Je ne vous ai pas encore parlé du Master 2 que j'effectue cette année à l'Université de Poitiers, qui s'intitule depuis l'été dernier Master 2 professionnel "Patrimoines, Multimédia, Tourismes" et dont le cru 2008-2009 a été baptisé (bien malgré lui) "promotion Viollet-Le-Duc". Nous avons même une marraine, Monique Bussac, ancienne conservatrice du musée des Beaux-Arts d'Angoulême, qui nous a offert une leçon inaugurale début octobre dernier avec pour trame de fond la vie de cet illustre et controversé architecte et théoricien de l'architecture, surtout connu pour son travail de restauration de monuments historiques médiévaux entre 1840 et 1874. Les monuments qu'il a restauré sont d'ailleurs parmi les plus visités aujourd'hui : La cité de Carcassonne, Notre-Dame de Paris, l'abbaye de Vézelay ou encore le château de Pierrefonds, pour n'en citer que quelques-uns. C'était un drôle de bonhomme, habité par une vision singulière du Patrimoine, qu'il exprima d'ailleurs dans son ouvrage Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle par son expression célèbre « Restaurer un édifice, ce n'est pas l'entretenir, le réparer ou le refaire, c'est le rétablir dans un état complet qui peut n'avoir jamais existé à un moment donné. » Il ira même jusqu'à entreprendre des études très poussées en vue de "remodeler" le Mont Blanc afin de le restituer sous sa forme originelle! Bref, un personnage hors-normes, "écolo" avant l'heure, génie du dessin (il se forma lui-même au croquis en refusant de faire les Beaux-Arts, c'est dire le rebelle!), souvent décrié, mais définitivement passionné et créatif. Son nom a été associé aux excès du romantisme, "Faire du Viollet-le-Duc" avait, jusqu’à la fin du XXe siècle, des connotations extrêmement péjoratives... Mais ses idées inspirèrent bon nombre de ses contemporains, en particulier les créateurs de l'Art nouveau. Selon Monique Bussac, Eugène Emmanuel Viollet-Le-Duc a introduit des problématiques autour du Patrimoine qui se retrouvent aujourd'hui et que nous, futurs professionnels du Patrimoine, devrons affronter. Mais que voir exactement dans ces propos? Difficile de trouver les mots pour comprendre réellement ce qui nous attends demain, en dehors des enjeux liés aux TIC et à la "Société de l'Information" (qu'il est préférable d'appeler "Société du Savoir" selon l'Unesco), et à la définition du Patrimoine, variable selon les groupes, mais s'affranchissant de plus en plus des frontières! Bref, il nous faut dans un premier temps assumer le poids de l'image de ce personnage atypique, et ne pas oublier, comme lui, de toujours nous remettre en question et d'oser, tout en prenant le recul nécessaire à toute bonne analyse."Allez jusqu'au bout de vos idées et soyez là où on ne vous attend pas", peut-être est-ce le message qu'il faut voir dans l'attribution de ce "label" à une promotion de 15 étudiants. Quoi qu'il en soit, nous essayons de nous approprier ce nom en dépit du "poids" du symbole. Par exemple en réservant le resto', pour fêter la fin du premier semestre avec toute la promotion, au nom de Viollet-Le-Duc. Pour l'anecdote, je me suis même entendue dire : "Ah, vous aviez déjà réservé auparavant!" C'est peu probable, mais je pense que s'il était toujours vivant, c'est sûr qu'il irait au restaurant japonais avec nous manger des chirashis!