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Contes de l'ordi sacré : Gudule à Sainte Marguerite 17

Publié le 08 avril 2009 par Porky

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EPISODE 17 : Où le Masque de Fer raconte sa triste histoire que le lecteur connaît déjà ce qui va permettre à l'auteur de faire une superbe ellipse du récit et où Gudule et son séide finissent en statue unanimement admirée par les visiteurs de l'île Sainte Marguerite, ce qui prouve que le mauvais goût est quelque chose d'universel.

 L'apparition du Masque de fer provoqua chez nos amis quelques remous. On se réfugia comme un seul homme derrière le caribou magique en le suppliant de renvoyer aux Enfers cette créature sortie tout droit du royaume de Satan. « Du calme, fit le caribou magique. C'est seulement le Masque de fer. Il est un peu énervé et on le comprend, avec Gudule à ses trousses. » « Vous voulez parler du vrai Masque de fer ? Celui qui a été enfermé pendant des années à Sainte Marguerite ? » demanda Myxomatose qui, comme son alter ego l'auteur, avait une certaine culture. « Evidemment, stupide animal, répondit l'intéressé, évitant ainsi au caribou magique une réponse du même style. Je suis le Comte de ***, fidèle serviteur du roi Louis XIV, amoureux de la Comtesse de **** et poursuivi depuis des siècles par l'atrocité à couettes, j'ai nommé Gudule la sorcière. » « Vous savez au moins que Louis XIV n'a plus mal aux dents depuis un bon bout de temps ? » s'enquit la Belle Monogramme que sont statut de Princesse de conte de fée poussait à accepter n'importe quel délire sans se demander si elle rêvait ou non. « Je le sais, fit majestueusement le Penseur Masqué. Je sais aussi que la Comtesse de **** n'est certainement plus aussi jolie que de mon temps. Me prendriez-vous pour un idiot, Princesse ? Pour un retardé mental qui n'a pas vu s'écouler les siècles et se mettre en place votre satanée modernité ? » « Mais vous devriez vous aussi être mort depuis belle lurette, insista Multimédia que ses crises de rationalité rendaient parfois un peu lourde. Votre présence ici n'est pas normale du tout. » Le Masque de Fer lui adressa un sourire de pitié. « Ô pauvre cerveau incapable de concevoir la toute puissance du Mal ! répliqua-t-il, un peu grandiloquent, mais c'était dans sa nature. Cette éternité que je vis, je la dois à Gudule ! Mais pourquoi cet individu masqué me regarde-t-il avec cette insistance ? continua-t-il en désignant Myxomatose du doigt. Qui est-il, d'abord ? Pourquoi m'imite-t-il ? C'est une aberration. Je suis par essence inimitable. » « On vous expliquera tout si vous, de votre côté, vous nous racontez votre histoire », dit Marsupilania. Le Masque de fer poussa un énorme soupir. « Ca va pleurer dans les chaumières, avertit-il. Vous tenez tellement à ouïr histoire aussi dramatique et aussi singulière ? » « Et comment ! affirma Marsupilania en s'asseyant commodément. Nous avons tout notre temps. » « Faux, contesta Myxomatose. Gudule doit être à nos trousses et nous devons encore nous débarrasser d'elle. » « Pas de panique, intervint le caribou magique. Maintenant que  son maître est sur Sirius, Gudule n'a pratiquement plus de pouvoirs de sorcière. » Et Gudule, toujours dissimulée derrière son rocher, piétina de rage le Servile Séide en entendant des paroles aussi désagréablement exactes.

Au terme de son récit, le Masque de Fer constata que son auditoire était effectivement en larmes. Aussi se mit-il à pleurer lui aussi et le seuil de la grotte pluricentenaire résonna pendant un bon moment de gémissements à vous fendre l'âme. Ce fut cet instant que choisit Gudule pour sortir de sa cachette, bondir sur le Masque Penseur et tenter de lui arracher sa protection de fer. Il s'ensuivit une scène fort mouvementée, à laquelle l'auteur lui-même ne comprit pas grand-chose, sinon qu'au terme de ce combat, Gudule et le Servile Séide se retrouvèrent à terre, ligotés et bâillonnés, grâce à une corde et un bout de tissu venus de dieu sait où. « Ah, quelle pitié ! gémit le Masque de fer en contemplant son irréductible ennemie, réduite à l'impuissance. Elle n'a plus ses pouvoirs et ne peut donc pas annuler le charme qui me retient prisonnier ! Je vais encore devoir exister pendant moult siècles ! Remarquez, ce n'est pas si atroce que ça, poursuivit-il, soudain songeur. J'ai pris l'habitude de penser et maintenant, je ne peux plus m'en empêcher. Et puis, honnêtement, je suis un peu accro à la bière et si la gente dame qui fume un cigare voulait bien m'en donner un, je le fumerais avec grand plaisir. » « Oh, mais c'est sans problème, s'écria Marsupilania en lui tendant sa boîte de cigarillos. Tapez, tapez dedans, j'en ai une pleine réserve. » « Ce culot ! s'indigna Myxomatose. Il faut voir le cirque qu'elle fait quand par malheur, je lui en pique un ! » Mais Marsupilania, en Vaillante héroïne qu'elle était, négligea cette mesquine remarque. « Vous devriez ôter votre masque, conseilla la Belle Monogramme. On verrait enfin votre figure, depuis le temps qu'elle intrigue les historiens ! » « Je ne peux pas, Princesse. Si je l'enlève, je me transforme dans l'instant en bouse verdâtre et centenaire. Je veux bien mourir, mais pas de cette ignoble manière. » « Tiens, songea Marsupilania, cette façon de terminer son existence me rappelle quelque chose, mais quoi !... » et elle balaya d'un geste cette inopportune réminiscence.

Pendant que nos amis discouraient sans vraiment avoir quelque chose d'intéressant à dire, le caribou magique s'était livré à quelques travaux et avait entassé moult pierres à quelques mètres de l'entrée de la grotte. A vrai dire, son tas était assez inesthétique et ne ressemblait absolument à rien. Mais c'était volontaire. Lorsqu'il jugea que le dialogue avait suffisamment tourné à vide, il intervint pour faire remarquer que les trois M devaient achever leur mission et rendre Gudule définitivement inoffensive. « Vous n'avez pas la prétention inouïe de les statufier juste devant la porte de ma grotte ? demanda le Masque de fer, fort courroucé. Il n'en est pas question. Je ne veux pas me trouver nez à nez avec eux à chaque fois que je sortirai ou rentrerai. » « Parce que vous avez l'intention de rester là ? » s'enquit Logarithme avec un charmant sourire. « Et où le Prince Charmant veut-il que j'aille ? rétorqua le Penseur Masqué. Je ne vais certainement pas quitter cette île et cette grotte où je suis à l'abri de toutes vos imbécillités modernes. Les seules choses que je reconnais positives dans votre monde sont, dans l'ordre : la bière, l'électricité, le frigidaire, l'eau courante et, très loin derrière, le micro-onde. Le reste n'est que dérisoires futilités. » Cette mise au point, faite sur le ton le plus pompeux qu'on puisse imaginer, eut un si grand effet sur nos héros que pas un ne trouva une réplique ad hoc tendant à prouver au Masque de fer qu'il exagérait un peu. D'ailleurs, le caribou magique ne leur laissa pas le temps de réfléchir. « Il a raison, décréta-t-il après une seconde de réflexion. Il faut que la statue se dresse au bord de la mer, afin d'être visible de tous et que chacun puisse réfléchir aux dangers qu'on court en se livrant à la sorcellerie. Aidez-moi à transporter les pierres sur le rivage engaletté. » « Faites, mes bons, faites, dit le Masque de Fer en tournant les talons. Appelez-moi simplement au moment de l'inauguration de la statue. » Et il rentra dans sa grotte d'un pas majestueux.

Déplacer le tas de gadins fut, on s'en doute, l'occasion pour nos amis de se disputer une fois de plus comme des chiffonniers, d'échanger des remarques désagréables et de se donner quelques gifles, tout cela sous les yeux du caribou magique qui n'arrêtait pas de les lever au ciel. Finalement, tout fut prêt et l'incantation put commencer. En un instant, Gudule et le Séide disparurent tandis que le tas de pierre prenait la forme d'une horrible composition minérale formé d'une statue à l'immonde visage en train de piétiner rageusement une autre statue dont le visage, lui, revêtait la plus idiote des expressions extatiques. Le groupe était impressionnant, et surprenant. Mais le caribou magique s'estima satisfait. Le Masque de fer aussi. Le monde était débarrassé de Gudule, la mission était remplie, chacun pouvait retourner à ses occupations.

« Ca ne va pas du tout, cette fin, murmura Myxomatose. Je m'attendais à quelque chose de plus grandiose, de plus échevelé. Je suis déçu. » « Va dire ça à ton alter ego, lapin putride, railla la Belle Monogramme. Pour ma part, je suis ravie que ce débile ne m'ait pas encore fait choir dans la boue », et à peine avait-elle prononcé cette phrase qu'elle glissa et s'étala dans la seule flaque de boue visible à cinq kilomètres à la ronde. (L'auteur : Là ! Elle m'a gonflé pendant dix-sept épisodes, celle-là, bien fait pour sa g...)

Le Prince Charmant était à la fois ravi et marri que les aventures fussent finies. Il allait retrouver son splendide château dans lequel la Princesse de conte de fée était bien entendue conviée, puisque c'était la femme de sa vie mais il avait un peu peur de s'y ennuyer. Multimédia cherchait avec ardeur dans ses poches la facture de l'écran d'ordinateur décédé et ourdissait un plan démoniaque pour faire rendre gorge au vendeur incompétent ; Myxomatose ruminait une visite surprise à son alter ego afin de lui demander pourquoi il l'avait rendu aussi ridicule pendant tous ces contes ; quant à Marsupilania, elle supputait déjà le plaisir qu'elle prendrait à surfer sur tous les nouveaux jeux vidéo qui l'attendaient. Elle se demandait même si elle n'allait pas ouvrir un blog afin de raconter ses petites histoires et ses grandes aventures.

Grâce au caribou magique, le départ de Sainte Marguerite fut fort aisé ; on retrouva Uno et Cencisse qui virent revenir la troupe sans enthousiasme excessif et chacun se retrouva à l'endroit où il devait être.

Quant à la statue de Gudule et du Servile Séide, elle est toujours sur le rivage engaletté de Sainte Marguerite. Les touristes la trouvent géniale et la photographient à qui mieux mieux. Finalement, le Masque de Fer a peut-être raison : notre époque est  pleine de gens infréquentables...

Nous voici donc au terme de Gudule à Sainte Marguerite. La sorcière est vaincue, son maître à sorceller est sur Sirius, tout est bien qui finit bien. Logiquement, la trilogie devrait s'achever là. Mais... Mais... Vu le succès rencontré par ces contes hautement moraux, l'auteur a décidé de transformer la trilogie en tétralogie.  Ce qui veut dire que dans quelques jours, nos héros vos reprendre du service. Pourquoi, puisqu'il n'y a plus de danger ? Mais parce que cet imbécile de caribou fou a plus d'un tour dans son sac... Prochainement, La vengeance du Caribou fou, sur vos écrans...


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