Aujourd'hui, un article beaucoup
plus long...alors installez-vous confortablement pour réviser le programme de Terminale ^^
Je cherchais à incarner de façon plus concrète le processus de mondialisation.
J'ai trouvé dans le transport maritime et le fameux conteneur un support très intéressant (cela change des
nouvelles technologies, non ^^)
Comme d'habitude, le web regorge de richesses. J'en ai sélectionné quelques unes pour vous initier à une analyse économique du transport maritime
international
Evidemment, le sujet est très complexe, il s'agit de mettre en évidence quelques mécanismes de base (et non de prétendre à une analyse d'expert - ce que
je ne suis pas -)
Comme on approche des périodes de révisions, SOS...SES... est là pour vous rafraichir la mémoire (mais si ! Vous savez plein, plein de choses
^^).
Quelques caractéristiques économiques du secteur des transports:
- Le transport est un service de consommation intermédiaire.
En effet, le service de transport qui représente un coût sera comptabilisé comme une consommation intermédiaire pour les entreprises (sauf si elles possèdent leur compagnie de transport). La
demande de transport ne peut donc se comprendre qu’en relation avec le mode de vie et l’activité de production.
- La production de services de transport est une activité à forte intensité capitalistique.
Le transport met en jeu du capital fixe (des routes, des chemins de fer, des camions, des ports, des navires, etc.), des
capitaux circulants (des carburants, de l’électricité), du travail (des camionneurs,
des cheminots, des pilotes, des marins, des dockers), et du temps.
La part du capital est considérable, tant en infrastructures qu’en matériels de transport.
- Qu'est-ce qui est en jeu dans le choix de ce service ?
Pourquoi choisir la route, les airs, les rails ou les océans ?
Evidemment, le premier critère qui vient en tête est le
coût: s'il est élevé, cela constituera un obstacle au commerce, ou on substituera un mode de transport par un autre (la route plutôt que les airs).
Les coûts sont très complexes à établir car ils dépendent d'un grand nombre de variables (consommation en carburant, type d'objet transporté, quantités transportées, péages et douanes,
assurance, frais de stockage, retour à vide etc....)
Un autre facteur très important est le temps: voici par exemple les données concernant le transport de
Fos à Lyon en fonction du coût et des délais.
Que choisiriez-vous ?
Là encore, on imagine au niveau international, les enjeux des délais lorsqu'on doit acheminer des marchandises de Chine jusqu'en Europe.
D'autres critères entrent alors en jeu: la sécurité des transports (il existe encore des pirates et des zones dans le
monde réputées peu sûres), la qualité des liaisons entre les différents modes de transport (pour passer des transports par navires au transport par
camion, mieux vaut avoir une logistique très au point)...
Examinons maintenant le transport maritime international
Quelques chiffres provenant d’études de la CNUCED (Revue du transport
maritime et CNUCED, 2008) permettent de situer l’importance du transport maritime pour le commerce mondial :
En 2007, plus de 7 milliards de tonnes de marchandises ont été transportées par voie maritime, ce qui correspond à environ 57 000 milliards de tonnes-km : cela représente environ 77 % de la valeur
et plus de 90 % du volume du commerce international ;
Pour vous donner une idée de comparaison, voici un graphique très parlant.
Vous savez que le commerce mondial (hormis en 2001) a une croissance supérieure au PIB mondial.
Voici les taux de croissance du trafic par conteneur. Impressionant, non ?
Le principal facteur qui a permis l’accroissement des échanges de produits manufacturés est la conteneurisation, qui représente aujourd’hui 80 % du trafic maritime
des marchandises diverses.
Pour en savoir plus sur le conteneur, voir ce lien
Ce développement rapide et massif de la conteneurisation s’explique par plusieurs facteurs:
- 1- la standardisation et l’intermodalité :
Les conteneurs de base doivent tous respecter les mêmes normes pour s’adapter au gabarit des remorques routières, des wagons ferroviaires ou des barges fluviales.
Leurs clients demandent de plus en plus un service « tout compris ». On voit donc se développer une stratégie
d'intégration verticale pour maîtriser toute la filière des transports. Tel opérateur qui propose, en plus du transport maritime, un service terrestre (via sa filiale) aura un avantage compétitif sur les autres.
De même, les ports ont dû se moderniser pour augmenter leur modularité dans le service.
-2- les gains de productivité
Lors des opérations de manutention portuaire, grâce notamment aux portiques à conteneurs qui transfèrent les boîtes du navire sur le quai, le facteur travail est devenu
beaucoup plus productif.
Voici un graphique qui montre les gains de productivité des dockers en France. On s'aperçoit qu'un docker, en 24 ans, est presque 4 fois plus efficace !
On peut se douter que le métier a dû complétement changé (comme cela a été le cas avec les ouvriers de métier avant et après le taylorisme...souvenir, souvenir ^^)
Que faire de ces gains de productivité ?
Normalement, grâce aux cours de SES, vous connaissez leurs différents destinataires: en simplifiant, on a le client (baisse de prix), l'entreprise (hausse des bénéfices), le travailleur (salaires,
conditions de travail).
Dans le transport maritime, le coût du fret en pourcentage de la valeur des importations a baissé de 12 % en 1950 à 5 à 6 % au début des années 1990 (selon la
CNUCED), depuis les années 1990, il ne baisse plus.
Ces gains de productivité ont surtout permis aux compagnies d'accumuler des capitaux nécessaires pour accroitre leur offre.
Anticipant une croissance de leurs activités, elles ont massivement investies dans la construction de nouveaux navires comme on peut le voir
En bon élève de Terminale ES, vous avez noté le degré de concentration du secteur: les 5 premiers armateurs mondiaux
possèdent 40 % du tonnage mondial.
Le premier du secteur (Maersk-Sealand, un Danois: les vikings ne sont pas morts ^^) possède 20 % de part de marché.
Et nous les français, nous avons la CMA-CGM qui se classe 3eme avec 5 % de parts de marché.
-3- Troisième facteur explicatif: des capacités de transport de plus en plus fortes, permettant d’importantes économies d’échelle
On constate une course au gigantisme ces dernières années...
Comme je sais que vous avez en tête les mécanismes économiques fondamentaux liés au calcul des coûts fixes, coûts variables, coûts moyens et coût
marginal (classe de Première), nous pouvons les réutiliser pour le transport maritime comme grille d'analyse.
Sur les grandes distances, on utilise des navires de grande taille dont les
coûts fixes de chargement et déchargement sont relativement élevés et les coûts variables de carburants et de rémunération des équipages relativement faibles : les coûts marginaux sont dans ce cas
relativement bas et l’effet de la distance parcourue sur les coûts totaux relativement faible.
Voici une illustration des fameuses économies d'échelle liée à la taille des navires sur l'Atlantique Nord
Plus la taille du navire est importante (lorsqu'on passe de 1 200 à 6 500 EVP), plus le coût unitaire par cellule est faible (il est divisé par 2: de 551 $ à 240 $) grâce à un étalement des coûts
fixes sur de plus grandes quantités.
Voici une vidéo (si on peut dire, étant donné la qualité disons très moyenne ^^) qui vous montre à quel point
cette course au gigantisme peut prendre des proportions démesurées
Ces facteurs explicatifs ont considérablement amélioré la compétitivité du transport maritime.
Il peut même, dans certains cas, rivaliser avec d'autres modes de transport habituellement utilisés
Une illustration ?
Les échanges de véhicules automobiles entre l'Italie et l'Espagne étaient surtout réalisés par le chemin de fer.
Ces dernières années, des lignes maritimes se sont multipliées. Pourquoi ?
On revient à nos critères: coût, vitesse et sécurité.
Un train peut charger 220 voitures, un bateau 500 voitures (voire plus), donc des coûts de transport moindres.
La vitesse d'un transport en bateau est de 22 km/h en moyenne contre 15km/h pour un train (qui doit passer par différentes gares de triage)
Questions annexes (non dénuées d'intérêt, mais qui doivent faire l'objet
d'autres articles)
il y a bien là une extension de la compétition dans le service des transports, elle peut être facteur d'efficacité...mais:
- si le coût et les délais deviennent des critères centraux, quel impact sur les conditions de travail des salariés qui doivent s'adapter (je pense aux
ports français face aux autres concurrents) ?
- quels coûts pour la planète ? L'extension des transports maritimes génèrent un certain nombre de nuisances dont le coût n'est pas internalisé
(pollution, catastrophes maritimes etc...). Si on fixe une taxe carbone, quel devra être son montant pour ne pas pénaliser les échanges ?
- quelle politique pour les Etats ? On sait que, lorsque les coûts fixes sont très élevés (cas de la construction des infrastructure de transport), le
secteur privé ne peut financer un tel bien qui pourtant génère des externalités positives (j'en connais dans ma classe qui vont sourire). Les Etats doivent donc réfléchir à une stratégie
dans ce secteur.
On pourrait presque réviser tout le programme d'économie de Terminale avec un tel thème, non ?
En tout cas, si j'ai pu vous apprendre quelques mécanismes économiques, j'en suis ravi.
J'ai moi-même acquis certaines connaissances sur le secteur car je n'y connaissais strictement rien avant de faire des recherches ^^
Alors, maman, les p'tits bateaux qui vont sur l'eau...sont devenus très gros !
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On peut consulter ce netbook sur le transport maritime en 2008