles que 500 000 dollars (sur un budget de 4,5 millions !), il s'est vendu comme des petits pains en DVD. Car entre temps, l'histoire de cet ado se voyant annoncé la fin du monde par un lapin géant a complètement envoûté une bonne partie de la jeunesse du monde entier. Beaucoup se sont en effet retrouvés dans les névroses et la mélancolie bien propre au nouveau millénaire qui se dégageaient de ce film : fini la génération X hésitant en rébellion et apathie cynique, bienvenue à la solitude en réseaux et au spleen 2.0.
La deuxième fois que l'on a entendu parlé du jeune auteur, c'est en 2005 avec DOMINO dont il a écrit le scénario. A priori, les univers de Richard Kelly et de Tony Scott auraient pu paraître inconciliables, tant ce dernier s'est fait une spécialité des montages frénétiques et de l'action trash. C'était oublié que Scott avait dix ans auparavant mis en scène les mots d'un autre auteur "pop", ceux du désormais célèbre Quentin Tarantino, pour TRUE ROMANCE. C'était également négligé la rage intérieure et les influences de Kelly qui se saisit de l'histoire vraie d'une ancienne top model/fille d'acteur devenue chasseuse de prime pour créer un pur moment de jubilation "pop", convoquant acteurs has-been de "Beverly Hills", Tom Waits ou Jerry Springer et références incessantes à deux décennies pop dans un grand déluge de romantisme macabre et baroque.

Enchaînement logique avec son deuxième film de réalisateur : SOUTHLAND TALES, qui vient juste de sortir en DVD en France, près de 3 ans après un passage désastreux à Cannes. Sur un pitch alambiqué de science-fiction et de fin du monde, Kelly convie des comiques du Saturday Night Live, un ancien catcheur, une diva de séries TV pour ados, une pop-star blondinette ou encore un acteur fétiche de Woody Allen pour ce qui ressemble à une ambitieuse déclaration de guerre au gouvernement Bush.

Car voilà le génie de Richard Kelly. Comme personne avant lui, il parle de la société de l'an 2000, de notre monde et donc de nous-mêmes par le biais de sa culture populaire. Et voilà donc pourquoi il est tant incompris, pourquoi ses films se retrouvent trop souvent sans gloire dans les bacs des vidéo-clubs. Kelly est un enfant des années 80 et un adolescent des années 90 : il a été nourri par MTV, les films d'action de Jerry Bruckheimer, le Saturday Night Live, les slashers movies et j'en passe. Des références peu prestigieuses, jamais vraiment reconnues à leur juste valeur par l'intelligencia critique et artistique dans tout ce que ça a de plus barbant (oui Festivals du monde entier, c'est de vous que je parle !).
Il est ainsi moins classe de parler de porn-stars, de films d'action de séries B, de blondinettes arrogantes, de chansons pop ou de télé-réalité que d'Ingmar Bergman, de Duke Ellington ou d'Antoine Doinel mais on a l'époque que l'on mérite. Et il faut bien se faire une raison : les stars du nouveau millénaire ont leur sex-tape, écument la trash TV ou remuent leur gras siliconé sur des chaînes câblées. De ces nouvelles icônes, Kelly n'en fait pourtant pas des héros. Mais il n'en fait pas non plus des ennemis. Au contraire même. Il en fait plutôt des victimes, les victimes du fascisme rampant, du capitalisme dégénérant et des gouvernements malfaisants. Voilà les vrais ennemis.

C'est de cela qu'est fait DOMINO ou SOUTHLAND TALES - et d'une façon plus détournée (subtile, diront certains) DONNIE DARKO. Ces films sont les résultats d'une vision certes excessive et désordonnée mais surtout totalement fascinante. Richard Kelly est un jusqu'au-boutiste : il va au bout de ses idées, quitte à perdre. C'est peut-être cela qui l'a poussé à placer au beau milieu de SOUTHLAND TALES une surréaliste scène de comédie musicale dans laquelle Justin Timberlake entonne dans une salle d'arcade de L.A. le "All The Things That I've Done" des Killers ("I Got Soul But I'm not a Soldier...") - scène qui est peut-être au final la plus symptomatique jamais filmée de notre ère.
Bref, tout ça pour dire que s'il y a un film à ne pas louper en ce moment, il n'est pas à voir au cinéma mais sur son écran de télé. Vous l'aurez compris : SOUTHLAND TALES est disponible chez tous les bons vidéos-clubs et dans les bons bacs et sur tous les bons sites Internet. C'est dommage mais c'est comme ça...
Et pour finir, si vous aimez ce blog, les films, les séries, les émissions de télé, les comiques dont je parle à longueur de posts, il se peut très fortement que vous aimiez fortement SOUTHLAND TALES. Voilà, la promo est terminée et elle était gratuite...

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