C'est un dossier au ton pour le moins alarmiste qu'a signé le magazine Science & Vie ce mois de Décembre 2008 tout juste enterriné. En effet, la rédaction dénonce les risques qui semblent menacer l'outil sur lequel les sociétés mondiales fondent tous leurs espoirs. Internet serait en effet en grand danger, victime de son succès et de l'absence de réflexions sur son développement "durable". La notion de vulnérabilité du net n'est pas inédite, et nous sommes tous bien conscients de la facilité avec laquelle les "cyber-délinquants", "hackers" et autres individus mal intentionnés peuvent détourner le réseau et faire à peu près ce qu'ils veulent des données qui transitent sur la toile. Mais ce que nous ne savons peut-être pas tous, c'est que la structure même d'Internet a des limites, physiques, et qu'il semblerait que celles-ci puissent être atteintes dans un futur proche. En effet, créé à l'origine pour un usage universitaire, le Net est issu d'un réseau expérimental (cf. ARPAnet, 1969) dont les caractéristiques avaient été prévues pour un usage restreint, et pour lequel ses concepteurs n'avaient pas jugé utile de développer un dispositif sécuritaire d'identification. L'expansion anarchique d'Internet qui a suivi aboutit aujourd'hui à "un réseau à l'architecture dépassée", un véritable méli-mélo complexissime dont les bugs sont "réparés à la main", à coup de patchs, correctifs et autres solutions provisoires. Certains penseurs n'hésitent pas à parler de fin de l'âge d'or d'Internet, cette "démo inachevée qui ne survit que grâce à des rustines". Bref, étant donné la croissance des flux sur le réseau, on pourrait bien assister au crash d'un outil qui, "grandi trop vite sur des bases inadaptées à son usage actuel, se révèle aujourd'hui sclérosé". Les uns parlent de repartir à zéro et de reconstruire un réseau plus évolutif, mais les coûts d'une telle opération ne sont pas avouables tant il feraient rougir les investisseurs les moins frileux. En bref, on dirait bien que ça risque de bouger dans les années à venir, et mieux vaut s'y préparer.
Aurions-nous encore foncé tête baissée vers d'alléchantes sources de profit sans nous poser de questions? Si Science et Vie n'hésite pas à nous faire peur en ne mâchant pas ses propos, je pense néanmoins qu'Internet est beaucoup trop considéré comme la réponse ultime et unique aux besoins de nos sociétés, et n'est certainement pas un système infaillible. Si tout doit passer par Internet, et si ce qui est dit dans ce dossier est vrai, alors peut-être est-il temps que l'on prenne quelques menues dispositions afin de faire durer la machine? Peut-être devrons-nous bientôt patrimonialiser le réseau actuel, une fois qu'il aura rendu l'âme?
Quoi qu'il en soit, je ne saurais vous conseiller davantage de lire le dossier "Internet au bord de l'explosion" du Science & Vie n°1095, ça "fous le doute" comme on dit chez nous.