Je vous propose le résumé du cinquième jour de l’étude du projet de loi Hadopi, encore une fois provenant de Numerama et écrit par Guillaume Champeau.
Outre le choix de préserver la suspension de l’accès à Internet et de rejeter l’amende que souhaitaient certains députés de la majorité, les débats se sont intensifiés mercredi sur la question du recours que pourra exercer l’abonné à Internet s’il est notifié d’une décision de sanction. Au terme d’un accord obtenu à l’arrachée par une coalition gauche-droite de circonstance, contre l’avis du gouvernement et du rapporteur, les députés ont obtenu que les internautes puissent former un recours jusqu’à 30 jours francs après notification, et non pas seulement 7 jours comme le souhaitait le rapporteur.
Mais le débat s’est achoppé sur la nature du recours. Sera-il suspensif, ou pas ? C’est-à-dire qu’en cas de contestation, l’abonné pourra-t-il voir son accès à Internet suspendu avant-même que son appel ne soit entendu ?
Dans l’après-midi, le rapporteur Frank Riester avait expliqué que “les internautes qui se verraient condamnés auront la possibilité de former un recours devant le juge judiciaire, recours qui pourra être suspensif“. Puis dans une formule à relire trois fois avant de la comprendre, il a ajouté que “le recours sera suspensif, et la décision du juge qui dira si le recours est suspensif ou non sera prise avant la suspension“. C’était un peu comme Renaud Donnedieu de Vabres qui, trois ans plus tôt, pour ne pas avoir à trancher sur la nature juridique de la copie privée entre un droit ou une exception, avait affirmé aux députés qu’il s’agissait d’un “droit à l’exception”.
Christine Albanel a été plus honnête. Elle a reconnu que l’objectif du gouvernement était que le recours ne soit pas suspensif. “S’il était suspensif de droit, il y aurait des risques de recours dilatoires“, a-t-elle expliqué. C’est-à-dire que le gouvernement craint qu’il y ait tellement de recours que le système en devienne enrayé et que les sanctions ne jamais appliquées.
L’abonné disposera donc en fait d’un mois pour exercer son recours, mais la sanction pourra avoir été appliquée par le FAI avant-même que le juge décide d’un éventuel sursis à exécution. En l’état actuel du texte, les FAI disposeront en effet d’après Frank Riester de trois à quatre semaines pour suspendre l’accès à Internet après la décision de l’Hadopi. Or si le recours était suspensif, le sursis à exécution serait accordé d’office dès la saisine, jusqu’à un éventuel contre-ordre du juge au moment de l’examen du recours. La différence est subtile, mais essentielle au respect des droits de la défense et de la présomption d’innocence.
Ebahie, l’ancienne ministre de la Justice Marylise Lebranchu (photo ci-dessus) est ainsi intervenue à l’hémicycle pour dénoncer un mécanisme “complexe” et “grave“, qui pose selon elle de nombreux problèmes pratiques. “A quel moment quelqu’un qui fait recours va-t-il être inscrit sur la liste (noire des abonnés) ?“, a notamment demandé la députée. Sans réponse.
Les parlementaires se sont également inquiétés de la “procédure de transaction” que pourra proposer l’Hadopi, de manière facultative et donc à son bon vouloir, aux abonnés qui s’engagent à ne pas réitérer leur manquement à l’obligation de surveillante. “On se croirait en droit canon. Faudra-t-il jurer sur la bible ou lever la main et cracher ?“, s’est désolée Martine Billard. Sans réponse.
Les uns après les autres, les amendements en faveur d’une meilleure protection des droits de la défense ont été rejetés par une majorité qui est cependant apparue parfois lassée, et qui semblait découvrir heure après heure l’ampleur de l’usine à gaz qu’ils sont en train de créer. L’opposition, elle, a semblé largement revigorée.
Le débat reprend ce jeudi, à 9H30.
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