Nightmares on Wax n’intéresse plus grand monde. L’évidence, c’est que George Evelyn, DJ et patron du label Mo Wax, ne s’est plus distingué de sa formule trip-hop downtempo qu’il recyclait depuis le succès commercial de Carboot Soul en 1999. Pareilles à des plaquettes de voyagiste sur papier glacé, les répliques qui avaient suivi m’avaient si bien lassé que je ne m’étais jamais donné la peine de me pencher d’avantage au sujet de l’une des plus anciennes signatures de la maison Warp. Pourtant, ce deuxième opus, aux tonalités aussi légères et aérées que lointaines et chaleureuses, n’en demeure pas moins un petit bijou chillout des années 90’.
Somker's Delight est le produit d’une longue maturation. Pour en retrouver les prémisses, il faut remonter à l’époque où NoW formait encore un duo de house bleepée avec Kevin "Wonder Boy" Harper, rencontré dans un groupe de breakdance appelé les Soul City Rockers en même temps que Unique 3, b-boys eux aussi passés du hip-hop à la rave. Sur A World Of Sience : The Final Chapter, l’unique album né de leur collaboration, Evelyn avait placé en introduction un titre composé à partir des violons du multi-samplé "Summer In The City de Quincy Jones" (The Parcyde, Black Moon…). Initialement prévu pour ce projet encore en gestation, "Nights Interlude" annonçait l’écriture d’un nouveau chapitre qui, après le départ de Harper, ne sera dévoilé que quatre années plus tard.
Il faut dire que le titre de cette première pièce solo laisse clairement supposer les conditions qui ont bénéficié à sa réalisation. Passé le morceau d’ouverture "Nights Introlude", dans une version légèrement plus habillée de la première épreuve, le break syncopé "Dreddoverboard" qui n’est pas sans rappeler les tracks acides des débuts, installe une sorte d’apesanteur sur fond d’instrus hip-hop. "Pipes Honour" avec son gimmick de guitare funk posé sur une rythmique hip-hop enlevée, offre un long développement qui semble se répéter à l’infini. Si une grande partie des morceaux se réduit à deux ou trois motifs musicaux assez simples, ils distillent un groove épuré mais toujours présent comme sur "Stars" et ses quelques notes de claviers ou sur "Groove St." et ses samples de bâillements satisfaits.
C’est dans une sorte d’esthétique de carnet de voyage qu’Evelyn s’inspire des classiques de Motown comme sur "Bless My Soul" constitué à partir du titre "Just My Soul Responding" de Smokey Robinson ou du mythique label hip-hop Sugar Hill Records avec "Cruise (Don't Stop)" qui sample discrètement les vocaux de "We Got The Funk" de Positive Force. A des lieues encore des clichés exotiques de ses futures productions, "Mission Venice" conserve le charme d’une flânerie voluptueuse, tout comme "Rise" celui, d’un lever de soleil sur une plage abandonnée. Mais l’une des plus grande réussite de cet album reste "Gambia Via Vagator Beach" et son jam de percussion survolé d’un harmonica. Et sous les effets de l’herbe du diable, le temps se sera étiré à la manière de la petite fumée.
En bref : l’album le moins commercial du DJ britannique est aussi le plus cohérent. Destiné aux amateurs de trip-hop et de soul, il est à emporter sur une île déserte.
Nights Introlude
Gambia via Vagator Beach
Groove St.