Et tout d'un coup, un rumeur apparaît. Les hauts dirigeants de la Warner semble vouloir tirer un trait définitif sur les blockbusters classés "R" (interdit aux moins de 17 ans non accompagnés), encouragés par les résultats de THE DARK KNIGHT ("PG-13") et surtout déçus par ceux de WATCHMEN.
Une rumeur qui apparaît juste au moment où la bande annonce d'un autre film de la Warner est dévoilée sur Internet. Ce film : MAX ET LES MAXIMONSTRES de Spike Jonze (DANS LA PEAU DE JOHN MALKOVICH).
Oui, un film pour enfants ! Quel peut bien être le rapport entre l'adulte WATCHMEN et l'enfantin MAX ET LES MAXIMONSTRES ? Et bien, beaucoup plus qu'il n'y paraît.
D'abord, les deux sont basés sur un livre réputé inadaptable, le premier à cause de sa complexité narrative, le second pour sa simplicité. En effet, le livre illustré de Maurice Sendak, qui raconte comment un jeune garçon s'invente un monde peuplé de créatures féroces dont il devient le leader, ne compte que 10 lignes de dialogues en tout et pour tout.
Ensuite, les deux films sont nés d'un processus créatif très douloureux. Si WATCHMEN a mis près de 20 ans à voir le jour, passant de mains en mains, de réalisateur en réalisateur, MAX ET LES MAXIMONSTRES a causé à Spike Jonze, son metteur en scène, des grosses sueurs froides et quelques nuits blanches pendant les 5 ans que dura le processus de production. Cinq années durant lesquelles Jonze dut se battre contre les cols blancs de la Warner pour imposer sa vision, que ces derniers décrivirent comme trop "bizarre" et "effrayante". Il fut même un temps question que Jonze retourne le film dans son intégralité.
Ce qui m'amène au troisième point commun : le courage et la détermination des auteurs. En décidant de réaliser WATCHMEN, Zack Snyder s'exposait soit à la colère des fans qui lui reprocherait d'avoir trahi l'oeuvre culte d'Alan Moore et Dave Gibbons, soit à celle de son studio qui lui reprocherait de ne pas remplir la caisse de dollars en n'attirant pas les ados et enfants dans les salles comme pour n'importe quel film de super-héros. Snyder se mit du côté des fans et ce qui devait arriver arriva : un box-office moyen mais...un bon film à la clé ! Snyder et son équipe ont eu des couilles et sont allés jusqu'au bout de leur vision.
En regardant la bande-annonce de MAX ET LES MAXIMONSTRES, il semble bien que des couilles, Jonze en a eu également ! Car il est très probable que les enfants ne soient pas très nombreux dans les salles - comme l'aurait voulu au départ la Warner - au profit d'adultes fans des univers barrés de Jonze ou tout simplement nostalgiques du livre. Il est très probable également que le film file la trouille de leur vie (mais c'est déjà ce que faisait le livre !) aux rares enfants qui seront dans les salles. Mais peu importe !
Ce qui se joue ici avec des films comme WATCHMEN ou MAX ET LES MAXIMONSTRES, c'est la survie de vrais visions "pour adultes consentants" dans un cinéma hollywoodien de plus en plus consensuel (et j'englobe naturellement THE DARK KNIGHT là-dedans). Avec la disparition des branches "indépendantes" (Warner Independent, Picturehouse...), l'apparition de mini-studios encore plus consensuels que les grands studios eux-mêmes (Summit Entertainment, producteurs de TWILIGHT et consorts) et les déclarations exposées plus hauts, il y a de quoi se faire du souci.
Comprenez-moi bien. Il est évident que les studios ont toujours produits des films visant les adultes. Cette année encore, il y a eu les excellents BENJAMIN BUTTON, GRAN TORINO, WALKYRIE, LES NOCES REBELLES et plein d'autres. Ce qui rend les films de Snyder et Jonze si particuliers et uniques et donc inestimables, c'est qu'il ne sont pour personne en particulier : WATCHMEN, en parlant de super-héros, s'adresserait naturellement aux ados mais parlerait peut-être davantage aux adultes (pour sa noirceur ou sa violence misanthrope), tandis que MAX ET LES MAXIMONSTRES, en prenant un jeune héros de 10 ans, s'adresserait d'abord aux enfants mais parlerait plus aux adultes (pour son étrangeté et sa noirceur).
Ils sont donc de vrais paris artistiques (pour leurs auteurs) et commerciaux/marketing (pour les studios).
Avec la crise économique (malgré des salles qui ne désemplissent pas), il est donc fort à parier que ses films "atypiques" disparaissent peu à peu, les budgets allant d'abord sur des projets ultra-sûrs, sans casse-tête marketing (Mais c'est qui la cible de ce film ? Les enfants de 7 à 10 ans ou les jeunes adultes de 24 à 35 ans ?), tels que des suites, des remakes, des films de super-héros tout public avec des réalisateurs aux ordres...
Vous avez dit dommage... ?