Séparation
Que l’on m’extirpe l’Or et le Clair de Lune,
Que l’on déchire mes toges d’astres –
Que l’on brise l’onyx et l’albâtre
De mon refus à m’égaler moi-même.
Seul, que fais-je sur la grande Place
Que mon orgueil a délimitée –
Statue, ascension de ce que je ne suis pas,
Profil prolixe, mais en quelle menace ?...
… Et le soleil… ah, le soleil du couchant,
Perturbation du terne et de l’Empire –
La solitude d’un ermitage
Dans l’impatience d’un retard…
Le cavalier qui s’en fut
Jamais ne revint, jamais ne donna de nouvelles –
Si belles furent les prémices,
Et puis l’anneau ne scella que le deuil…
La grande fête annoncée
Parmi les fastes et les heaumes princiers
Se déroula seulement
Parmi les glapissements et les singeries…
Soif de Rose et de bras nus
Qui expira en troubles et nausées…
– Quel gaspillage, ô mes élans,
Misère, quel épouvantail, ma croix.
Paris, juillet 1915
desquite
Dispam-me o Oiro
e o Luar,
Rasguem as minhas togas de astros –
Quebrem os ónix e alabastros
Do meu não me querer igualar.
Que faço só na
grande Praça
Que o meu orgulho rodeou –
Estátua, ascensão de que não sou,
Perfil prolixo de que ameaça ?...
… E o sol… ah, o
sol do ocaso,
Perturbação de fosco e Império –
A solidão dum ermitério
Na impaciência dum atraso…
O cavaleiro que
partiu,
Não voltou nem deu notícias –
Tão belas foram as primícias,
Depois só luto o angel cingiu…
A grande festa
anunciada
A galas e elmos principescos,
Apenas foi executada
A guinchos e esgares simiescos…
Ânsia de Rosa e
braços nus,
Findou de enleios ou de enjoos…
– Que desbaratos os meus voos ;
Ai, que espantalho a minha cruz…
•
la chute
t moi qui suis le roi de toute cette incohérence
Que j’aspire à fixer, moi-même tourbillon,
Je tournoie pour m’en aller… mais tout me pousse
En brume et somnolence.
Si par hasard en mes mains se trouvent un peu d’or,
Le voici aussitôt altéré… et je le jette au loin…
Je meurs de dédain auprès d’un trésor,
Je meurs d’excès dans le besoin.
Par découragement, je me hisse au sein de la couleur,
J’étends les bras de l’âme – et, vulnérable au moindre spasme,
Je me passe au crible de l’ombre – en néant je me condense…
Je vibre encore cependant des agonies de lumière.
Je n’ai pas pu me vaincre, mais
je peux encore m’anéantir,
– Vaincre parfois équivaut à une chute –
Et comme je suis encore lumière, dans un grand reflux,
En mes rages idéales jusqu’à la fin je m’élève :
Je regarde de là-haut la glace, à la glace je me jette…
………………………………………………………
J’ai chuté…
Et je me suis
seulement écrasé sur moi-même.
Paris, le 8 mai 1913
a queda
E eu que sou o
rei de toda esta incoerência,
Eu próprio turbilhão, anseio por fixá-la
E giro até partir... Mas tudo me resvala
Em bruma e sonolência.
Se acaso em
minhas mãos fica um pedaço de oiro,
Volve-se logo falso.., ao longe o arremesso...
Eu morro de desdém em frente dum tesoiro,
Morro à mingua, de excesso.
Alteio-me na cor
à força de quebranto,
Estendo os braços de alma- e nem um espasmo venço!...
Peneiro-me na sombra - em nada me condenso...
Agonias de luz eu vibro ainda entanto.
Não me pude
vencer, mas posso-me esmagar,
- Vencer às vezes é o mesmo que tombar -
E como inda sou luz, num grande retrocesso,
Em raivas ideais ascendo até ao fim:
Olho do alto o gelo, ao gelo me arremesso...
………………………………………………………..
Tombei…
E fico só esmagado sobre
mim !...
Mário de Sá-Carneiro, deux poèmes extraits des Poésies complètes, traduit du portugais par Dominique Touati et Michel Chandeigne et préfacé par Teresa Rota Lopes, La Différence, 1987, rééd. coll. Minos, 2007
Contribution de Maxime Durisotti
Bio-bibliographie de Mário de Sá-Carneiro
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