La leader socialiste connaît un contexte particulièrement porteur avec le retour en force de la parole de gauche.
Avec la crise économique, le concept de classes refait surface.
Lorsqu'il est question de " classes ", chacun pense aussitôt à Marx. Ce n'est pas Marx qui a inventé le concept qui apparaissait déjà sous Platon. Marx a mis en évidence que l'antagonisme des classes était le moteur de l'évolution sociale.
Cette logique d'opposition des classes redevient d'actualité. Le " bouclier fiscal " s'opposerait aux aides à la classe moyenne. Cette dernière serait victime des aides aux plus défavorisés … L'antagonisme des classes se réinstalle comme grille de lecture des rapports sociaux.
C'est un premier échec pour l'actuel pouvoir car cette grille de lecture installe une " parole de gauche " qui ne peut que lui être défavorable.
Il y a un second courant qui est tout aussi inquiétant pour le pouvoir présidentiel, c'est le besoin de vengeance qui se fait jour contre les élites.
Les élites sont frappées par trois maux aux yeux de l'opinion :
- une insuffisante circulation,
- une moindre exposition à la crise,
- une incapacité à sauver de la crise.
La société portée par Nicolas Sarkozy lors de la présidentielle 2007 est celle du mérite. Elle suppose une rapidité d'accélération des élites.
Ce sens du mouvement et du brassage des élites était un sens général d'évolution de la société. Or, les élites paraissent en France à l'écart du brassage alors même que l'élection emblématique de Barack Obama aux Etats-Unis décrispe ce pays sur ce volet.
Bien davantage, ces élites perçues comme repliées sur elle-même semblent épargnées par la crise. Leurs revenus bougent peu. Les aides publiques sont mobilisées pour les sauver. Leurs responsabilités personnelles ne sont pas engagées. Pour ces raisons, la crise ne semble pas frapper les élites ou du moins ne les frappe pas avec la même sévérité que les autres classes de la population.
Ce dernier volet ajouté au premier installe un besoin de revanche sur les élites parce que ces dernières moins impactées par la crise ne parviennent même pas à sauver les autres de la crise.
Ce sentiment est explosif pour le pouvoir présidentiel.
La légitimité des élites est en passe de devenir le sujet majeur de la vie politique et des prochains votes.
C'est une évolution très inquiétante pour le pouvoir présidentiel pour trois raisons.
Tout d'abord, le partage peut impliquer la généralisation des conflits. Nous sommes dans une période où l'opinion a le sentiment que les intérêts ne sont plus communs parce que le revenu national à partager diminue.
Ensuite, chacun adapte désormais sa grille de lecture des annonces présidentielles à la question : que touche la catégorie qui me concerne ? Cet intérêt de classe crée des réflexes dangereux en période de crise économique.
Enfin, le succès même de la lutte des classes repose sur un postulat qu'un individu appartenant à une classe considérée estime que l'amélioration de sa situation ne peut être que le résultat d'une action collective pour obtenir des avantages pris à d'autres catégories sociales.
La classe devient un sentiment d'appartenance plus fort que la communauté nationale et devient un agent de transformation de la société.
Le phénomène de classes repose sur la rivalité, donc sur la tension et sur une certaine forme de violence.
C'est une logique nouvelle des rapports avec le pouvoir.
Avec cette grille de lecture de l'action politique, le pouvoir est entré dans une conception très archaïque des rapports sociaux.