Après le succès (et les énormes retombées) de la campagne de communication Online de l’ex candidat Barack Obama, l’approche des élections européennes (7 juin 2009) est l’occasion pour les principales forces politiques françaises de se lancer dans le social networking (réseau social en bon français). L’UMP, le PS, le MoDem et le mouvement Europe Ecologie ont donc dégainé leur plateforme afin de soutenir leurs listes. L’occasion de se mettre dans la peau d’un militant et de mesurer l’intérêt de ces « nouveaux outils »…
Les objectifs
Le nerf de la guerre d’une campagne politique est avant tout les militants : savoir les mobiliser à bon escient, en recruter de nouveaux et leur donner les outils pour qu’ils propagent les idées du parti (et son programme) aussi loin et aussi longtemps que possible. Pour le reste, il ne s’agit selon moi que d’une simple question de « visibilité » et de « messages clés ».
- Participer à la campagne en s’inscrivant sur la plateforme et en interagissant avec les autres membres
- S’informer sur les programmes du parti (ou du mouvement), sur les têtes de listes, leurs projets et leurs opinions
- Soutenir financièrement via une interface dédiée
La première étape consistera toujours à vous inscrire à l’aide votre adresse email et de quelques détails personnels (adresse email, nom et prénom voire votre ville). Inutile de s’attarder sur l’intérêt de disposer d’une belle base de données de membres, toujours moins onéreuse que l’achat d’une mailing liste et souvent plus importante que celle des cotisants. Une fois inscrit, il y a fort à parier que les premières newsletters et autres messages des équipes d’animation se multiplient…
Amis et outils 2.0
J’avoue cependant ne pas vraiment comprendre l’intérêt de proposer des groupes Facebook si ceux-ci (ou tout du moins le contenu qu’ils peuvent générer) ne sont pas directement intégrés sur la plateforme… Ce manque de cohérence peut donc conduire à gérer deux réseaux pouvant potentiiellement concurrents : d’un côté les membres Facebook ayant rejoint le groupe mais n’accédant pas au contenu de la plateforme et, de l’autre, les membres de la plateforme qui n’ont que faire du groupe Facebook… Dans le même esprit, Changer l’Europe du PS intègre l’album Flickr des têtes de listes mais ne semble pas proposer aux membres de partager leurs photos d’évènements ou de meeting…
En savoir un peu plus sur l’organisation des européennes au modem. Paris décide-t-il de tout : choix des candidats, thèmes principaux de la campagne, nuances propres à chaque grande région, financement, intendance ?
on retrouve des suggestions moins pragmatiques comme
le renouvellement générationnel en politique et dans les entreprises
ou encore
Demander à notre Président de baisser son salaire en ces temps de crise.
(il s’agit d’élections européennes, rappelons le).
On notera toutefois l’effort de synthèse de l’équipe d’animation qui, par le biais de la rubrique Synthèses des Points de vue tente de mettre en valeur les idées les plus constructives. Reste à savoir dans quelle mesure elles sont prises en compte par les têtes de listes…
Le PS et l’UMP n’aiment pas l’interaction
Pour le PS et l’UMP, la notion d’interaction est réduite à son strict minimum. Pour l’un vous n’avez accès qu’à une série de notes au format blog (affichage par ordre chronologique et possibilité de déposer un commentaire), pour l’autre seulement la possibilité de Publier votre actualité. A aucun moment il ne vous sera possible de rentrer en contact ou « débattre » avec d’autres membres/militants.
Le PS pousse l’archaïsme jusqu’à proposer dans sa rubrique Je rejoins les équipes un simple annuaire des groupes locaux avec leurs coordonnées téléphoniques sur une carte Google Maps. N’aurait-il pas été plus simple et tellement plus intéressant de leur donner un espace d’expression dédié ?
Problème, cette débauche d’information ne fonctionne que dans un sens : le parti vous informe. A aucun moment, il n’est possible pour un membre ou un groupe (les plus populaires voire ceux sélectionnés par l’équipe d’animation de la plateforme) de figurer en page d’accueil ou de voir leur contenus diffusés à l’ensemble de la communauté (si tant est qu’elle est existe).
A la recherche du juste milieu
Au final, seules les plateformes des démocrates et d’Europe Ecologie méritent le terme de réseau social voire de réseau communautaire (notamment grâce à leurs groupes). Les démocrates portent l’interaction un cran dessus grâce à leur forum de discussion et la possibilité donnée aux membres de créer leur propre blog. Des initiatives louables certes mais qui posent deux questions :
- Dans quelle mesure les membres pourront ils s’attribuer les différents espaces qui leurs sont offerts ? En multipliant les outils, les démocrates s’expose à un risque d’indigestion de la part des membres qui pourraient bien n’utiliser qu’une infime partie des moyens d’expression qui leurs sont offerts. Pire, le manque de cohérence et de synthétisation des contenus peut donner une impression de fouillis qui ne facilite pas le partage d’idées.
- Comment sera utilisé le contenu généré par les membres et les militants ? S’exprimer est une chose mais voir ses idées et ses opinions prises en compte est indispensable pour fédérer les membres autour d’un projet commun. Il est encore trop tôt pour se prononcer mais j’ose espérer que ces deux tentatives communautaires sauront tirer à profit la production de leurs membres…
Le PS et l’UMP se contentent pour leur part d’outils de façade dont l’inscription en tant que membre n’apporte aucun bénéfice tangible. En fait, elles semblent plus s’adresser aux militants qu’aux internautes souhaitant partager sur le sujet et ne demandant qu’à être convaincus (qui à parler des indécis ?). S’inscrire sur l’une de ses deux « plateformes militantes » revient donc à communiquer son adresse email et accepter la diffusion à sens unique de l’information. Et ce n’est pas le saupoudrage d’outils à la mode et de jolies vidéos sur Dailymotion qui pourront vraiment contribuer au débat.
C’est dommage pour le PS qui, sous l’impulsion de la candidate Ségolène Royale, avait fait preuve de plus d’ouverture lors des élections présidentielles de 2007 (où est donc passée la démocratie participative ?) et malheureusement habituel pour l’UMP qui a décidément beaucoup de mal à comprendre et intégrer la philosophie des médias sociaux…