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J'ai bien aimé le dernier film de Clint Eastwood, c'est comme une lettre-testament que le vieux monsieur nous envoie en toute amitié et tendresse. Il se prépare doucement à s'en aller, mais il a des choses à nous dire et un legs à nous transmettre. Magnifique message d'amour pour l'humanité et qui consiste à dire, en bref, que les problèmes ne se résolvent pas par la violence et l'intimidation. Clint a joué très longtemps sur l'ambiguïté du héros viril qui prend la justice à son compte, mais ici il tord le cou à cette vision et il nous ouvre l'esprit.Avec "Gran Torino", il livre un message au monde et à l'Amérique post-11 septembre qui a voulu se venger en se cantonnant dans la méfiance de l'Autre et l'agressivité.Clint nous dit tout simplement que la violence engendre la violence, et que tout le monde est perdant dans la spirale de la loi du talion.
Ce message est intelligemment enveloppé dans une belle histoire d'amitié. "Gran Torino", c'est du grand cinéma, filmé de façon classique, bien écrit, très bien interprété par l'icône lui-même avec une humilité, un vulnérabilité et une auto-dérision extraordinaires. Un film qui alterne avec aisance la légèreté et la gravité, la vie et la mort, le temps suspendu et le temps qui s'accélère. Un film plein de drôlerie aussi, car bien malgré lui, ce bonhomme hargneux et bougon va apprendre à connaître et apprécier ses sympathiques voisins asiatiques. Il y a des phrases et des regards dans "Gran Torino" que je n'oublierai pas. Ainsi Clint rétorquant à son jeune ami Hmong avide de vengeance : "Qu'est-ce que ça fait de tuer un homme? Tu ne dois pas le savoir."