Avec la mort de Jésus, la Parole de Dieu est à sa fin. L'Église a veillé silencieusement au tombeau, dans la fatigue de Marie transpercée par tous les glaives de la souffrance ; toute foi vivante, toute espérance vivante, a été déposée auprès de Dieu. Aucun alléluia prématuré ne retentit. L'Église qui veille et qui prie le temps de se remémorer le long chemin que Dieu, depuis la création du monde, a parcouru avec son peuple à travers toutes les étapes de l'histoire du salut ; sept évènements se déroulent devant son regard spirituel ; elle voit le salut même dans les situations les plus difficiles, comme dans le sacrifice d'Abraham, comme dans le passage étroit à travers la mer partagée, comme dans l'appel à revenir de l'exil, et l'Église comprend que c'étaient purement des évènements de la grâce. Même le sacrifice d'Isaac était la confirmation définitive de l'obéissance d'Abraham et de la promesse de Dieu, même l'ensevelissement apparent dans la mer était le salut d'Israël et la ruine des ennemis, même l'exil était une longue purification et un retour à Dieu.
Aussi l'Église, dans l'épître, reconnaît que sa propre mort dans le baptême est une mort avec Jésus, pour le salut définitif en lui : pour la résurrection en lui vers Dieu, comme nouvelle vie sans péché ni mort. Ce n'est pas une simple cérémonie qui réalise ce miracle, niais bien un véritable « être crucifié avec le Christ » du vieil homme pécheur d'où seulement une mort et un ensevelissement avec le Christ peuvent se produire. C'est là essentiellement un don fait par Dieu à celui qui reçoit le baptême, et une exigence de chaque jour qui lui est adressée de le vérifier à travers son existence. Les deux choses sont inséparables pour que le chrétien laisse pénétrer sa vie du don qui lui est fait dans le Christ : ce qu'il est, il doit le devenir ; ce qu'il a, il doit le développer. Ainsi le tournant du Samedi Saint à Pâques ne peut être que les deux choses en une : joie du don suprême reçu et décision de tenir sa promesse de baptême. C'est avec raison qu'elle est renouvelée dans sa célébration de la nuit pascale.
Les femmes qui (d'après Matthieu) s'étaient tenues comme représentantes de l'Église aimante au pied de la croix, continuent à jouer ce rôle au matin de Pâques. Il est au fond étonnant qu'elles ne se laissent pas décourager par les terribles évènements, et d'abord qu'elles ne pensent pas à l'impossibilité de leur entreprise : « Qui nous roulera la pierre ? », mais qu'elles poursuivent inébranlablement leur pieux projet d'embaumer le corps de Jésus pour le protéger pour ainsi dire, autant que c'était humainement possible, de la décomposition. Cela a quelque chose d'une naïve piété populaire qui, avec son instinct sûr, poursuit son chemin par-dessus tous les obstacles extérieurs et toutes les objections spirituelles. Et leur piété est récompensée par Dieu, car lui-même enlève les obstacles - la pierre est déjà écartée - et lorsque les femmes, à la fin de leur pèlerinage, sans façons et sans hésitations, pénètrent dans le sanctuaire du tombeau ouvert, l'explication qui les pacifiera devant le stupéfiant évènement leur est ainsi déjà préparée. Leur effroi est compréhensible, il est vraiment traditionnel dans la Sainte Écriture, toutes les fois que l'homme rencontre une manifestation du divin.
Le discours de l'ange est d'une beauté supraterrestre, on ne pourrait absolument pas parler d'une manière plus aimable et en même temps plus pertinente.
- La parole d'apaisement au début permet aux femmes de saisir ce qui est dit.
- Ensuite on insiste : l'ange sait ce qu'elles cherchent : cet homme déterminé, « Jésus de Nazareth », qui est mort avant-hier sur la croix.
- Vient alors l'affirmation simple, comme si cela allait de soi : « Il est ressuscité il n'est pas ici », comme si l'on disait à un visiteur : la personne que vous voudriez voir
est sortie. Il y a quelque chose de divin dans cette assurance paisible : c'est dans la logique de la croix que la résurrection la suive. « Voici le lieu... », convainquez-vous
vous-mêmes que celui que vous cherchez n'est plus là.
- Et finalement l'ordre d'annoncer la nouvelle aux disciples, et pour preuve que l'information est exacte, le recours à la parole même de Jésus : « Là vous le verrez, comme il vous l'a
dit ». « En Galilée », là où vous êtes chez vous et où pour vous tout a commencé. C'est son pays, mais avant tout le vôtre, et vous le trouverez là où votre vie quotidienne se
déroule.
Pendant que l'Église veille, le Seigneur précède.