ÉgIise des hommes, Église des femmes. Dans l'évangile, les deux plus importants disciples, Pierre, le ministère ecclésial, et Jean, l'amour ecclésial, sont troublés par Marie de Magdala, qui, la première, a vu le tombeau ouvert. Les deux disciples courent « ensemble », est-il dit, et pourtant pas ensemble, parce que l'amour est plus rapide, plus insouciant, que le ministère, qui doit se soucier de beaucoup de choses. Mais l'amour cède le pas pour l'examen au ministère, c'est Pierre d'abord qui voit le suaire plié et juge qu'aucun vol ne peut avoir été commis ici. Cela suffit pour céder la place à l'amour qui « voit et croit » ; qui croit non pas a proprement parler à la résurrection, mais à la vérité de tout ce qui s'est passé avec Jésus. C'est jusque-là que parviennent les deux représentants symboliques de l'Église : ce sont, des choses vraies qui sont arrivées, la foi en Jésus est justifiée, malgré tout ce qui demeure impénétrable dans la situation.
Cette foi devient vraie foi en la résurrection d'abord seulement chez la femme qui ne « s'en retourne pas » chez elle, mais reste constamment à l'endroit où le mort a disparu et le cherche. La place vide devient lumineuse, délimitée par les deux anges qui se tiennent à la tête et aux pieds. Mais le vide lumineux ne suffit pas à l'amour de l'Église (ici la femme pardonnée tient sans doute la place de la femme tout court, celle de Marie, la Mère) : elle doit avoir l'unique aimé. Elle le reçoit dans l'appel de Jésus : Marie ! Par là tout est comblé, le cadavre cherché est l'Éternel Vivant. Mais il ne faut pas le saisir, car il est en route vers le Père : la terre ne doit pas le retenir, mais dire oui, comme jadis à son incarnation, maintenant à son retour au Père. Ce qui devient la chance de l'envoi aux frères : donner est plus béatifique que garder pour soi.
L'Église est au plus profond femme ; comme femme elle embrasse aussi bien le ministère que l'amour ecclésial qui sont inséparables. « La femme entourera l'homme » (Jr 31, 21-22) :
« Plante des signaux sur ton sentier, balise ton parcours, prends garde à la route, au chemin où tu vas : reviens vierge Israël, reviens ici vers tes villes ! Jusques à quand vas-tu rester bêtement à l'écart, fille apostate ? Le SEIGNEUR crée du nouveau sur la terre : la femme fait la cour à l'homme. » - Note TOB : « Litt. La femme entoure l'homme. L'expression, déconcertante, signifie peut-être que désormais ce sera la femme (= le peuple) qui cherchera à gagner les faveurs de l'homme (= Dieu), alors que présentement c'est le Seigneur qui fait la cour à son peuple. »).
Le ministère proclame. Dans la première lecture, Pierre prêche sur toute l'activité de Jésus ; il ne peut le faire de cette manière supérieure et victorieuse qu'à partir de l'évènement de la résurrection. Celle-ci jette la lumière décisive tout sur tout ce qui a précédé : par le baptême, Jésus, doté du Saint Esprit et de la force de Dieu, est devenu le bienfaiteur et le sauveur de tous, la passion apparaît presque comme un interlude, pour ce qui est plus important : le témoignage à partir de la résurrection. Car le témoignage doit exister, puisque l'apparition du Glorifié ne devait pas être un spectacle pour « tout le peuple », mais une charge confiée aux « témoins choisis d'avance » pour « annoncer au peuple » l'évènement, qui débouche sur un double résultat :
- pour les croyants, le Seigneur est « le pardon des péchés »,
- pour tous, il sera « le Juge établi par Dieu ».
La prédication du pape est la substance de la Bonne Nouvelle et la synthèse de la doctrine officielle.
« Chers frères et sœurs, pour une célébration fructueuse de Pâques, l'Eglise demande aux fidèles de s'approcher au cours de ces journées du sacrement de la Pénitence, qui est comme une espèce de mort et de résurrection pour chacun de nous. Dans l'antique communauté chrétienne, le Jeudi Saint se déroulait le rite de la Réconciliation des Pénitents présidé par l'évêque. Les conditions historiques ont certainement changé, mais se préparer à Pâques avec une bonne confession reste une pratique qu'il faut pleinement valoriser parce qu'elle nous offre la possibilité de recommencer à nouveau notre vie et de connaître véritablement un nouveau début dans la joie du Ressuscité et dans la communion du pardon qu'il nous a donné. Conscients d'être des pécheurs, mais confiants dans la miséricorde divine, laissons-nous réconcilier par le Christ pour goûter plus intensément la joie qu'Il nous communique avec sa résurrection. Le pardon, qui nous est donné par le Christ dans le sacrement de la Pénitence, est une source de paix intérieure et extérieure et fait de nous des apôtres de paix dans un monde où continuent malheureusement les divisions, les souffrances et les drames de l'injustice, de la haine et de la violence, de l'incapacité de se réconcilier pour recommencer de nouveau avec un pardon sincère. Nous savons cependant que le mal n'a pas le dernier mot, car le vainqueur est le Christ crucifié et ressuscité et son triomphe se manifeste avec la force de l'amour miséricordieux. Sa résurrection nous donne cette certitude : malgré toute l'obscurité que l'on trouve dans le monde, le mal n'a pas le dernier mot. Soutenus par cette certitude, nous pourrons nous engager avec plus de courage et d'enthousiasme afin que naisse un monde plus juste. »
L'apôtre explique. Dans la deuxième lecture, Paul tire la conclusion pour la vie chrétienne. La mort et la résurrection du Christ, qui sont toutes deux arrivées pour nous, nous ont réellement fait entrer en lui : « Vous êtes morts », « vous êtes ressuscités avec le Christ ». Puisque tout subsiste en lui (Col 1, 17), tout accomplit son mouvement en y participant.
Mais de même que l'être du Christ était déterminé par son obéissance au Père, ainsi notre être est inséparable de notre devoir. Notre être consiste en ce que notre vie est cachée avec le Christ en Dieu, soustraite au monde, et, par conséquent, on ne peut pas la montrer ; c'est seulement quand « paraîtra le Christ, notre vie », que notre vérité cachée pourra paraître avec lui à sa lumière. Mais puisque notre être est aussi un devoir, et implique la liberté qui nous est donnée, nous avons à diriger notre effort vers le ciel ; même quand nous avons à nous acquitter d'une tâche terrestre, il ne nous est pas permis d'y rester attachés, mais nous devons tendre résolument à ce qui est, pas seulement après la mort, mais déjà maintenant, notre plus profonde vérité. Dans le don de Pâques, se trouve l'exigence de Pâques, et celle-ci également est un pur don.