Une journée en Islande

Publié le 30 mars 2009 par Vivreenislande @vivreenislande
7h30 - Le réveil. Il sonne. On s’en doute. Les réveils ne font pas encore des massages. Donc il sonne. Je l’éteins. Ça fait du bruit un réveil qui sonne. Dans mon semi coma, je sais qu’il va s’énerver à nouveau. C’est con un réveil. Vous lui dites « tu me réveilles à 7h30 », et il se contente de glousser toutes les 10 minutes. Il geint tant que vous n’êtes pas debout.
8h00 – Je finis par tenter une sortie. Un mouvement après l’autre. D’abord se redresser. J’ai encore les yeux clos. Assis dans mon lit, je ressemble à un automate somnambule. Une jambe, puis l’autre. Toucher le sol. Se connecter à la terre. C’est le secret. Un pull, un autre. Jean, chaussettes chaudes et baskets. L’Islande ne sera jamais l’Espagne. Même au mois d’août. Alors je m’équipe.
8h05 – Café. La panacée. La cible. Sans café, il ne peut rien m’arriver de bon. Il ne peut rien m’arriver du tout en fait. D’abord, le préparer. Faire chauffer l’eau dans la bouilloire électrique. Verser les doses. Arôme chocolat. Oui, c’est curieux. Mais c’est comme ça. Nous aimons le café au chocolat. Attendre que cette p… de bouilloire daigne gémir. Verser l’eau qui frémit dans la cafetière et pistonner. Un bol, deux sucres, une cuillère. Je m’allume enfin.
8h20 – Tartine, beurre et confiture. Parfois. Quand j'ai faim. Ça dépend des jours. De toute façon, si je n'ai pas faim à 8h20, j'aurais faim vers 10h00. Juste après la douche (voir "10h00").
8h30 – Je m’installe avec une clope dans l’escalier qui mène au jardin et j’ouvre la porte en grand. Je m’assieds sur une marche et j’écris dans ma tête. Pas facile de se relire. C’est l’un des rares moments calmes de la journée. Les deux plus jeunes sont déjà à l’école, les deux grandes à peine levées et Valérie joue à son tour avec son réveil. Ça fait 10 fois qu'il joue la Lettre à Elise, mais elle ne semble pas être traumatisée pour si peu. Moi, je laisse le vent froid s’engouffrer, avale quelques gorgées de liquide noir et brûlant histoire de maintenir mon corps à une température acceptable et je liste mentalement les trucs que j’aurais à faire ou me récite la suite d’une histoire née dans la nuit. Quand je suis trop endormi, je laisse mes souvenirs vagabonder, en fixant le tableau rectangulaire du paysage immobile qui s’affiche dans l’embrasure de la porte.
8h45 – Démarrage du MacBook. Premier code d’accès. Ouverture de Firefox directement sur Symbaloo. Re-code. Top Symbaloo. Vous affichez tous les sites qui vous intéressent sur l’écran. Plus pratique que l’usine à gaz des marques pages. Ensuite, les mails. Encore un code. Je prends conscience en écrivant que mon ordinateur est une véritable banque. Le Fort Knox du web. Ha, un message de Kiji, qui propose de m’envoyer un Maroilles. J’accepte. Merci Kiji. Trop sympa. Pour ceux qui ne le savent pas, le Maroilles tient son nom de l'abbaye de Maroilles (Nord). Ce fromage à pâte molle qui contient jusqu’à 50% de matières grasses (ha oui tout de même !), exige un affinage de 8 à 10 semaines. Le goût fort, rude et même rudement fort du Maroilles m’a toutefois dissuadé de tester la tartine de Maroilles au petit-déjeuner. En dépit d’une courte expérience ch’tiesque dans ma tendre enfance.
9h30 – Douche. J’en ai déjà causé ici : http://vivre-en-islande.blogspot.com/2008/09/apologie-farfelue-de-la-douche.html
Je recommence pas.
10h00 – Fin de la douche. La maison est vide. Je peux enfin travailler tranquillement. Ni femme, ni enfants pendant quelques heures. Un bonheur. LE bonheur. Je l’avoue.
13h30 – Pause déjeuner. Diététique. Une tartine de fromage frais avec une tomate, un peu de yaourt à boire et un fruit. Et quand j’en ai vraiment ras le cul, je vais me chercher un méga hamburger qui bave de sauces de toutes les couleurs, avec des frites et du Coca. Je connais pas mieux en cas de passage à vide.
14h00 – Je tente de m’y remettre. Je dis « je tente » parce que deux phénomènes totalement indépendants peuvent parfois survenir et freiner la reprise. L’arrivée soudaine et bruyante des deux plus jeunes et la digestion post fast-food. La seconde tend à m’endormir, les premiers à me sortir de mon apathie et les deux ruinent mes efforts désespérés de concentration.
15h30 – Bon alors là ça dépend du jour : lundi et vendredi, j’emmène Pablo à son entraînement de foot ; mercredi à ses cours de dessin ; et jeudi c’est la séance hebdomadaire de ménage. Opérations anti-poussières et autres manœuvres ménagères pour mes 4 troufions devenus fées du logis. Charge à eux de nettoyer leurs espaces et une partie de ceux que nous partageons. Le reste m’incombe. Je m’équipe. Casque sur les oreilles, iPod dans la poche et Robbie Williams dans la tête. Ça couvre le violent ronronnement de l’aspirateur. Mais surtout, ça motive. Et pour gagner la guerre contre le désordre et la saleté, de la motivation il en faut.
18h00 – Direction la cuisine. N’étaient les exigences des unes et des autres, cuisiner pourrait être fort plaisant. Exemple. Ce soir : crostinis. D’ordinaire, il me suffit d’ailler quelques morceaux de pain préalablement grillés, de rajouter sur chacun d’eux une rondelle de tomate, un morceau de mozzarelle fraîche, sel, poivre, un peu de confit de basilic et direction le four, thermostat 180. Laisser dorer 10 à 15 minutes et servir chaud. Ça prend un petit quart d’heure de préparation. D’ordinaire. C’est sans compter les désidératas de certains. Ainsi, Félicie et Pablo ne supportent pas le fromage fondu. Et que peuvent mes réticences devant l’œil humide et la mine contrite des deux gnomes ? Il me faut donc préparer des tartines avec Mozarelle et d’autres sans Mozarelle. Et pour m’éviter un SCUD en pleine poire, je dois aussi m’assurer que la répartition soit équitable ; et compter les tartines. Valérie ensuite, s’y met à son tour. Je dois maintenant prévoir aussi de faire fondre pour elle quelques tranches de Mozarelle sur une assiette séparée. Ce qui n’exclut pas quoi qu’il en soit de prévoir en plus un poireau bouilli, comme chaque soir depuis qu’elle est en âge d’absorber pareille pitance. J’ai fini par en conclure que les temps de préparations et les indications des livres de cuisine étaient pensés par des abrutis, célibataires et sans enfant.
21h00 – Lentement mais sûrement, une fois les enfants dans leurs chambres, la bruyante effervescence familiale s’estompe pour permettre aux deux parents épuisés de profiter de ce calme inhabituel. Détente. Un DVD peut-être. Un bouquin à terminer certainement. Et une grande nuit de sommeil, en attendant qu’il sonne.
Le réveil.