Il fait noir. Il fait froid. Je ne suis pas chez moi, et je suis nu. À ma droite, toute enroulée dans les draps, se trouve une femme. Elle est recroquevillée, dos à moi. Sur mon torse se trouve un bras. Le bras d’une autre femme, nue, et cramponnée à moi. L’une de ses jambes se trouve sur la mienne. Sa tête repose en partie sur mon épaule. Je dois aller aux petits coins, mais je me sens lâche. J’ai besoin de me réchauffer, car il fait froid. Je sais que je ne pourrai rester ainsi bien longtemps. Je souhaite fortement que la femme à ma gauche se réveille. Je tourne ma tête vers la sienne. De ma main gauche je lui caresse le bras posée sur mon buste, en le déplaçant lentement. Plutôt que s’éloigner, elle se replaça énergiquement dans sa position, et m’embrassa la joue. Elle me demanda si je me sentais bien. Je lui répondis que tout irait pour le mieux si je pouvais me lever pour aller satisfaire un besoin rendu urgent. Elle se retourna sur le dos, et je pu ainsi me lever.
Je regardai sa nudité un moment, avant de prendre le chemin de la salle de bain. Celle-ci se trouve à l’autre extrémité du couloir. En arrivant près de la porte de ma destination tant convoitée, j’entendis un homme qui toussa. Ce bruit provenait de la cuisine, à ma droite. Très surpris, je m’empressai d’entrer dans la salle de bain. En urinant, j’essayai de mieux me réveiller, pour tenter de comprendre d’où venait cet homme. Ma nouvelle copine ne m’avait jamais parlé d’un colocataire, pas plus que sa meilleure amie. Les soirées précédentes où elle m’invita chez elle, aucune autre personne ne s’y trouvait, à part sa meilleure amie qui venait périodiquement satisfaire sa curiosité.
Comme cet appartement ne contenait que deux chambres, et que l’une d’elle ne servait que de bureau, je n’arrivais pas à comprendre la présence de l’homme. De plus, son âge me remplit encore plus de question. Qu’est-ce qu’un homme dans la quarantaine avancée faisait dans l’appartement d’une jeune femme de 20 ans. Pourrait-il s'agir du propriétaire qui se permit d’entrer ? Je me demandai aussi dans quel pétrin je venais de me placer. Et s’il était l’ex de ma copine, ou encore son « sugar daddy » ? Très vite, ces questions devinrent désuètes à mes yeux. Mes pensées se tournaient désormais uniquement autour de ma nudité. Je cherchai une serviette, mais en vain.
Je planifiai de sortir quand même ainsi nu, pour me diriger d’un pas rapide vers la chambre. J’ouvris discrètement la porte, pour me ruer à l’extérieur en direction du lieu où se trouvaient mes comparses de nuit. J’avais marché à peine un pas quand mon plan échoua. L’homme s’approcha de moi, sourire pendu à ses lèvres. Il me tendit la main, comme pour se présenter. Je me demandai quelle sorte d’homme pouvait bien agir de la sorte. Je soupçonnai une ruse de sa part, un subterfuge hypocrite de surprise, pour enchaîner par un geste de violence à mon endroit. Il osa même, après m’avoir dit son prénom, m’appeler son coco en me demandant le mien.
Je le regardai droit dans les yeux en m’approchant de lui, pour m’assurer qu’il était seul dans la cuisine et aussi, pour lui couper l’accès au couloir menant à la chambre à coucher. À ce moment, deux choses inédites se produisirent en même temps. J’eux le temps d’apercevoir une femme, assise au centre de la cuisine, tenant une cigarette à la main. Elle me fixait les bijoux de famille, semblait mal à l’aise, mais aussi frustrée. Un air de déception profond émanait de cette femme. Au même moment, ma copine soupira en murmurant quelque chose à voie haute. Les seuls mots que je pusse comprendre furent : trop tôt, pas encore, samedi matin. En un éclair elle sorti de la chambre, maintenant vêtu d’une chemise de nuit, avec une robe de chambre à la main. Elle eut de la difficulté à l’enfiler, s’y reprit à quelques reprises, avant d’y arriver. Je me dirigeai donc en sa direction, lorsqu’elle m’ordonna d’entrer dans sa chambre, et d’y rester un bon moment. Je compris qu’elle connaissait bien ces personnes.
Encore sous le choc, toujours remplis de questions, j’obtempérai sans rechigner. Elle semblait tellement éprise de frustration, que je n’ai point osé la contredire, ni même la questionner sur la présence de ces personnes aussi tôt le matin. En entrant dans la chambre, l'autre copine me prit par la main, referma la porte, et me tira avec elle vers le lit. Elle me raconta que ces personnes sont les parents de ma copine, venus de l’autre bout du Québec pour visiter leur cadette, comme à chaque mois.
La discussion dans la cuisine était des plus animée, entre ma copine et son père. Pendant ce temps, je ne voulais que me vêtir pour quitter cet endroit. Mais l’amie de ma copine chercha à m’en empêcher, et trouva amusant d’essayer d’allumer mon organe mâle, avec sa bouche. Se voyant repoussée, elle le prit dans sa main, pour me chuchoter dans l’oreille qu’il ne fallait absolument pas que le père découvre sa présence en ces lieux.
La chicane s’arrêta brusquement quand la mère, qui me sembla passive jusque-là, pris la parole d’un ton extrêmement autoritaire. Ma copine sanglotait à ce moment. Juste après, nous entendîmes les pas du père qui s’approchaient de nous. L’amie se dirigea dans la garde-robe, pour s’y cacher. De mon côté, je m’habillai rapidement, ne prenant même pas le temps d’enfiler mes petites culottes.
Rendu à côté de la porte, le père me demanda s’il pourrait avoir l’honneur de connaître mon nom avant de repartir pour son patelin. Je sorti de la chambre, et me présenta à lui. Il s’excusa de cette scène dans laquelle je n’aurais pas dû être témoin. Il se dirigea ensuite vers la sortie. La mère, qui le suivait, passa près de moi. Après m’avoir dépassée, elle se retourna en ma direction, pour me demander de ne pas tenir compte des propos entendus ce jour-là dans ma décision de revoir ou non sa jeune cadette. Elle se dirigea enfin rejoindre son mari, qui l’attendait à la sortie.
C’est de cette façon que j’ai rencontré ces inconnus.
** Version abrégée **
2009 © BAxT-Le périple de parfaits inconnus