Les négociations ouvertes le 18 février entre Medef et syndicats à propos de l’avenir de la médecine du travail ont pris le 2 avril un tour dangereux pour la santé des salariés :
1°) le Medef n’a pas hésité à proposer que ce soient les médecins de ville qui réalisent les visites d’embauche des salariés. Autant proclamer tout de suite la mort de la médecine du travail : le médecin de ville ne connaît pas l’entreprise ni ses risques propres, « ce serait la négation même de la responsabilité du médecin du travail » (comme le dit le représentant de FO).
2°) Le Medef a finalement retiré la proposition, mais pour en faire une pire : allonger à quatre ans l’intervalle entre les visites médicales périodiques « pour les salariés qui ne sont pas exposés aux risques spécifiques ». Autant dire que la médecine de prévention est morte ! Et « les risques spécifiques », c’est une incroyable notion dans un pays où l’exposition à des produits cancérigènes est la plus sous-estimée d’Europe, et où la maladie professionnelle la plus répandue ce sont les TMS (troubles musculo-squelettiques) qui peuvent frapper tout le monde.
3°) Le Medef propose que l’agrément donné par les DRTEFP aux « services de santé au travail » (SST), censé « assurer l’égalité de traitement sur l’ensemble du territoire » soit “adapté” pour lutter contre la pénurie de médecins dans certaines zones. C’est à dire que des infirmiers pourraient faire des actes de médecins, et les visites seraient remplacées par des entretiens avec des assistants ou conseillers de santé « médico-professionnels ». Autant dire que des agréments de seconde zone pourraient permettre à des contremaîtres de remplacer des médecins !
Certes, les trois quarts des médecins du travail sont âgés de plus de 50 ans, et 1700 départs en retraite sont prévus dans les années à venir, 600 postes sont déjà vacants sur 6000 … Mais ce qu’il faut c’est prendre les mesures d’urgence pour recruter, former, investir dans cette magnifique médecine de prévention de la santé au travail, plutôt que de la laisser tomber en désuétude pour mieux la torpiller … Et plutôt que d’en rabaisser le niveau, il convient d’assurer la médecine du travail comme un véritable service public indépendant du patronat…
par Gérard Filoche
Lire : “Salariés si vous saviez…” et “ La vie, la santé, l’amour sont précaires… Pourquoi pas le travail ?”