Maurice Gouiran,
éd. Jigal, 242 p.
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Dans une petite salle de l'Etna qui sent bon la pizza et l'Estaque, Clo est attablé avec Roro et Marco. La discussion part faire un tour en Sicile où le neveu de Marco a été assassiné. 38 ans, infirmier et pas une once de lien avec la Cosa Nostra, aux dires de Marco. Voilà comment au détour d'une tournée de grappa, l'ami Clo qui connaît la Sicile comme « dégun » se retrouve missionné pour comprendre pourquoi le malheureux Salvatore s'est fait dézingué. Un sérieux pactole aura raison des hésitations bien fondées d'un Clo en panne d'euros. Et le revoilà à Palerme qu'il avait laissé en 1992 année du crime du juge Falcone et de son amourette avec Rosalia. C'est précisément cette ancienne conquête qui ne tarde pas à le mettre sur la piste...
Elle raconte, Salvatore a été assassiné dans un petit village perdu de l'île, deux jours plus tôt, c'est son ami Calogero, avec qui il avait monté un projet immobilier qui était tué à Palerme. L'enquête prend tournure au gré des hasards et des rencontres pour le moins religieuses. Entre deux évocations pittoresques de la Sicile si silencieuse, Gouiran, le fin gourmet nous fait goûter aux charmes amères de cette île pieuse et pourtant impitoyable, au cœur des venelles suspicieuses et de ses villages inquiétants. On aime le style de Gouiran, rouge sang et or, incisif, acide aussi quand il s'agit de piquer au vif, efficace en somme, se jouant des poncifs et des trajectoires toute faites. Si le registre est tragique, il est aussi ludique, le titre sonore en est la preuve. On est plongé avec Clo au coeur d'un labyrinthe en forme de pieuvre et l'on ne rêve que de l'issue. Mon dieu, comment sortir de là ? Un miracle pourrait-il faire l'affaire ? Un mot enfin sur le cadre goutu, car la Sicile est une terre de paradoxes et de contradictions solaires : un enfer sur une terre paradisiaque, une île muette dont on est si prolixe et qui forcément couve en son sein un essaim de secrets bien gardés.