L’écologie politique à l’heure de la dérive sécuritaire…

Publié le 25 mars 2009 par Chezfab

Voilà un titre bien ronflant n’est ce pas ? Je ne le nierais pas, c’était une envie de faire sérieux deux minutes.
Pourquoi ce questionnement ? Parce qu’un ami m’a dit « Mais tu sais, l’écologie c’est bien mais à l’heure de la crise, des violences qui augmentent, ça ne sert à rien d’autre qu’a faire plaisir aux bobos ». Bon, voilà… Et si on grattait un peu les choses maintenant ?
La cause des violences serait elle génétique ?
Nous sommes en droit de nous poser la question tant il semble pour le pouvoir actuel (comme pour une partie de la gauche) que la violence sortirait d’une sorte de génération spontanée. Elle n’aurait pas de causes profondes. Ainsi les bandes s’agrègeraient elles comme les mouches autour d’une déjection canine. Sans autre but que d’être ensemble pour « foutre la merde ».
Et pourtant, c’est nier en grande largeur un fait tout simple : les violences ne sont que le fruit pourri de notre société et de nos choix. En créant des ghettos et des zones de forte pauvreté, il ne fallait pas s’attendre à ce que les « gentils exclus » restent sans rien faire, dociles.
Croire que nous pouvons continuer à mener une politique de déshumanisation et de désillusion cruelles et ne pas avoir en retour un excès de violence est soit faire preuve d’un optimisme béat proche de la contemplation mystique, soit d’une mauvaise foi évidente.
La violence qui explose aujourd’hui par moment n’est que le symptôme d’une société elle-même violente. Elle n’est que le visage lacéré que nous avons du mal à regarder en face d’un individualisme forcené, couplé à une rivalité constante entre les individus. Paraître pour exister, posséder pour être. Le diptyque maudit d’une société capitaliste d’accumulation. Où comment ne réduire l’homme qu’a l’expression d’un chiffre : celui de son compte en banque.
Ok, c’est bien joli, mais l’écologie dans tout cela ?
Déjà, je vais commencer par présenter une chose : l’écologie politique et son socle. De Gorz à Illich en passant par Dumont et d’autres, l’écologie politique à toujours comme base une émancipation de l’humain non en le mettant à la tête de tout, ni au centre de tout mais au sein d'un tout. L’interaction avec son environnement est rétablie non pas en tant que dominant à forte propension destructrice, mais en tant qu’interaction totale, c'est-à-dire que si l’homme détruit son environnement, il se détruit lui-même.
De plus, l’écologie politique est une sortie de l’économisme et du productivisme. En repensant les besoins et le progrès, elle met à mal le système de spéculation et d’accumulation proposé par le capitalisme. Des penseurs comme Illich, Ellul, Gorz, Bookchin, ont apporté beaucoup à cette pensée. Produire pour les besoins mais aussi définir les besoins collectivement. Partager plutôt que posséder. Oublier l’idée de propriété unique au profit de communauté de bien. Avancer vers la gratuité, le don. Ne pas s’arrêter à ce que l’autre peut offrir pour offrir en retour mais globaliser cela de façon à voir ce que chacun offre à tous.
Loin du cliché d’une idéologie « fascisante », que les médias commencent à (re)sortir de leur boite pour décrédibiliser ce qui irait contre le système dominant, l’écologie politique ne peut se concevoir sans l’apport de tous. Sans la mise en place d’une réelle politisation de la société, et donc d’une vraie démocratie directe. Cela à un coût : celui de voir disparaître petit à petit ceux qui se font élire pour nous « représenter » au profit d’une « intelligence collective ». N’est ce pas au fond ce qui fait le plus peur aux « barons autoproclamés voix du peuple » ? Ne serait ce pas là ce qui a fait abandonner l’idée même de l’application de l’écologie politique au profit d’un pragmatisme développementiste durable mal venu ? On va me rétorquer que cela est la forme la plus poussée de l’écologie politique, celle qui serait l’ultime frontière. Peut être, et alors ? Et oui, pour parfaire l’exactitude, certains voient cela plus dans le terme « d’écologie solidaire ».
En prime, l’écologie politique est porteuse d’une révision des échelles. Basée sur l’échange et non sur le marchandage, elle ouvre la voie de la mise à mal du système (néo)colonial, du racisme, de l’idiotie des nations et des frontières. Elle est l’addition des peuples et non la division. Elle offre une vision d’échange d’égal à égal (non pas en valeur de mais en apport collectif). En favorisant le local (non pas dans le sens du repli sur soi, mais bien dans celui de la facilité des échanges, qui sont plus simples en local au départ) et en articulant cela avec l’ouverture au monde, l’écologie politique porte en elle la graine d’une réelle mise en application du « Agir local, penser global ». Seul moyen viable de sortir d’une situation d’exclusive des pays riches envers les pays pauvres. Et des riches contre les pauvres.
Comprenez-moi bien : il n’est nullement question d’une forme d’ostracisme. Au contraire : les échanges devront se faire entre les groupes, non au profit de, mais parce que certains apporteront des compétences à d’autres et inversement. Il n’y a pas de volonté d’hégémonie dans un monde où les besoins sont clairement définis et où l’économie est au service de l’homme, redevenue le moyen qu’elle n’aurait jamais du cesser d’être.
C’est tout cela et bien plus (je ne suis pas en pleine rédaction d’un panégyrique mais d’une réponse à une affirmation tenant en une phrase) que l’écologie politique porte. Elle est la porte d’entrée d’une transformation globale de la société, vers une société plus démocratique, plus humaine, plus vivable et plus juste. Elle est porteuse d’une idée simple, celle de pouvoir construire ensemble un futur.

Ouais, ok, mais les violences …

Il est difficile pour beaucoup de faire le lien entre l’acte (la violence) et la cause profonde de l’acte (la société). Tout est pourtant lié : c’est là la force d’une vision écologiste des choses. L’écologie politique est loin de l’environnementalisme bobo qui consiste à changer le monde en fermant son robinet quand il se lave les dents et à éteindre les lumières en sortant (même si ces gestes ont leurs utilités). Elle prend la société dans son ensemble et cherche à comprendre en quoi tout est lié, et donc en quoi nous ne pouvons résoudre un problème dans un changement fondamental de société.
L’idée de miser sur du cent pour cent répressif est contre-productif. Cela revient à tenter de vider la mer avec une petite cuillère. Si on ne se penche pas sur les causes, nous pratiquons une politique de l’autruche, voir de la peur.
Voilà en quoi l’écologie politique, et non l’environnementalisme, est une réponse claire et efficace contre les violences et même contre la crise. Elle est porteuse du seul moyen d’éradiquer ces dernières : un monde plus égalitaire.