Un reportage fur réalisé par un magazine sur une course illégale de voitures en pleine rue (« street race »). Les autorités initièrent, avec succès, diverses procédures pénales afin que le CD-ROM sur lequel se trouvaient les photographies originales de la course - où les visages des participants n’étaient pas floutées - leur soit communiqué. En effet, la police avait reconnu sur les photographies publiées par le magazine un véhicule utilisé lors d’un braquage à main armée et souhaitait obtenir l’identité de ses détenteurs lors de la course.
Sanoma Uitgevers B.V. c. Pays-Bas (Cour EDH, 3e Sect. 31 mars 2009, req. n° 38224/03 )
Actualité Droits-libertés du 1er avril 2009 par Nicolas Hervieu
La Cour européenne des droits de l’homme rejette la requête alléguant d’une violation par les Pays-Bas de la liberté d’expression (Art. 10). A l’appui de cette décision, la Cour relève que la demande des autorités à destination du magazine ne tendait pas à identifier, pour les poursuivre, les sources des journalistes mais à résoudre une affaire criminelle distincte de la course illégale (§ 57). Tout en rappelant l’importance de la protection des sources journalistiques (§ 54) et le possible effet dissuasif en cas de saisie de ce type (« a compulsory handover of journalistic material may have a chilling effect on the exercise of journalistic freedom of expression » - § 57), les juges estiment nécessaire de mettre en balance cette protection avec la lutte contre les crimes (« the domestic authorities are not prevented from balancing the conflicting interests served by prosecuting the crimes concerned against those served by the protection of journalistic privilege » - § 57). Or, ils jugent que le poids du second intérêt est, en l’espèce, plus conséquent que celui du premier.
Outre la faible majorité acquise à cette solution (4 contre 3), le fait que la Cour éprouve malgré tout le besoin de fustiger le “regrettable manque de modération des autorités” (« a regrettable lack of moderation » § - 63) révèle un certain malaise quant à admettre cette saisie du matériel journalistique. Les trois juges dissidents sont d’ailleurs très critiques à ce sujet, notamment quant à la différence de degré de protection entre les sources des journalistes et leur matériel que cet arrêt tend à esquisser.
Sanoma Uitgevers B.V. c. Pays-Bas (Cour EDH, 3e Sect. 31 mars 2009, req. n° 38224/03)
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