Alors, Perret, coupable ? L’article du Figaro (resucée de celui du Nouvel Obs du 29 janvier 2009) le flingue en cinq actes, à la façon d’une médiocre pièce de boulevard qui aurait donné l’occasion à Léautaud, alias Boissard, de délivrer une magistrale digression après la fustigation de son auteur en deux phrases aux vifs mouvements. On sent derrière cette agitation la volonté d’un infect petit univers de ne surtout pas laisser à ce chanteur populaire la liberté de se revendiquer une filiation intellectuelle avec leur Léautaud.
Alors poussons au bout pour révéler la mesquinerie de ce milieu qui aurait fait s’indigner le pamphlétaire – encore un vocable que les exégètes consacrés ne vont sans doute pas adouber. Se prépare un documentaire sur le bougon de Fontenay : là où un Pierre Perret aurait apporté sa notoriété, son allant et sa joyeuse vivacité, une cabale s’est érigée pour empêcher qu’il soit de la partie. Médiocre chantage à la clef…
Comme il pourrait être dans la censure, jamais dénoncée, pratiquée par feue Marie Dormoy, l’exécutrice testamentaire de Léautaud qui a surtout exécuté l’intégrité du Journal littéraire en s’érigeant censeur officiel. N’est-ce pas là qu’est l’injure véritable à l’écrivain qui n’admettait aucun retrait de ses chroniques, préférant mettre un terme à la collaboration du moment. Dormoy, elle, a préféré préserver ses relations avec quelques influents du milieu littéraire, et surtout ne pas se les mettre à dos, en retirant de la publication du Journal les piques incendiaires. N’est-ce pas cela qui doit révolter : cette complaisance cultivée avec un cercle relationnel tout en se revendiquant fidèle à l’écrivain sans concession ? Elle a donc appliqué un principe indigne : laisser la liberté aux écrits de Léautaud jusqu’à la limite de ses propres intérêts. Là, il y a de quoi vomir !
Au regard de ces comportements, le pétard mouillé du Nouvel Obs repris par Le Figaro semble dérisoire : un écart avec la vérité, Pierre Perret l’a peut-être pratiqué, mais ce n’est en aucun cas une insulte à ce qui fondait l’existence et les pensées de Paul Léautaud. Alors, qu’Edith Silve et la SPA laissent publier l’intégralité de ce qu’elles retiennent, et nous pourrons alors évoquer sereinement le cas Perret, quitte à lui tirer affectivement le lobe d’une oreille…