A las cinco de la tarde…
Mardi, c’est Kiwis !
Cette semaine, j’ai décidé de collecter quelques billets de la kiwisphère et de les assaisonner à ma sauce. Le but du jeu est d’arriver, sans dénaturer le billet, à réunir le plus de Kiwis à partir d’un thème que j’ai trouvé particulièrement bien traité. Cette semaine : cinq Kiwis à l’honneur, Edgar, Seb, H16, Gaulliste libre et Gauche Totalitaire.
Chinons des billets sur le Net
Mon collègue Edgar a braqué cette semaine son projecteur sur la proposition chinoise de créer une monnaie de référence nouvelle synthétique, appuyée sur 4 devises internationales, pour remplacer le dollar. Je n’ai guère compris si la Chine imaginait une autre monnaie que les droits de tirages spéciaux du FMI, ou pas – Mais peu importe. Sur le fond, je salue son billet, même si je trouve qu’il a « loupé » sa conclusion, qui se restreint à un constat sur l’inutilité de l’Europe (les Européens ont défendu le dollar…) .
De son coté, mon collègue Laurent, qui traite du même sujet, s’est laissé à un exercice utopiste de rapprochement Europe-Chine. Je n’y crois pas, pour la simple et bonne raison que l’hégémonie ne se partage pas, et que les Chinois ont été tout aussi négligents et égoïstes que les Américains en laissant le yuan exagérément se sous-évaluer.
En réalité, la proposition chinoise doit s’analyser bien au-delà des limites de la seule Europe. Elle répond à la fois à une vraie nécessité économique, mais aussi est le signe d’un basculement géopolitique évident.
Nec fluctuat sed mergitur
Sur la nécessité économique, autant le dire comme je le pense, le cours flottant du dollar s’est révélé être une catastrophe. Tigre sorti de sa cage, il a tout d’abord ravagé l’équilibre financier des pays en voie de développement. La politique du dollar fort menée sous Reagan par la FED a accru le surendettement des pays d’Amérique Latine, aux devises indexées sur la monnaie étasunienne. Dans les années 80, le dollar fort afait exploser la dette du Tiers-Monde. On parle du SIDA, mais le dollar yoyo a plus fait de morts en Afrique que la pandémie.
Couplée avec son rôle de devise principale dans le commerce international, le dollar flottant a également déresponsabilisé la superpuissance qui était justement chargée de réguler le système économico-financier qu’elle avait elle-même bâtie. En creusant des déficits abyssaux, l’économie des Etats-Unis s’est bâtie sur un endettement gigantesque, une course en avant dans la croissance financée sur du vent.
Maquillée par la complexité croissante des produits financiers, la bombe à retardement des subprimes a fini par exploser. Désormais, l’Amérique entend racheter cette dette de la manière la plus bête qu’il soit : en fabriquant du dollar. 300 milliards rachetés, comme le souligne Seb. Une inflation monétaire qui permet de supprimer de la Dette en saturant le marché des devises…
Our money, your problem
Si personne n’a jamais instruit le procès du dollar, c’est parce que la majorité des économistes de la planète sont américains, et que personne n’ira se tirer une balle dans le pied. Aux Etats-Unis, le libéralisme est un produit d’exportation et le keynésianisme financé par les autres une doctrine officieuse, à droite comme à gauche…
Dans les universités françaises, en revanche, le dogme libéral fait que la flexibilité est moderne, et la rigidité mauvaise. On enseigne à des générations d’étudiants que le système de changes fixes était dépassé, que les étalons or étaient une hérésie*.
Pourtant, force est de reconnaître cependant qu’en matière de stabilité et de croissance, si je compare 1944-1971 et 1971-2009, il n’y a pas photo.
Le soleil se couche à l’Ouest…
Mais le point le plus important de l’article d’Edgar n’est pas seulement sur l’économie.
Une révolution politique s’annonce : le système de Bretton Woods est indissociable de la prédominance américaine. Les Etats-Unis sont les propriétaires-bailleurs du système : ils financent le FMI, la Banque Mondiale et leur monnaie est tout naturellement reine en son royaume.
Leur déclin, accéléré par une gestion hasardeuse de l’appareil productif, ne peut donc que coïncider avec une révolution institutionnelle dont la fin du dollar n’est qu’un aspect : révision des procédures de vote au FMI et à la Banque Mondiale, disparition du G8 au profit du G20. Ce big-bang, s’il se fait, nous atteindra. Ouvrons les yeux : notre siège au Conseil de sécurité est un anachronisme.
… et se lève à l’Est
Samedi soir, je suis allé voir « Les trois royaumes », exaltation par John Woo de la Chine antique.
Depuis plusieurs années, la Chine se met en scène : comme les Etats-Unis au début des années 50/60, elle revisite ses grands mythes, elle sensibilise le monde à son patrimoine par le canal culturel, elle impose par le pharaonisme et le gigantisme de ses productions. Les « Trois Royaumes », outre le fait qu’il est un excellent film, véhicule toute une série de messages :
- Le choix du sujet, si loin de l’histoire de l’Occident, nous est imposé par la puissance qui maîtrisera demain peut-être l »industrie cinématographique mondiale. Aurevoir les cow boys, les péplums et les films sur le grand Siècle.
- La Chine a désormais les moyens de produire du grandiose. Hollywood n’a plus qu’à bien se tenir.
- Les valeurs véhiculées par les films chinois sont clairement confucianistes : sacrifice de l’individu pour l’intérêt général, loyauté envers le chef, amour de la patrie.
Oui, la crise des subprimes restera comme le basculement du monde. La Chine rachète à tout va, à l’aide de ses 2 000 milliards de dollars de réserves de change, les entreprises en difficulté. Elle affiche une santé insolente et commence à menacer les Etats-Unis de leur retirer leur suprématie. Elle se bâtit un soft power culturel. Il aura fallu à peine vingt ans pour que le monde se redécouvre une bipolarité…
*Dans un autre registre, la Commission européenne doit être la dernière au monde à croire au principe de la concurrence pure et parfaite.
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