Photo : (Python du Niger)
Comme tous les autres peuples du monde, les peuls aussi ont leur propre conception de la création, qui est naturellement centrée sur le bovidé. Un de leurs mythes qui traite de l’apparition du bovidé sur terre est celui de Caamaaba, plus connu par les pasteurs de l’ouest que de leurs frères de l’est. En voilà une des versions du mythe.
Qui est Caamaaba ?
Caamaaba ou Caanaaba est d’après les peuls pasteurs du Jeeri le propriétaire de tous les bovidés sur terre. C’est un énorme python sorti de l’eau avec les 22 premiers bovidés. Il fut adopté par la famille d’Ilo Yaladi à qui il confia son troupeau qui, en retour, le nourrissait de lait frais. Il accepta de rester avec la famille de Ilo mais à condition qu’il ne croisât jamais le regard d’une femme en dehors de la mère de Ilo.
C’est ainsi que tous les jours, Ilo allait en brousse faire paitre les bovidés et le soir, après la traite, il servait à Caamaaba sa calebasse de « birdam nguldam », lait frais bien chaud. Et les choses restèrent comme ça pendant des années et les bovidés se multiplièrent pour devenir un important troupeau.
Arrivé à un certain âge, Ilo décida de prendre femme et en informa Caamaaba, qui lui donna son accord tout en lui rappelant l’interdit. Ilo aménagea une case pour Caamaaba à l’écart de la concession familiale et interdit à sa femme d’y pénétrer quoi qu’il arrivât et que leur bonheur en dépendait. La femme de Ilo respecta l’interdit et ne chercha pas découvrir le secret que lui cachait son époux.
Un jour, sentant le besoin de se faire des tresses, la femme de Ilo alla demander les services d’une femme Jawando qui habitait dans l’un des villages environnants. Celle-ci vint chez Ilo et y passa la journée jusqu’au soir. Ilo rentra de la brousse avec le troupeau, fit la traite et comme toujours, il ramena une calebasse bien pleine de lait frais à Caamaaba. La femme Jawando observait tout le manège de Ilo et le lendemain, elle demanda à la femme de Ilo ce qui se cachait dans l’autre case et pourquoi Ilo y ramenait tout ce lait frais. La femme de Ilo lui répondit qu’elle ne savait pas qui c’était et qu’il avait promis à son mari de ne jamais chercher à savoir car leur bonheur en dépendait. La Jawando la traita de naïve car selon elle, Ilo avait une maitresse et la cachait dans l’autre case pour que sa femme ne la vît pas.
Piquée dans son orgueil, la femme de Ilo décida d’aller voir dans la case interdite et en y pénétrant, elle vit Caamaaba enroulé autour de la calebasse de lait. Quand leurs yeux firent quatre « gité mabbé mbadi nay », Caamaaba se redressa de toute sa longueur, se gonfla jusqu’à toucher le haut de la case et s’élança dehors en se dirigeant vers la brousse sous les regards ahuris de la femme de Ilo et de la Jawando.
Au même moment, Ilo sentit que quelque chose était arrivé à Caamaaba car tous les bœufs beuglaient et s’agitaient frénétiquement dans tous les sens sans que Ilo pût les retenir. Et tout d’un coup, les bœufs se ruèrent tous en direction du village et tombèrent sur Caamaaba qui venait vers eux. Ils prirent tous le chemin qui menait vers le fleuve, talonnés par Ilo qui tentait en vain d’en retenir quelques uns. Après moult tentatives infructueuses, Caamaaba eut pitié de Ilo et lui dit de se servir de son bâton de Nelbi avec lequel il devait toucher les cornes des bovidés, ce qui les retenait sur place. C’est ainsi que Ilo en put sauver quelques bœufs mais le reste du troupeau s’enfoncèrent dans le fleuve avec Caamaaba.
Une des leçons de ce mythe est que la curiosité mal saine est un vilain défaut.