Et l'Etat couturier tente les reprises… en main. Le droit du travail encadre tous les éléments attachés au salarié, la loi encadre également la participation et l'intéressement. Lorsque l'entreprise produit des bénéfices, ces dispositifs permettent de verser aux salariés des primes si l'entreprise a mis en place ce système. Cela équivaut à des sortes de bonus. Alors, personne ne comprend pourquoi les grands actionnaires et les grands patrons reçoivent des bonus ou des dividendes même quand l'entreprise va mal. C'est d'autant plus scandaleux quand l'entreprise bénéficie d'aides de l'Etat et qu'elle licencie.
Le Medef et ses membres s'insurgent à l'idée d'une législation sur les salaires des grands patrons. Qu'est-ce qui justifie que le simple salarié soit enfermé dans un carcan légal et pas son chef d'entreprise ? Trois millions par ci, 51 millions par là, de l'argent est trouvé pour récompenser les mauvais gestionnaires mais pas pour revaloriser les bas salaires. Vous n'avez pas atteint les objectifs de rentabilité, alors recevez en guise de remerciement ces quelques millions ! Barack Obama n'a pas hésité et a imposé des plafonds rondelets aux patrons (390 000 euros par an). Nos voisins européens ont pris des mesures de limitation et l'un d'eux a même plafonné pour que les patrons ne gagnent pas plus que le Premier ministre du pays.
Le problème est que si vous n'imposez pas des règles, les décideurs continueront à agir comme ils l'ont toujours fait. On le voit récemment avec ces bonus de 3 millions et de 51 millions : si personne n'avait réagi, ce serait passé incognito. Les grands patrons n'ont pas assimilé cette notion d'intérêt général. Les intérêts sont situés seulement au niveau des investisseurs et des parts. Ce qu'il y a en dessous n'a pas d'importance étant donné que l'entreprise fonctionne toujours, et c'est leur seul souci. La correction de trajectoire et la régularisation se fait toujours par le bas. Et puis, si ça tourne plus, on s'attribue des parachutes dorés et vogue la galère : les actionnaires et les patrons trouveront une autre entreprise pour continuer leurs "activités".
Alors, oui, il faut légiférer sur les revenus des patrons et des membres de conseil d'administration ou de comité de surveillance. C'est possible puisque l'on détermine bien un salaire minimum, cela doit être possible de fixer un salaire maximum. Ces gens vivent protégés sur une autre planète. Ne craignant pas les risques, ils ne prennent pas leur responsabilité quand il y a besoin. Je me demande même s'ils s'en rendent compte. Pour eux, cela doit paraître normal. Alors sous la pression, il leur prend de soudains remords : ils abandonnent (momentanément) ces parties de revenus ou ils rendent ce qu'ils ont déjà reçu comme 15 responsables américains d'AIG qui ont dit adieu à 50 millions de dollars.
Ce n'est pas la mer à boire que de faire des sacrifices pour cette année au moins. Au lieu de partir à Bora Bora, ils iront à l'Ile de Ré, ça leur fera le plus grand bien !