Défonce

Publié le 13 avril 2009 par Jfa

Les informations de Fr3 faisaient état, hier soir, de ces jeunes, hospitalisés après s’être shootés dans une boîte de nuit avec une variété de détergent parce que, disaient-ils, la bouteille de whisky était trop chère. Un médecin interviewé disait que ce genre de choses se produisaient de plus en plus souvent et que des conséquences graves n’étaient pas à exclure.

J’ai résisté au premier réflexe, pourtant de bon sens, qui aurait été de penser: “mais ils sont fadas ces jeunes aujourd’hui !”

Je me suis remémoré que, dans l’histoire, toutes les sociétés ont toujours marqué, hormis la période historique récente, les étapes de la vie par des rites festifs, souvent excessifs et déraisonnables, faisant toujours appel à des substances menant à des états de conscience approximatifs. J’ai connu, à Ouvéa, des jeunes se tuant le week-end à l’alcool à photocopieuse quand l’alcool buvable était indisponible du fait d’une prohibition imbécile. Dans ma jeunesse, les monomes des bacheliers (qui m’ont laissé une belle cicatrice) et, dans les villages, les tournées des conscrits s’accompagnaient de désordres et transgressions divers et d’une imbibation certaine.

Alors, certes, ce n’était pas très malin, ni très intelligent, cela dégénérait même quelquefois. Cela ne s’inscrivait pas dans une rationalité propre à une société policée, mais cela constituait les rites de passages régulant une vie sociale encore pleine de mystères, qui ne sera jamais transparente, jouant avec ses excès pour enraciner ses règles.

La démographie actuelle donne aux vieux un poids de plus en plus important, y compris électoralement, comme on l’a vu avec la dernière élection présidentielle et il semble que ces vieux aient oublié qu’ils avaient été jeunes. Nous instaurons une société hygiéniste stigmatisant les incivilités, refusant les excès, adepte du mesuré, voire du mesquin, et du calme, assimilant à une violence insupportable le moindre chahut. J’ai l’impression de vivre dans une société d’aides-comptables où d’apprentis-notaires dans laquelle la moindre conduite à risques, le moindre écart à la règle sont dénoncés, où la norme, une conformité grise devient la règle, oubliant que la jeunesse à besoin d’espace à excès pour s’intégrer paisiblement dans le monde adulte. Les seuls écarts tolérés sont ceuxqui font tourner le commerce: ceux des fringues et des ornements de frime divers, des coiffures et des goûts musicaux.

Le tabac, l’alcool, le cannabis constituent des passages, à mon avis, nécessaires pour accompagner ces excès, et s’ils sont interdits, de dangereux produits de substitution seront utilisés ou des conduites à risques extrêmes seront significativement mises en oeuvre. Plus généralement, nos sociétés inventent tous les jours de nouveaux interdits sans que, on le constate tous les jours, les civilités et le civisme s’améliorent pour autant. Trop d’interdits tuent l’interdit et induisent des excès pires que ceux qu’il voulaient combattre.

On argue du risque de dépendance pour interdire ces substances alors que le passage à l’alcoolisme chronique ou aux drogues dures ne concernera qu’une minorité (moins de 10% selon les spécialistes) qui, de toutes manières, auraient trouvé d’autres substances ou d’autres comportements pour exprimer leurs fragilités et des tendances suicidaires.

Les jeunes portent le changement dont nous avons tous et toujours besoin depuis que nos sociétés sont devenues “chaudes” selon la terminologie de C. Levy-Strauss. L’avenir leur appartient, leurs insolences et leurs excès sont nécessaires pour, symboliquement, “tuer les pères”, et de pesantes hiérarchies en place, même si, l’espace d’une vie, cette insolence se transforme hélas  quelquefois en pires conformismes, à la manière des bourgeois que chantait J. Brel.

- “La reprise aux Etats Unis…”. Blog de P. Jorion.

- “L’autisme, énigme pour la science et cible idéale pour la pseudoscience”. Observatoire zététique.

- Victoire pour le Planning familial.

- Tour de blogs. Du bleu dans mes nuages.

- Hygiène de la tête: Charlatans.info.