Il y a 3/4 ans, lorsque le débat faisait rage sur le téléchargement illégal de musique, Universal s’était farouchement opposé à l’idée d’une Licence Globale. Cette taxe sur les abonnements internet devait permettre d’aider au financement de l’industrie musicale, sur un modèle assez proche de la taxe sur les CD et DVD vierges. Mais pour les Majors (Universal en tête), cela revenait à autoriser une personne à dévaliser un supermarché pour peu qu’il ait payé sa place de parking… Août 2007 : Neuf Télécom annonce en grande pompe une offre de musique illimitée dans le catalogue Universal. Compris dans le prix actuel de la Neuf Box (29,90 €), ce service permet aux abonnés de télécharger autant de titres qu’ils veulent, avec quelques restrictions toutefois : il faut choisir un seul des neuf genres musicaux proposés dans le catalogue. Autre contrainte : dès que l’abonné résilie son contrat avec Neuf Télécom, tous les titres téléchargés sur son disque disparaissent !! Alors, Universal aurait-il changé ? Evidemment non. En fait, Universal se fout royalement de protéger l’industrie du CD ou du spectacle vivant. Son seul intérêt, c’est de trouver des marges bénéficiaires. Pour les Majors, la Licence Globale fragiliserait leur position dominante. Car lorsqu’on a un budget limité pour acheter des albums, on préfère souvent l’utiliser dans des valeurs « sures », des artistes connus, médiatisés, et donc souvent chez ces Majors. Mais avec une Licence Globale, un fois payée la taxe mensuelle, l’internaute pourrait découvrir autant de groupes qu’il le veut ! Horreur, malheur… La riposte était donc simple pour Universal & co : proposer une Licence « exclusive ». De loin, ça ressemble à la licence globale, de près, c’est tout l’inverse. Car ne nous trompons pas : l’offre de Neuf n’est pas gratuite. Certes, l’abonnement reste à 29,90 €, mais dans le secteur des FAI, le processus concurrentiel ne se fait plus depuis des années sur la baisse des prix mais sur l’ajout de services : l’ADSL était à 29,90 € à ses débuts. Depuis, le prix est resté le même mais les offres de téléphonie et de télévision se sont rajoutées. Le Triple Play. Aujourd’hui, le 4e pilier de la « maison Net » semble être la musique. Mais contrairement aux offres de téléphonie et de télévision, la lutte qui s’engage sur le marché musical aura des conséquences profondes sur l’avenir de ce secteur culturel. Les fournisseurs d’accès ont toujours été contre l’idée d’une Licence Globale, qui augmenterait leur prix d’abonnement. Les Majors aussi, pour d’autres raisons. L’alliance était donc « naturelle ». Neuf et Universal ont ouvert une brèche : Orange et Free, les 2 autres géants des FAI en France, ont depuis annoncé des offres de téléchargement illimité. La Sacem est également entrée dans le jeu (comme à son habitude). Elle estime l’offre de Neuf illégale : « l'autorisation de la Sacem ne peut être conférée que par la SACEM, nous ne mandatons pas les producteurs de disque pour nous représenter ». De l’autre côté, Free et son associé (le site Deezer) ont conclu un accord avec la Sacem. Mais là, c’est Universal qui demande à Deezer de retirer les titres de son catalogue… Bref, chacun tire dans la patte de l’autre…et espère être le gagnant de cette nouvelle bataille des droits d’auteurs. Seul espoir : cette brèche ouverte par Universal pourrait donner un second souffle à l’idée d’une Licence Globale.
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