Les seuls arguments de la mondialisation et de la sauvegarde de l'outil de travail permettaient de voir les salariés désignés quitter l'entreprise sans jamais renâcler. Belle époque des actionnaires "seuls maîtres à bord" et des salariés "variables d'ajustement" des rendements à deux chiffres.
Seulement le jeu a pris fin et le principe de l'addition présentée exclusivement aux salariés (qui devraient une fois de plus comprendre qu'ils doivent assumer seuls la profonde crise économique et sociale) ne fonctionne plus !!!
Bien loin des propos Sarko/guaino/soubiziens sur la répartition par 1/3 des résultats des entreprises, qui a immédiatement séduit le MEDEF : "Interrogée sur l’idée d’une répartition des profits entre les salariés, les actionnaires et les investissements, Laurence Parisot se dit « favorable à un débat sur le sujet. Mais penchons nous sérieusement sur la question » car « la répartition de la richesse dans l’entreprise relève d’une formule un peu plus compliquée qu’une recette de trois tiers et de quatre quarts ! » Face à l’urgence de la situation, l’Etat doit agir, certes. Mais il doit s’arrêter à la frontière au-delà de laquelle la créativité de l’entrepreneur meurt" - Source MEDEF 67 et d'ajouter au sujet des mutations indispensables de nos économies, avec l'humour que l'on connaît : "Regardez comme il est devenu difficile de rouler en 4x4 ! " ce qui est assez amusant pour quelqu'un qui roule en Porshe et Maseratti !!!
Christine Lagarde n'est pas en reste en déclarant : "Il y a des centaines de milliers de chefs d’entreprise qui se lèvent tous les matins en pensant à leurs salariés, aux innovations qu’il faut trouver. C’est le cas de l’immense majorité des chefs d’entreprise, pour qui j’ai du respect et de l’admiration" Elle aurait pu ajouter que des millions de salariés de lèvent eux aussi tous les matins pour développer les innovations de leurs entreprises. Mais dans leur cas, pas de marque d'admiration ...
Contrairement à ce qu'on disait en 68, le slogan : " Le patron a besoin de toi, tu n'as pas besoin de lui" est devenu : "Le patron n'a pas besoin de toi, tu as besoin de lui" . Et pour cause, l'emploi est partit sans que les responsables de la France n'essayent de mettre en place la moindre politique industrielle.
Les seniors qu'on essaye, contre vent et marrée de pousser jusqu'à 65 ans seront sans nul doute ravis d'apprendre que : "Crise et envolée du chômage obligent, la mesure phare du plan pour l’emploi des salariés âgés n’entrera sans doute pas en vigueur. Promulguée en décembre dernier, la loi de financement de la Sécurité sociale prévoyait des pénalistes substantielles – une cotisation de 1 % de la masse salariale – pour les sociétés qui ne trouveraient pas un accord sur l’emploi des salariés âgés d’ici au 1er janvier 2010. Le gouvernement aurait renoncé à publier les décrets nécessaires pour leur application. L’exécutif estime en effet difficile de contraindre les entreprises à embaucher des salariés âgés quand nombre d’entre elles sont en train de réduire leurs effectifs. "Le MEDEF, qui s’était opposé aux sanctions envisagées, a tout lieu d’être rassuré" Source MEDEF 67
Alors, lorsqu'on est salarié et qu'on sait que la perte de son emploi va remettre en cause les remboursements de l'habitation principale, que la formation ne servira à rien puisque les besoins de l'économie française en termes de salariés sont de moins en moins en moins importants, que les élus, nationaux comme locaux ne peuvent rien, qu'en peu de temps, les minima sociaux seront la seule réalité et que, quoi qu'il arrive ses enfants auront la précarité pour avenir, baisser les yeux et se taire n'est plus de mise !!! Et tant pis si le patron ou le cadre dirigeant découvre pour quelques heures le "bossnapping"
Joli mot que le "bossnapping". C'est une adaptation linguistique ou plus simplement un usage du politiquement correct pour expliquer la geste ultime de la colère de ceux qu'on congédie. Surfant sur cette tendance, Xavier Tedeschi, qui dirige Horémis, un cabinet de ressources humaines, propose aux victimes du "bossnapping", la version patronale du kidnapping, un kit de survie. Contenant un téléphone portable dont le patron aura au préalable enregistré les numéros indispensables (pompiers, Samu, famille, banquiers, psy) et, bien sûr, une chemise, un slip et une veste de rechange. Il n'y a rien qui froisse davantage un costume, même siglé Armani, qu'une station assise prolongée - Source Le JDD
Et le kit de survie devrait avoir de plus en plus de succès lorsqu'on apprend que : "Après avoir été séquestrés une journée dans leur bureau, quatre cadres de l'usine Scapa de Bellegarde-sur-Valserine (Ain), se sont résolus à doubler les primes de départ pour licenciement de cette entreprise. Peut-être auraient-elles quadruplé si les otages avaient passé deux fois plus de temps en détention - Source Le Monde
Nous serions tentés de dire que le MEDEF aurait pu ajouter à son code éthique des clauses de négociations favorables aux salariés licenciés, ce qui aurait peut être éviter ce genre d'aventures. Mais en France, comme partout dans le monde d'ailleurs, il n'existe aucun acquis qu'un n'ait été obtenu par la lutte des salariés et parfois aux marges de la légalité.
Dans ce contexte, on a pu noter très récemment les déclarations d'un patron français de PME, Pierre Gattaz, Président du Directoire du groupe Radiall.
En marge de la publication des résultats 2008 du groupe Radiall, Pierre Gattaz a condamné fermement, mardi dernier sur Europe 1, les prises d'otages des patrons d'entreprises et l'utilisation de la contrainte afin de les astreindre à infléchir leurs décisions. Certes, le patron de Radiall comprend la crainte du lendemain, mais condamne fermement ces agissements...
"Je pense qu'on a un problème.... On a peur du lendemain... On a peur d'être licencié et de ne pas trouver du travail facilement. Or on ne peut plus avoir un emploi à vie ! En France, par rapport à la mondialisation, les crises qui reviennent et qui repartent, on doit habituer les salariés, les former pour qu'ils soient employables le mieux possible (...) et éventuellement en faire partir quelques uns tout en sachant qu'ils ne vont pas rester 3 ans au chômage ! Cela permettrait d'éviter des situations de panique et de stress que l'on comprend... D'ici à aller séquestrer des cadres et les patrons, je ne suis pas du tout d'accord ! A mon avis, le patron a tout fait pour essayer de sauver sa boîte, son usine... même quand il appartient à un groupe international ! Les dirigeants d'entreprises et des filiales d'entreprises françaises se battent comme des fous pour garder l'emploi. Je pense que là on tombe dans une extrémité qu'il ne faut pas passer, sinon c'est la porte ouverte à n'importe quoi ! Etre anxieux, bien sûr ! Bien évidemment ! Aller jusqu'à séquestrer non !" a plaidé Pierre Gattaz. - Source Challenge
C'est tout oui ? Nous aimerions rappeler à Monsieur Gattaz fils que son père lorsqu'il dirigeait le CNPF (ancêtre du MEDEF) était un adepte de l'allègement des procédures de licenciements qui devaient selon lui permettre aux entreprises d'embaucher massivement !!! Le ton est plus ferme que le père et surtout plus cynique : " Or on ne peut plus avoir un emploi à vie ! En France, par rapport à la mondialisation, les crises qui reviennent et qui repartent, on doit habituer les salariés, les former pour qu'ils soient employables le mieux possible (...) et éventuellement en faire partir quelques uns tout en sachant qu'ils ne vont pas rester 3 ans au chômage !"
Mais Monsieur Gattaz, les salariés n'ont aucune illusion sur leur durée de vie dans les entreprises !!! Par contre, il trouvent un peu "fort de café" de vous entendre vous défausser sur les pouvoirs publics pour "recycler" les éclopés de votre système pour éventuellement les remette dans le circuit sans que vous n'ayez à assumer aucune responsabilité.
Car, aujourd'hui et de plus en plus, l'entrepreneur ne se définit plus comme une composante de la société française mais comme un acteur économique au dessus de toutes les solidarités. La vulgate libérale leur a donné un crédo : "c'est à l'état de se charger de ceux qu'on ne peut ni veut garder". Le raisonnement issu de l'expérience Danoise qui consiste à ne plus verser d'indemnités de licenciement à des salariés ayant moins de 8 ans de présence dans l'entreprise et le placer dans des programmes d'état qui sont censé le rendre à nouveau employable a beaucoup séduit y compris au Parti Socialiste. Elle a beaucoup séduit également dans les milieux patronaux mais à condition que le prix à payer pour le budget de la nation ne soit pas équivalent à celui du Danemark (environ 6% du budget national)
La seule idée actuellement en cours pour les chômeurs émane de la CFDT et porte le nom de FISO
Nicolas Sarkozy et les partenaires sociaux ont installé vendredi, dans un climat plutôt consensuel, le Fonds d'investissement social (Fiso) pour la formation et la reconversion professionnelles des salariés les plus touchés par la crise économique. Dans un premier temps, 2 milliards d'euros, pour la seule année 2009 selon l'Elysée, devraient être consacrés à ce Fonds, qui doit permettre, a déclaré le président de la République, de "mettre à profit cette période de crise et de baisse d'activité dans beaucoup d'entreprises pour former les salariés et préparer l'après-crise (...) plutôt que de les licencier".
... / ..."L'Etat a pris ses responsabilités, il attend maintenant que les partenaires sociaux prennent les leurs et mobilisent les fonds dont ils disposent dans des proportions équivalentes (...)", a fait savoir le chef de l'Etat. Le patronat et les syndicats devraient apporter "entre 400 et 500 millions d'euros", selon des sources concordantes. Il s'agira en fait de redéploiements de crédits, venant d'un fonds de la formation professionnelle et de l'assurance chômage. Les chefs des cinq centrales syndicales ont critiqué le montant de la dotation de l'Etat. François Chérèque (CFDT) militait pour un financement total "de 5 à 7 milliards d'euros". Bernard Thibault a jugé l'effort de l'Etat "très largement insuffisant".
Toutefois, selon M. Chérèque, Nicolas Sarkozy "s'engage à rajouter des moyens si le système fonctionne et qu'il est nécessaire d'en faire plus", ce qu'a confirmé l'Elysée. Parmi les projets susceptibles d'être financés par le Fiso, le président a cité la "formation professionnelle pour les salariés exposés par la crise" et une meilleure indemnisation de ce qu'il appelle "l'activité partielle" plutôt que le chômage partiel - Source AFP Google
Tout ceci est dérisoire lorsqu'on sait que :
- Continental met de son côté les bouchées doubles pour développer son site roumain de Timisoara (12 millions de pneus produits sur l’année 2008) en lieu et place de Clairoix (Oise) et d’Hanovre en Allemagne.
- Le Pôle emploi a annoncé vendredi que les intentions d’embauches des entreprises allaient chuter de près de 24 % en 2009. 16,9 % des employeurs envisagent de recruter cette année contre 23,4 % en 2008. Les postes d’ouvriers dans l’industrie manufacturière, l’automobile et le bâtiment sont les plus touchés, les intentions d’embauche y ont baissé de moitié. Les offres pour les métiers de la vente ou du tourisme chutent de 13 % - Source France Soir
- Premier à bénéficier du Fonds de modernisation des équipementiers automobiles (FMEA), l'équipementier automobile français Trèves supprimerait au moins 700 emplois et fermerait trois usines en France
- Le tribunal de commerce de Niort se penchera sur la situation financière de l'équipementier automobile Heuliez (1.000 salariés), menacé de liquidation judiciaire.
- L'usine Sony de Pontonx-sur-l'Adour (Landes), qui compte 311 salariés, fermera définitivement ses portes le 17 avril.
- Chez Caterpillar, à Grenoble, les salariés ont obtenu une diminution du nombre de postes supprimés (de 733 à 600, dont 400 licenciements secs) et une augmentation - de 48,5 à 50 millions d'euros - de l'enveloppe globale du plan social. En échange, la direction a exigé l'aménagement du temps de travail et une convention de chômage partiel garanti sur quatre ans.
- Arcelor Mittal a annoncé, mercredi, l'arrêt de la production sur son site de Florange, en Moselle. Les hauts fourneaux resteront éteints jusqu'en septembre, d'après la CGT. La faute à la crise, au ralentissement de l'industrie automobile et aux difficultés du BTP... Pour les 1000 employés de l'aciérie, c'est le chômage technique en perspective. Alors que l'usine de Gandrange fermait définitivement ses portes mardi dernier -malgré les promesses du chef de l'Etat qui assurait, en février 2008, qu'il ne "laisserait pas tomber" les salariés- les métallos de Florange, dont certains viennent d'ailleurs de Gandrange, s'inquiètent sérieusement. Que vont-ils devenir pendant l'arrêt de l'aciérie? Certes, la direction leur a assuré que cet arrêt serait "temporaire"
Alors, à quoi va t-il servir ce Fonds d'investissement social puisqu'aucun secteur n'est épargné ? Où va t-on trouver des entreprises en recherche de salariés même formés ?
C'est pourquoi, quitte à plonger dans l'illégalité de la prise d'otage, les salariés se disent qu'il vaut mieux prendre un peu plus d'argent et improviser, si c'est possible, dans le futur. Le malaise qui en ressort est clairement montré par deux sondages récents :
les Français semblent, eux, comprendre, voire approuver ces actions. Deux sondages ont démontré cette bienveillance. Une étude CSA pour Aujourd'hui-Le Parisien (réalisée les 1er et 2 avril sur un échantillon de 1 012 personnes) montre que 45 % des Français trouvent cette méthode de contestation "acceptable".
Un autre sondage, effectué par l'IFOP pour Paris Match (les 2 et 3 avril auprès de 1 010 personnes), révèle que 30 % des Français approuvent les séquestrations de dirigeants et que 63 % disent les comprendre. "
La sympathie à l'égard des grèves et des manifestations semble désormais s'étendre aux actions plus radicales. Les révélations sur les rémunérations de certains dirigeants, les annonces successives des plans de licenciement dans des entreprises qui dégagent des bénéfices, les dividendes versés aux actionnaires dans un contexte de récession générale, ont provoqué un sentiment d'indignation largement partagé.
C'est dans des sites menacés de fermeture ou par un plan de licenciement sévère, et dans lesquels le dialogue social est dans l'impasse, que les salariés décident de retenir leur patron ou leurs cadres. "Ces salariés veulent exprimer une colère, une indignation, d'autant plus grande qu'ils ont l'impression d'être dans une situation économique qui dure et des négociations bloquées, remarque Isabelle Sommier, directrice du Centre de recherches politiques de la Sorbonne. Retenir son patron apparaît alors comme un sursaut de dignité pour attirer l'attention sur leur sort injuste." "Ce ne sont pas des actions préparées, mais un moyen de pression supplémentaire, l'arme ultime de la négociation", souligne de son côté Guy Groux, chercheur au Centre d'étude de la vie politique française. - Source Le Monde
En attendant, jeudi à Paris, les valeurs financières profitaient de l'effet Wells Fargo. Axa a grimpé de 7,11 %, Crédit agricole de 3,81 % et BNP Paribas de 2,78 %. À noter également la belle performance d'ArcelorMittal. Le titre a pris la tête du CAC 40 avec un gain de 8,91 %. Les investisseurs semblent apprécier la réactivité du groupe face à la baisse de la demande d'acier.
La refondation d'un capitalisme vertueux qui placerait l'individu au centre du système attendra encore un peu semble t-il. Nous ne sommes pas persuadés que ceux qui le subissent écoutent encore longtemps les contes et légendes qu'on entend leur faire prendre pour argent comptant.
A moins que la fabrication de Kits se survie ne relance ... l'emploi ?
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