Comme nos actes se rappellent toujours à nos souvenirs à point nommé, Dieguito a dû mesurer l'ironie de cette volée reçue à près de 3000m d'altitude. Quand on se prévaut de "la main de Dieu", se faire botter les fesses dans ces confins séraphiques tient presque du désaveu. D'autant que, grand amoureux de Castro et du Che, le sélectionneur argentin était venu en personne soutenir, en short et balle au pied s'il vous plaît, les pauvres Boliviens contre les idées réformistes de la FIFA. Devant le souhait des instances du football international d'interdire aux nations de l'Altiplano et de la cordillière des Andes d'organiser des matches internationaux dans l'aire des condors, Diego avait endossé sa tunique de guerillero. No pasaran et que viva la revolucion !
Maradona a toujours fait en sorte d'être du côté du faible et du pauvre, fidèle à ces élans populistes qui sont à la vie politique argentine ce que la graisse est au mexicain dans les westerns américains. Alors, même quand ses engagements lui retombent sur le nez, le filou le plus génial de l'histoire du football redresse la tête et bombe le torse. L'asphyxie d'une sélection, composée de joueurs usés jusqu'à la corde par les championnats européens, semble presque une évidence sur ces pelouses des cimes. Après le match, devant une presse fébrile, Maradona n'a pourtant pas daigné agiter cet argument - aussi recevable soit-il…- pour justifier l'effondrement de son équipe. Pas parce que ses prises de position passées l'en empêchaient. Maradona n'a jamais été à une contradiction près. Mais simplement parce que, même tombé de haut, Diego a conservé intact l'orgueil des petite frappes de bidonville, qui même blessées au plus profond d'elles-mêmes refusent toujours de verser une larme sur leur sort.