Ponyo sur la falaise

Par Rob Gordon
Comme Pixar, Ghibli est un studio d'animation dont il est impossible de dire du mal sous peine de s'attirer les foudres de hordes de fans assoiffés de jolies petites histoires et de jolis petits dessins bien coloriés. On ne présente plus Hayao Miyazaki, vache sacrée parmi les vaches sacrées, dont Ponyo sur la falaise est le dernier né. Après une série de prétendus chefs d'oeuvre (des aventures sympatoches et gentiment poétiques, tout au plus), le cinéaste japonais semble boucler la boucle avec ce film étonnamment modeste qui lui permet, semble-t-il, de retomber en enfance. Ponyo est peut-être son oeuvre la plus simple, sans doute aussi la plus sincère, débarrassé de l'esthétisme précieux et du blabla écolo (façon Yann Arthus-Bertrand) qui constiuent habituellement sa marque de fabrique.
Pour schématiser, Ponyo sur la falaise retrace l'étrange parcours d'une poissonne rouge (avec une tronche un peu humaine tout de même) qui se lie d'amitié avec un jeune garçon et se meut soudainement en petite fille après l'avoir pompé jusqu'au sang. Une sorte de Petite sirène version platonique (?), en somme, pour un résultat moins tarte que chez Disney, car se privant volontairement de la traditionnelle brochette de sidekicks rigolos. Ponyo réjouit par son minimalisme, se focalisant le plus souvent sur la splendide relation qui unit Ponyo et Sosuke. Parfaitement soulignée par la musique de Joe Hisashi (excellent compositeur dont c'est peut-être le travail le plus abouti), cette idylle risque de faire chavirer le coeur de tout un chacun, confirmant le fait que les plus belles histoires d'amour sont souvent les plus simples.
Moins sombre qu'à l'accoutumée, même dans ses aspects les plus dramatiques, Ponyo rejoint Mon voisin totoro au rang des films de Miyazaki destinés à absolument tous les publics. Les plus insensibles succomberont comme tout le monde au charme de Ponyo, la petite fille la plus mignonne du monde, dont chaque assoupissement est un moment de grâce. La beauté sans détour de cette petite héroïne parvient à faire oublier la laideur cosmique de certains passages, les couleurs façon gerbe et finalement la relative banalité du propos. Tout magicien soit-il, Miyazaki se fait vieux, et semble déconnecté du monde contemporain, de ses attentes et de ses émerveillements. Si son cinéma bénéficie d'une totale absence de calcul, il possède également quelque chose de passablement démodé, qui continuera néanmoins de charmer les plus bassement nostalgiques d'entre nous (et ils sont nombreux).
7/10