Qui était Lola Montès? (suite et fin)

Publié le 27 mars 2009 par Frontere

S’il n’est pas facile d’approcher la vérité d’une femme, alors que dire de celle de Lola Montès. Déjà le nom pourrait s’orthographier Montez ; le prénom? Maria Dolorès, mais là aussi ce serait trop simple, ajoutez donc Éliza. Sa date de naissance? Pour les uns 1818 (Limerick, dans l’actuelle Eire), pour les autres 1821 …

Mais puisqu’il existe un livre qui relate ses faits et gestes, la biographie de Cécil Saint-Laurent, peut-on au moins s’y référer? Que nenni! Le livre est épuisé.

Lola, d’origine irlandaise par son père (à l’époque sujet de sa majesté la reine de Grande-Bretagne), mais créole (1) côté maternel, se présentait comme une danseuse … espagnole, du reste elle aurait inventé la tarentelle, nom inspiré de la tarentule, on imagine une danse pour le moins saccadée! Mais elle fut, semble-t-il, une piètre danseuse, ne justifiant de cette qualité que par rapport à l’expression “entretenir une danseuse”, c’est-à-dire une passion, celle qu’elle inspira à ses amants argentés.

La vie amoureuse de la demoiselle est à cet égard toute aussi édifiante. Mariée, elle convole une deuxième fois, ce qui la rend bigame, la situation se régularisera plus tard. Elle a de nombreux amants : Franz Liszt, peut-être Richard Wagner, à coup sûr le roi Louis Ier de Bavière (1786-1868) qui l’éleva au rang de comtesse, était-il aussi fantasque que Louis II, ce monarque qui aimait à faire construire des châteaux aussi baroques que sa personnalité même?

Et puis on peut y ajouter Alexandre Dumas fils, ce qui permet de supposer que nous n’avons pas affaire à une courtisane de bas étage, une lorette, mais à une égérie du demi-monde, Dumas fils en était un spécialiste jusqu’à lui consacrer une pièce de théâtre (2). Il est opportun de rappeler à ce propos la liaison du fils Dumas avec Marguerite Duval, “la dame aux camélias”, sœur ès galanterie de Lola.

Une certitude : Lola Montès devait souvent faire ses valises ; chassée de Bavière lors du mouvement général révolutionnaire de 1848 en Europe, qui a bon dos soit dit en passant car le bon peuple de Munich supportait mal, et depuis belle lurette, l’influence délétère à ses yeux de Lola sur Louis, elle s’installera aux États-Unis qui ont toujours su accueillir les bannis de la vieille Europe, puis on la retrouve en Australie, puis à nouveau aux Amériques ; auparavant elle a fait scandale à Paris de 1844 à 1846 (3).

Bref un chat n’y retrouverait pas ses petits.

Au fond c’est ce qu’il faut retenir et ne pas trop entrer dans les détails.

Qui était Lola Montès? Une aventurière, une femme libre notamment de mœurs, attitude courageuse dans une époque corsetée à l’image de l’Angleterre de la reine Victoria, un fantasme, tableau vivant de la lubricité, d’où son exposition finale dans un cirque.

Mais peut-être au fond d’elle-même était-elle restée une petite fille qui continuait à rêver au Prince charmant : « One day my Prince will come … ». Elle l’aura trouvé en son Louis (dans l’intimité se risquait-elle à lui donner du Loulou?). En tous cas il fit faire d’elle un portrait, sans doute avait-il compris que l’on ne peut retenir un fantasme.

Nota Bene :Lola Montès mourut en 1861.

Notes

(1) personne d’ascendance européenne née dans les anciennes colonies européennes de plantation, ceci nous ramène à Baudelaire :

« Au pays parfumé que le soleil caresse,
J’ai connu, sous un dais d’arbres tout empourprés
Et de palmiers d’où pleut sur les yeux la paresse,
Une dame créole aux charmes ignorés
… »

(« Les Fleurs du mal », Spleen et Idéal, LXI)

(2) « Le Demi-Monde », pièce de 1855

(3) comme le rappellent Jean-Paul Avice et Claude Pichois in « Passion Baudelaire »,Textuel, 2003, 47 €