Jusqu'au milieu des années 80, la grande majorité des affiches de cinéma étaient dessinées. Et dans le domaine, de véritables artistes ont émergé à l'image de John Alvin à qui l'on doit notamment les affiches de E.T., BLADE RUNNER, GREMLIS ou encore PANTHOM OF THE PARADISE (reconnu par le Smithsonian Institute comme un des plus belles affiches du 20e siècle, tous genres confondus).
Les années 90 marquent l'arrivée des photos sur les affiches. Des photos souvent imparfaites, dont les studios s'accommodent souvent. Et si l'imperfection a certainement son charme pour le cinéphile, elle n'en a pas du tout pour les grands pontes du marketing d'Hollywood.
Et voilà qu'apparaît Photoshop.
Personnellement, je n'y connais pas grand chose en graphisme (tout juste les bases) et encore moins dans l'histoire du graphisme. Juste que le fameux logiciel est vraiment devenu "efficace" et donc "imparable" pour la retouche d'images aux environs de l'an 2000 (il a été inventé en 1988).
Évidemment, comme on pouvait s'en douter, dans une industrie du cinéma obsédée par la perfection, Photoshop a totalement bouleversé la façon dont ont été conçues les affiches de cinéma.
Au départ, les retouches sur les affiches de films américains sont assez discrètes. Elles sont - plus ou moins - invisibles pour tout quidam, servant à rendre un acteur un peu plus musclé ou SURTOUT une actrice un peu plus sexy. Par exemple, Denise Richards affirme que ses fesses ont été galbées et grossies sur l'affiche de UNDERCOVER BROTHER (2002). Rien de vraiment très méchant...
Mais voilà qu'est apparu au Royaume de l'image parfaite un ennemi bien plus dangereux que les fesses plates et les seins raplapla...
LE GEEK !
Will Ferrell, Jack Black, Seth Rogen et j'en passe. D'immenses stars plus connus pour leur ventre flasque et leur sex-appeal proche du néant que pour leurs abdos et leur gueule d'ange. Malgré les millions de dollars qu'ils rapportent à l'industrie, l'homme de marketing à Hollywood a du mal à passer des faussettes de Tom Cruise aux joues potelées de Jack Black. Et ça se voit sur les affiches de films...
Deux exemples successifs m'ont sauté aux yeux récemment.
Premier exemple : Simon Pegg, geek anglais à qui l'on doit SHAUN OF THE DEAD et HOT FUZZ, qui sera à l'affiche cet été de la grosse production de JJ Abrams, STAR TREK. Loin d'être un canon de beauté, il s'est fait sérieusement charcuter la gueule à coup de palettes graphiques pour ne pas trop "dépareiller" avec tous les beaux gosses qui l'entourent sur l'affiche...
Avant
Après (à l'extrême gauche de l'image)
Deuxième exemple : Jason Segel, geek américain vu dans la série HOW I MET YOUR MOTHER et la comédie de cet été SANS SARAH RIEN NE VA. Lui, pour le coup, est carrément la star du film et sa gueule se retrouve en énorme sur l'affiche. Le charcutage en est d'autant plus marquant. A mon avis, le graphiste aurait du se faire virer pour ça. Ou peut-être que c'était un stagiaire ?
Avant
Après
En fait, en voyant ces images, il y a une chose qui frappe : on est revenu à l'époque des affiches "dessinées". Sauf que les quelques dizaines d'illustrateurs de talents des années 30 à 80 qui se partageaient l'intégralité du marché ont été remplacés par des milliers de graphistes plus ou moins doués.
En gros, aujourd'hui, la majorité des affiches de films américains ressemblent à une bimbo silliconnée : tape-à-l'oeil, vulgaire et très très artificielle.