Voici maintenant trois semaines que les marchés financiers ont repris le chemin de la hausse. Depuis son plus bas de début mars Wall Street a regagné 17 %. Les marchés européens et
asiatiques ont suivi faisant preuve du même esprit moutonnier que d'habitude. Pourtant cette hausse spectaculaire est artificielle. Elle ne repose sur rien. Ou plus exactement sur des illusions.
- L'illusion de croire que Citigroup et d'autres établissements financiers sont redevenus bénéficiaires depuit le début de l'année. Cela est faux et les prochaines semaines vont
rapidement se charger de faire revenir les marchés sur terre. Et j'ajoute à cela que des mauvaises surprises comme de nouvelles faillites d'établissements bancaires ou de crédit immobilier sont
probables.
- L'illusion également des bonnes nouvelles macro-économiques. Pourtant ce à quoi nous assistons depuis quelques jours avec la publication des statistiques économiques aux Etats-Unis
ne marque en rien un retour à la croissance ni même le début d'une légère reprise économique. Les marchés veulent croire que ces statistiques prouvent que nous avons touché le fond
(peut-être) mais oublient surtout qu'elles montrent la profondeur de la crise. Ces statistiques sont en effet souvent les plus mauvaises depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Alors
peut-être, je dis bien peut-être, touchons nous le fond mais la véritable question que les marchés doivent se poser désormais c'est : combien de temps allons-nous y rester ?
- Mais tout cela n'est finalement pas si grave au regard de l'illusion suprême. Celle qui consiste à croire que le salut viendra de la multiplication des plans de relance au niveau des
Etats.
Dès le 10 octobre 2008 j'avais lancé un avertissement (http://www.rebelles.info/article-23521805.html) : "Depuis le départ j'ai critiqué le plan Paulson (voir notre dossier Crise financière ainsi que les dernières brèves du
jour). Je suis aujourd'hui convaincu que ce plan ou les interventions identiques sous des formes déguisées en Europe auront aggravé cette crise. Car il n'y a pas que les spéculateurs qui peuvent
créer des bulles. Les Etats également. Alors que les Etats-Unis ou les Etats européens étaient déjà endettés jusqu'au cou voilà qu'ils se lancent à corps perdu dans le sauvetage des banques en
engraissant leurs dettes publiques en engageant des milliers de milliards. Contrairement a ce qui se dit un peu partout je suis persuadé que ces dépenses folles non seulement ne permettront pas
d'empêcher la récession mais qu'elles n'auront fait que prolonger la maladie à l'origine de cette crise en maintenant artificiellement en vie ceux qui auraient du payer pour leurs fautes. Plutôt
que racheter les actifs pourris des subprimes il fallait avoir le courage et prendre le risque de couper les branches pourries. Que cette bulle des
déficits publics vienne à crever et alors... ". Aujourd'hui, je ne retire aucune ligne d'autant plus que la situation n'a fait qu'empirer avec les dernières mesures de la
nouvelle administration américaine.
Or le 02 mars de cette année voici ce que Warren Buffet a déclaré : "Lorsque l'histoire financière de la décennie sera écrite, on parlera certainement de la bulle Internet de la fin des
années 1990 et de la bulle immobilière des années 2000. Mais la bulle des bons du Trésor américains observée fin 2008 devrait être regardée comme tout
aussi extraordinaire". Or nous savons ce qu'il est advenu des deux premières bulles... Si Warren Buffet commence, enfin, à s'inquièter de cette dernière c'est qu'il s'est produit au
début de l'année un événement important dont j'avais parlé dans mes brèves du jour du 11 janvier (http://www.rebelles.info/article-26581943.html).
L'événement capital de ce début d'année n'a pas été l'investiture de Barack Hussein Obama mais l'incapacité de l'Allemagne à lever les 6 milliards en obligation d'Etat auprès des marchés.
Si les investisseurs devenaient plus frileux, même vis-à-vis de la dette des Etats jugés sûrs comme l’Allemagne, comment la France, qui ne cesse de s'endetter, pourrait-elle financer ses
nouvelles dépenses astronomiques si elle ne pouvait compter sur les marchés ?
Malgré l'avertissement de ces derniers la politique de
l'autruche s'est poursuivie. Depuis Barack Hussein Obama a lancé un plan de relance de plus de 800 milliards de dollars. Quant à Tim Geithner, le secrétaire au Trésor de l'administration Obama, il
a présenté en mars un nouveau plan de sauvetage des établissements financiers, après les deux qu'avait mis en œuvre son prédécesseur Henry Paulson, en mobilisant 500 à 1.000 milliards de
dollars pour racheter les créances douteuses de l'immobilier. Le rédacteur en chef de "La Tribune", François Lenglet, a parfaitement résumé la situation : "Le roi Danaos eut cinquante
filles, les Danaïdes, qui furent condamnées à remplir un tonneau percé pour l'éternité, pour avoir commis des atrocités - elles avaient tué leurs maris le soir même de leurs noces. Ce que la
mythologie grecque ne dit pas, c'est que les Danaïdes avaient un frère : Tim Geithner, le secrétaire au Trésor de l'administration Obama. Ce financier remplit, lui, le bilan des banques, avec l'argent des contribuables qui file entre les lames disjointes d'une barrique vermoulue."
Comme les Autruches n'ont font qu'à leur tête les marchés, dans leur grande bonté, ont lancé la semaine dernière un nouvel avertissement (le dernier ?). L’État britannique voulait emprunter comme
il le fait régulièrement auprès des investisseurs institutionnels. Mais ces derniers n’ont pas répondu présents et l’émission de 1,75 milliard de livres n’a pu être placée en
totalité. Une première depuis 1995 pour ce type d’emprunt. Et cela au moment ou la dette publique britannique explose comme celle de la plupart des États. Aux Etats-Unis la FED, banque centrale
américaine, a du en venir... à acheter les bons du trésor US car elle sait que les marchés ne sont déjà plus capables d'absorber
les emprunts d'Etats qui se multiplient. Pour résumer la situation cela revient à ce que les initateurs de la dette rachettent leur propre dette en faisant marcher la planche à
billets. Ce qui revient peu ou prou à fabriquer de la fausse monnaie. On marche vraiment sur la tête.
Mais cette frilosité des marchés veut dire qu'à l'avenir on sait déjà que toutes les dettes d’Etat ne pourront pas forcément être souscrites. Par conséquent la banqueroute guette de nombreux
Etats. On comprend mieux pourquoi il est illusoire d'attendre de la multiplication des plans de relance une lumière au bout du tunnel. C'est tout le contraire. Ces plans risquent de provoquer un
éboulement.
L'économiste Steen Jakobsen est celui qui résume le mieux mon état d'esprit. Pour lui comme pour moi il ne faut rien attendre de ces plans : "L'Etat résout un problème de dette en rajoutant
de la dette. Il faut revoir les manuels d'economie ! ".
David Bescond pour Rebelles.info (http://www.rebelles.info)