Demandeurs d’asile : les conditions matérielles d’accueil décentes, corollaire du droit fondamental d’asile (CE, réf., 23 mars 2009, époux G.) par Gérard SADIK

Publié le 01 avril 2009 par Combatsdh

Coup de tonnerre dans le dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile - au moment même où il est désormais piloté par l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII - qui vient de se substituer à l'ANAEM) : le Conseil d'État a considéré, pour un demandeur d'asile, que la privation des conditions matérielles d'accueil décentes peut constituer une atteinte manifestement illégale au droit d'asile, qui constitue, dans le cadre de la procédure de référé-liberté (L.521-2 du CJA), une liberté fondamentale depuis l'affaire Hyacinthe ( CE, réf., 12 janvier 2001 Hyacinthe et Gisti).Il s'agit même d'un nouveau corollaire du droit d'asile avec le droit de solliciter le statut de réfugié.

Néanmoins, en l'espèce, le juge des référés du Conseil d'Etat estime que cette atteinte n'était pas constituée (CE, 23 mars 2009, M. G. : N°32584) contrairement au juge des référés du tribunal administratif de Nice qui, allant plus loin, avait considéré que les conditions d'accueil constituaient le corollaire indissociable du droit fondamental d'asile et avait enjoint le préfet d'admettre des demandeurs d'asile dans un Centre d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) ou dans un hébergement d'urgence (TA Nice, 17 février 2009, N°0900542 et 0900545).

Gérard Sadik est responsable du secteur asile à la Cimade (son billet a fait l'objet de quelques compléments de notre part). Les décisions sont reproduites sous le billet.
L'hébergement: un mur de verre à l'accès à l'asile

Dans plusieurs régions de France, les demandeurs d'asile ou les étrangers en situation irrégulière se heurtent souvent à un mur de verre: il n'y pas de place dans les CADA ou il n'y en a plus dans les dispositifs d'urgence. Les personnes sont donc priées de mettre en œuvre l'article 15 de la constitution zaïroise (" débrouille-toi ") en se contentant de l'allocation temporaire d'attente, pour les demandeurs d'asile admis au séjour ou trouvant des solutions " individuelles ".

Des tentatives de faire consacrer un droit à l'hébergement des demandeurs d'asile en référé-liberté

En décembre 2006, la mobilisation des enfants de Don Quichotte a conduit à la loi sur le droit au logement opposable qui dans son article 4 dispose que:

" Toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite, jusqu'à ce qu'une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d'hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation. ".

Les dispositions de cet article, contrairement à celles de l'article 1er ne conditionnent pas ce droit à des critères de résidence (fixés par décret en septembre 2008. Voir ce billet )

Les manoeuvres dilatoires de l'administration préfectorale

C'est sur cette base que la Cimade de Toulouse a élaboré une requête en référé suspension pour obtenir un hébergement d'urgence pour une famille de déboutés du droit d'asile qui se retrouvait à la rue après sa sortie de CADA. Le TA de Toulouse dans une ordonnance du 26 avril 2007 considéra qu'il y avait un doute sérieux quant à la légalité de la décision de refus implicite du préfet car l'accueil des personnes est sans condition et qu'il ne pouvait arguer de l'absence de places disponibles.

Dans la même lignée, le même tribunal administratif, dans une ordonnance du 11 avril 2008, fit la même réponse (voir le commentaire de Serge Slama et l'ordonnance sur le blogdroitadministratif).

Le droit à un hébergement d'urgence justiciable devenait donc une réalité.

Certes, le Conseil d'Etat a considéré dans l'affaire Fofana et a. (CE, réf., 22 mai 2002) que le droit au logement n'était pas une liberté fondamentale. Mais, l'introduction dans la loi d'un droit au logement et d'hébergement opposable et justiciable par une procédure spécifique a donné l'espoir que l'on pouvait modifier ce fait et a été tenté de faire consacrer sa justiciabilité également par des référés-liberté, en particulier pour des demandeurs d'asile "dublinés" qui sont soumis à la procédure prioritaire et donc n'ont pas accès au dispositif national. Pour les demandeurs d'asile, il est possible d'invoquer une autre liberté fondamentale "matricielle" - le droit d'asile - complétée par un nouveau corollaire: le droit d'hébergement.

Face à la multiplication des contentieux initiés par la Cimade, l'administration a alors systématiquement proposé à l'audience une solution d'hébergement - qui paraissait impossible la veille - afin d'échapper à la condamnation (comme le montre cette ordonnance du TA de Strasbourg du 25 juillet 2008).
Néanmoins, le 16 juin 2008, le Conseil d'Etat rendait un arrêt sur recours de la Cimade contre le décret sur l'aide temporaire d'attente (ATA).

Comme l'expliquait le commissaire du gouvernement (selon la dénomination usuelle alors], Luc Derepas :

" le droit au maintien ne peut être effectif que s'il s'accompagne, pour les personnes qui ont quitté leur pays sans ressources, de conditions matérielles d'accueil assurant une vie décente aux intéressés pendant la période d'examen de leur demande d'asile. "

Or, dans un considérant de principe, il affirmé que des dispositions de la directive 2003/9 CE du 27 janvier 2003 (dite directive "accueil") résultait clairement:

" que les demandeurs d'asile ont droit, dès le dépôt de leur demande et aussi longtemps qu'ils sont admis à se maintenir sur le territoire d'un Etat membre, à bénéficier de conditions matérielles d'accueil comprenant le logement, la nourriture et l'habillement ainsi qu'une allocation journalière, quelle que soit la procédure d'examen de leur demande " .

Après ce considérant de principe qui affirme le droit de bénéficier des conditions matérielles d'accueil, le Conseil d'Etat a validé le concept d'offre de prise en charge prévue par l'article R.348-1 du CASF en se fondant sur les dispositions de la directive permettant de fixer le lieu de résidence d'un demandeur d'asile (article 7).

La consécration du nouveau corollaire au droit fondamental d'asile dans l'affaire Epoux G.

Le conseil d'Etat évoque une "offre d'hébergement" et non une offre de demande d'hébergement.

La lecture des dispositions réglementaires était assez claire : en cas d'acceptation de l'offre, c'est quasi immédiatement que le préfet devrait informer le demandeur du centre susceptible de l'accueillir (même s'il se trouve en dehors du département). La réglementation précise même que c'est le préfet chargé de l'admission au séjour qui fait cette information, ce qui dans le contexte de la régionalisation de l'admission au séjour, suppose bien que c'est le moment de la délivrance de l'autorisation provisoire de séjour. La procédure de la circulaire du 3 mai 2007 [en PDF sur le site du Gisti] qui fait de l'offre préfectorale une offre de principe avant une demande auprès de l'ANAEM OFII ou d'une association ne correspond pas à celle décrite par le décret.

En tirant les conséquences de cet arrêt appliquées à la situation du demandeur d'asile attendant sans hébergement une hypothétique place en CADA, on peut donc considérer que le droit d'accueil est le corollaire de la liberté fondamentale qu'est le droit d'asile et que le préfet en n'offrant pas un hébergement y porte nécessairement atteinte.

C'est ce raisonnement qu'a suivi le juge des référés en enjoignant le préfet des Alpes-Maritimes à trouver un hébergement soit en CADA, soit dans le dispositif d'urgence. TA Nice, 17 février 2009 (N°0900542 et 0900545).

La situation était celle d'un couple de demandeurs d'asile, admis au séjour, qui avait accepté l'offre de prise en charge mais malgré leur état de santé défaillant, ne s'était vu proposer aucune place CADA, ni d'hébergement de stabilisation.

Le juge des référés affirme une responsabilité du préfet dans l'accès à l'hébergement des demandeurs d'asile, responsabilité qui n'est pas transféré à la plate-forme d'accueil vers laquelle il avait orienté les demandeurs.

Une ordonnance remettant en cause le fonctionnement du dispositif national d'accueil

Il considère que :

" le droit d'asile et le droit des demandeurs d'asile à bénéficier pendant la durée d'examen de leur demande des conditions matérielles d'accueil assurant une vie décente qui en est le corollaire indissociable, constitue une liberté fondamentale au sens des dispositions de l'article L.521-2 du CJA.

et que "compte tenu de la précarité des conditions d'hébergement du requérant, de la période hivernale et son état de santé, la condition d'urgence doit être regardée comme remplie en l'espèce;, pour enfin conclure que le refus implicite du préfet des Alpes-Maritimes d'assurer l'hébergement effectif de M.G. porte, dans les circonstances de l'espèce, une atteinte grave et immédiate au droit de l'intéressé de bénéficier, en sa qualité de demandeur d'asile, d'un hébergement décent pendant l'examen de sa demande. "

En conséquence, il enjoint le préfet de prendre en charge le demandeur dans un délai de 48H et sous astreinte de 100€ par jour, au titre du dispositif spécifique à l'accueil des demandeurs d'asile ou, à défaut, dans le cadre du dispositif de veille sociale prévue à l'article L.345-2 du CASF.

Une telle ordonnance fit trembler sur ses bases le dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile. En effet, si les préfectures proposent systématiquement une offre de prise en charge, elles ne sont pas en mesure de proposer une offre réelle d'hébergement et se contente d'orienter le demandeur vers les plates-formes d'accueil ou l'ANAEM l'OFII.

La privation des conditions matérielles d'accueil décentes constitue une atteinte potentielle au droit d'asile

Or le DNA a connu une double crise en 2008 : le nombre d'entrées s'est stabilisé au premier semestre 2008 à 5 436 alors que la demande d'asile est en hausse de 15% et que les arrivées officielles de réfugiés irakiens ont gelé de nombreuses places dans les CADA. Résultat, les listes d'attente s'allongent et les crédits d'hébergement d'urgence étant en diminution, de plus en plus de demandeurs sont littéralement à la rue

Le ministère alerté par le préfet a compris le danger et décida de faire appel le 10 mars 2009. Son argumentaire était simple : si le droit d'asile est une liberté fondamentale, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucune décision juridictionnelle ne qualifie les conditions matérielles d'accueil comme une liberté fondamentale. Il arguait également que l'Etat satisfait les exigences de la directive en allouant l'ATA à la place d'un hébergement CADA.

L'audience au Conseil d'Etat le jeudi 12 mars s'est concentrée sur les éléments factuels. L'ATA est-elle l'équivalent de la prise en charge CADA et permet-elle de satisfaire aux exigences de la directive?

Dans son ordonnance du 23 mars 2009 (CE, 23 mars 2009, M. G, N°32584), le juge des référés du Conseil d'Etat inclut les conditions matérielles d'accueil décentes dans le droit d'asile mais a annulé l'ordonnance du 17 février 2009 du TA de Nice qui enjoignait le préfet à prendre en charge en CADA ou en CHRS des demandeurs d'asile.

Pas d'atteinte manifestement illégale si l'allocation temporaire d'attente est versée
"Considérant [qu'au sens des dispositions de l'article L.521-2 du CJA] la notion de liberté fondamentale englobe s'agissant des ressortissants étrangers qui sont soumis à des mesures spécifiques réglementant leur entrée et leur séjour en France et qui ne bénéficient donc pas, à la différence des nationaux de la liberté d'entrée sur le territoire, le droit constitutionnel d'asile qui a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié, dont l'obtention est déterminante pour l'exercice par les personnes concernées des libertés reconnues de façon générale aux ressortissants étrangers que la privation du bénéfice des mesures prévues par la loi afin de garantir aux demandeurs d'asile des conditions matérielles d'accueil décentes jusqu'à ce qu'il ait été statué définitivement sur leur demande est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté".

Ainsi, dans le prolongement la jurisprudence Hyacinthe et Gisti, le juge des référés y adjoint les conditions matérielles d'accueil comme partie du droit constitutionnel d'asile après le droit de solliciter le statut de réfugié, d'être admis au séjour et de bénéficier de garanties essentielles comme le droit à une information sur la procédure, d'être présent à un entretien personnel, la confidentialité des éléments d'information de la demande d'asile, le recours suspensif.

Il développe donc la technique des droits et libertés matriciels auxquels il rattache des principes gigognes (comme il le fait également en reconnaissant des corollaires au droit de propriété ou à la liberté individuelle).

Néanmoins, en l'espèce, après ce considérant de principe, le Conseil d'Etat a annulé l'ordonnance du juge des référés et rejeté la requête du couple requérant car il considère qu'il n'y a pas, en l'occurence, atteinte manifestement illégale au droit d'asile.

Tout d'abord il rappelle, conformément à la jurisprudence Carminati et Dociev :

" qu'il n'appartient pas au juge des référés d'apprécier si les dispositions [de la loi et de la réglementation sur l'accueil des demandeurs d'asile] méconnaissent les objectifs de la directive [accueil]".

Ce contrôle de conventionnalité relève du juge du fond. Le juge des référés ne peut constater la non conformité au droit communautaire dérivé qu'à titre provisoire (v. Dociev).

Puis il considère qu'en l'espèce, il n'y a pas eu d'atteinte manifestement grave et illégale au droit d'asile car :

" après avoir mis les intéressés en possession d'un document provisoire de séjour, le préfet des Alpes-Maritimes a proposé à M. et Mme G qui l'ont accepté, un accueil en centre d'accueil pour demandeurs d'asile et les a orientés vers une plate-forme d'accueil, que dans l'attente d'une place disponible dans un tel centre, attribuée selon l'ordre des priorités relatives compte tenu de l'écart actuel entre le nombre de demandeurs d'asile et la capacité des établissements d'accueil, ou encore d'une place disponible dans un centre d'hébergement d'urgence ou dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale, les intéressés ont été admis au bénéfice de l'allocation temporaire d'attente que, dans ces conditions, les requérants ne justifient pas d'une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile".

Pragmatiquement, le Conseil d'Etat applique donc le principe de réalité en prenant en compte l'écart actuel " entre le nombre de demandeurs d'asile et la capacité des établissements d'accueil ou encore des places disponibles en CHU et CHRS" dès lors qu'est versée l'allocation temporaire d'attente qui lui permet de survivre.

En revanche, la question reste entière pour les primo arrivants "dublinés" et les procédures prioritaires qui n'ont pas accès ni au CADA, ni à l'ATA. Le Conseil d' Etat dans son arrêt du 16 juin 2008 avait considéré que les ressortissants de pays d'origine sûrs en procédure dite prioritaire devaient pouvoir toucher l'ATA pendant la durée de l'examen de la demande d'asile par l'OFPRA. Dans les faits, le pôle emploi leur refuse parce qu'ils n'ont pas de récépissé.

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Considérant, eu égard à ces dispositions dont il résulte que le dispositif de veille sociale a vocation à répondre immédiatement aux situations d'urgence, que le préfet de Haute-Garonne n'est pas fondé à opposer une fin de non-recevoir tirée de l'absence à la date de la requête, d'une décision implicite de rejet de la demande d'hébergement adressée par télécopie au DDASS de la Haute Garonne le 11 avril 2007 au motif que le délai de droit commun de deux mois n'était pas expiré à la dite date. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les époux A. de nationalité russe, sont entrées en France, avec leur deux enfants, nés en 1998 et 1999, le 24 juillet 2002, qu'ils ont présenté une demande d'asile le 20 septembre 2002, que cette demande a été définitivement rejetée le 30 janvier 2007 par la CRR, dont la décision a été notifiée le 15 février 2007, que le couple et l'enfant le plus jeune qui est scolarisé, comme le plus âgé qui est actuellement pensionnaire dans un établissement scolaire, ont été accueillies et on bénéficié du maintien en CADA jusqu'au 6 avril 2007, que cette solution d'hébergement ne pouvant légalement perdurer, il a été mis fin à cette forme d'accueil, que la familles, sans ressources, est actuellement sans domicile et n'a pu être provisoirement hébergée, depuis le 6 avril 2007, que grâce à l'intervention ponctuelle d'associations ou de volontaire ne disposant pas de moyens propres à cette fin, que, dans ces conditions, l'absence de toute réponse à la demande d'hébergement des époux A est de nature à porter gravement atteinte aux conditions de vie et, partant, à la dignité des personnes composant la famille concernée, qu'ainsi la condition d'urgence exigée par les dispositions de l'article L.521-1 du CJA doit être regardée comme satisfaite alors même que les époux A auraient été informés il y a près de quatre ans des conditions dans lesquelles prendrait fin la prise en charge de l'Etat; Considérant en troisième lieu, eu égard notamment à la situation de grande précarité dans laquelle se trouve la famille concernée et aux effets de la décision implicite attaquée, que le moyen d'erreur manifeste d'appréciation invoqué est de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision, qu'il en est ainsi, dès lors qu'aucune des dispositions du CASF relative au dispositif de veille sociale n'excluent la mise en oeuvre d'une solution d'hébergement à l'extérieur du département sans lequel a été présentée la demande, nonobstant la circonstance, à la supposer vérifiée, qu'aucune place ne serait disponibles en Haute Garonneé

Décisions:

    TA Toulouse, 26 avril 2007, époux A, N°02701913
Considérant, en second lieu, que, bien qu'elle ait pu en définitive, comme il vient d'être dit, être maintenue avec ses enfants en centre d'accueil pour demandeurs d'asile jusqu'au 28 mars 2008 alors elle n'avait pas vocation à y demeurer que jusqu'au 8 octobre 2007, soit un mois après la notification de la décision précitée de la commission des recours des réfugiés, un rapport établi par le service social du centre accueillant alors la requérante avait dès le 5 octobre 2007 appelé l'attention des services de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales sur sa situation et sur la nécessité de prévoir une nouvelle solution d'hébergement dés la date précitée du 8 octobre 2007 ; que, dans ces conditions, et eu égard à la situation de grande précarité dans laquelle se trouve la famille concernée ainsi qu'aux effets de la décision implicite attaquée, le moyen d'erreur manifeste d'appréciation invoqué est de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de cette décision ;

" Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article L.345-2 du CASF, le dispositif de veille sociale mis en place dans chaque département à l'initiative du préfet et chargé d'orienter en permanence les personnes en difficulté a notamment pour mission " de proposer une réponse immédiate en indiquant notamment l'établissement ou le service dans lequel la personne ou la famille intéressée peut être accueillie et d'organiser sans délai une mise en oeuvre de cette réponse (...)

    TA Toulouse, 11 avril 2008, N°0801610
"Considérant que M et Mme K. de nationalité azerbaïdjanaise, déboutés du droit d'asile par la Suède et en attente d'une décision du préfet du Bas-Rhin sur leur situation au titre de leur réadmission dans ce pays, ont introduit la présente requête en référé après avoir, le 23 juillet 2008, présenté, par télécopie, une demande d'hébergement d'urgence dans le cadre du dispositif de veille sociale prévus par l'article L.345-2 du CASF, laissée sans réponse à la date de la requête; Considérant qu'l est constant que, jusqu'au 24 juillet 2008, veille du jour de l'audience; M. et Mme K ont été hébergés avec leurs 2 enfants, grâce à une mobilisation associative, que la représentante du DDASS a précisé à l'audience que l'administration était en mesure de mettre effectivement en place " à compter de ce soir et tant que la situation de précarité de la famille K. subsisterait une solution d'hébergement, " que le conseil des requérants ayant fait connaître qu'en raison de cet engagement de l'administration, il estimait avoir obtenu satisfaction, la requête devient sans objet dans la mesure où elle tend à la suspension de l'exécution du rejet implicite de la demande d'hébergement présentée par les intéressés et à ce qu'injonction soit faite au préfet de leur fournir un hébergement".

" Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme X, de nationalité albanaise, est entrée en France en mai 2005 avec sa ^première fille née le 12 juillet 2000, aujourd'hui scolarisée, sa seconde fille née à Toulouse le 19 août 2005 ; que la demande d'asile qu'elle a présenté a définitivement été rejetée par décision de la commission des recours des réfugiés notifiée le 8 septembre 2007 ; que la famille a été maintenue en centre d'accueil pour demandeurs d'asile jusqu'au 28 mars 2008, mais, sans ressources, se trouve actuellement sans domicile et n'a pu être provisoirement hébergée, depuis le 28 mars 2008, que grâce à l'intervention du secours Catholique ou de volontaires ne disposant pas de moyens propres à cette fin ; que, dans ces conditions, l'absence de réponse à la demande d'hébergement de Mme X est de nature à porter gravement atteinte aux conditions de vie et, partant, à la dignité des personnes composant la famille concernée ; qu'ainsi, la condition d'urgence exigée par les dispositions susreproduites de l'article L.521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme satisfaite ;

"Considérant qu'il ressort des dispositions des articles L.111-1, L.111-2 du CASF qui régissent l'aide sociale d'Etat sont applicables aux demandeurs d'asile et qu'il s'évince des dispositions des articles L.111-3-; L.348-1, L.348-3, R.348-1 et suivants du Code de l'action sociale et des familles que "_le préfet demeure responsable des conditions d'accueil et d'hébergement des étrangers demandeurs d'asile, responsabilité à laquelle il ne peut également se soustraire du fait de la défection de l'organisme gérant le centre d'accueil vers lequel il avait orienté le demandeur en application de l'article R. 348-1 du CASF_" Considérant que le droit d'asile et le droit des demandeurs d'asile à bénéficier pendant la durée d'examen de leur demande des conditions matérielles d'accueil assurant une vie décente qui en est le corollaire indissociable constitue une liberté fondamentale au sens des dispositions de l'article L.521-2 du CJA" Considérant que "compte tenu de la précarité des conditions d'hébergement du requérant, de la période hivernale et son état de santé, la condition d'urgence doit être regardée comme remplie en l'espèce; Considérant que le refus implicite du préfet des Alpes-Maritimes d'assurer l'hébergement effectif de M. G porte, dans les circonstances de l'espèce, une atteinte grave et immédiate au droit de l'intéressé de bénéficier, en sa qualité de demandeur d'asile, d'un hébergement décent pendant l'examen de sa demande".

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à demander la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande des 3 et 5 avril 2008 tendant au bénéfice d'un hébergement au titre du dispositif de veille sociale ".

"Considérant [qu'au sens des dispositions de l'article L.521-2 du CJA] la notion de liberté fondamentale englobe s'agissant des ressortissants étrangers qui sont soumis à des mesures spécifiques réglementant leur entrée et leur séjour en France et qui ne bénéficient donc pas, à la différence des nationaux de la liberté d'entrée sur le territoire, le droit constitutionnel d'asile qui a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié, dont l'obtention est déterminante pour l'exercice par les personnes concernées des libertés reconnues de façon générale aux ressortissants étrangers; que la privation du bénéfice des mesures prévues par la loi afin de garantir aux demandeurs d'asile des conditions matérielles d'accueil décentes jusqu'à ce qu'il ait été statué définitivement sur leur demande est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté; [...] Considérant qu'après avoir mis les intéressés en possession d'un document provisoire de séjour, le préfet des Alpes-Maritimes a proposé à M. et Mme G qui l'ont accepté, un accueil en centre d'accueil pour demandeurs d'asile et les a orientés vers une plate-forme d'accueil, que dans l'attente d'une place disponible dans un tel centre, attribuée selon l'ordre des priorités relatives compte tenu de l'écart actuel entre le nombre de demandeurs d'asile et la capacité des établissement d'accueil, ou encore d'une place disponible dans un centre d'hébergement d'urgence ou dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale, les intéressés ont été admis au bénéfice de l'allocation temporaire d'attente que, dans ces conditions, les requérants ne justifient pas d'une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile ; Considérant que le droit au logement " n'est pas au nombre des libertés fondamentales, au sens de l'article L.521-2 du CJA, alors même qu'il constitue un objectif à valeur constitutionnelle. " Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministère de l'Immigration est fondé à soutenir que , c'est à tort que , par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nice s'est fondé sur l'absence d'accueil immédiat de M et Mme G dans un centre portrait dans les circonstances de l'espèce une atteinte grave et immédiate à leur droit de bénéficier , en leur qualité de demandeurs d'asile, d'un hébergement décent pendant l'examen de leur demande, qu'il est par suite à fondé à demandeur l'annulation ainsi que le rejet de la demande des intéressés".
    TA Strasbourg, 25 juillet 2008, N°0803284 et 0803285
    TA Nice, 17 février 2009, N°0900542 et 0900545.
    CE, 23 mars 2009, Epoux G., N°325884