Je voulais écrire un billet sur la décision du président afghan d’appuyer la loi que l’on sait et qui fait polémique en ce moment. Mon camarade et allié ZI l’a fait avec plus de talent que moi, aussi je vous renvoie vers son texte, tout en finesse et en intelligence : « Just don’t mess with the narrative… ».
Je rajoute simplement que, en plus d’être moralement répugnante, cette législation est inepte sur le plan stratégique pour une autre raison, intérieure celle-ci, d’ailleurs bien connue et historiquement vérifiée : dans une guerre civile, et face à un adversaire révolutionnaire (c'est-à-dire qui prône le remplacement du pouvoir légal par un autre de nature différente en usant de la violence), adopter, même progressivement et par petites touches, le programme de l’ennemi équivaut à lui fournir, à plus ou moins long terme, la victoire sur un plateau. Bien loin de voir diminuer sa capacité d’attraction, l’idéologie révolutionnaire va au contraire pousser son avantage jusqu’à ce que le régime en place finisse par s’effondrer, sous ses propres contradictions et/ou son inutilité qu’il avoue pas à pas en faisant sien, et apparemment simplement pour conserver quelques bribes d’un pouvoir de plus en plus fantomatique, le projet de ceux qu’il prétend combattre…
Au sujet de la guerre révolutionnaire, justement, je me permets également de vous conseiller un excellent article, découvert récemment : « Guerre classique et guerre révolutionnaire : l’illusion de la différence », écrit par Eric Langlois pour la revue Stratégique. Quoiqu’il ne traite pas spécifiquement de la situation afghane, c’est une lecture instructive pour mieux appréhender la pensée du stratège révolutionnaire.
J’en reviens, pour finir, du côté de Kaboul : sans doute est-il temps de s’interroger, à voix haute et strictement du point de vue des intérêts stratégiques qui sont les nôtres tandis que nous menons cette guerre d’Afghanistan, sur l’utilité pour nous d’avoir comme allié principal un si piètre stratège. Nonobstant son éventuelle légitimité (?) démocratique intérieure, nos soldats meurent actuellement aussi pour défendre à bout de bras son pouvoir personnel dont il fait un usage fort médiocre.
Pour parler clair : il semble que Karzaï soit en train de devenir une partie du problème plus que l’espoir d’une solution.