Des argots, y’en a plus d’un, mais l’en est un qu’j'affectionne bien.
Les bouchers ont une langue à eux, rien qu’à eux : le Louchébem. Un de ces dialectes corporatistes en voie de perdition comme il en est plein d’autres.
Il semblerait qu’à l’origine ce fût une sorte de langage codé de la pègre assassine des sombres ruelles parisiennes du temps de la splendeur d’un monarque rayonnant, lui. Et puis, chemin faisant, les artisans découpeur de viande se seraient appropriés la palabre - bel héritage. Qui mieux qu’eux pouvaient honorer un tel lègue, qui mieux qu’eux pouvaient assurer maniement du couteau digne d’un assassin…
Et voici nos bouchers resserant les liens de la guilde, plongeant dans une forme de communautarisme professionnel. Pas facile de saisir leurs verbatims. Pas de grammaire, pas de conjugaison - à quoi bon s’en encombrer. Le Louchébem est au final un rubik’s cube linguistique diablement bien foutu :
Prenez un mot, retirez-lui sa première consonne que vous placez astucieusement à la fin, rajoutez toujours un “l” à son début et l’un de ces suffixes bizarres à son extrémité : -aisse, -ème, -ji, -oc, -ic, -muche. De la chirurgie lexical de précision à n’en pas douter.
Si la logique est intégrée, vous vous serez peut-être aperçu que louchébem signifie … boucher. On se suit ? Très bien vous pouvez donc maintenant comprendre l’étymologie d’un terme certes rarement utilisé mais dont nous comprenons tous le sens : loufoc.
Et ouais.
Bouchers, des contortionnistes de haut rang sur la scène des belles lettres hexagonales…
Qui l’eut cru ?