Bon, en ce moment je n’ai pas grand-chose à dire. Non, en fait ce n’est pas vrai. Disons, pas vraiment ça…
J’ai des choses à dire, même plein, je pourrais même en écrire des tonnes, des tartines entières sans me lasser de mes dires, sans interrompre ma diatribe emportée. Mais je suppose que je dois vous épargner.
Je n’aurais qu’un seul sujet si je m’écoutais.
Un « sujet » qui m’anime tout entière. La crainte d’une « mièvrerie », sachant pourtant que je saurais ne pas verser dedans, parce que j’ai tant à dire aujourd’hui sur la vie, les projets, l’avenir alors même qu’il est coincé, qu’il est bloqué par ce job que je dois mener le plus loin possible, tout en sachant que je ne pourrai pas aller jusqu’au bout, à moins que je ne minimise l’impact de ma raison sur toutes mes décisions.
La crainte d’une « mièvrerie », donc, la crainte aussi d’étaler dans ces pages un bonheur qui pourrait être ressenti comme « vicieux » par ceux qui ne le connaissent pas… font que je tais cela bien plus que je ne l’expose, là, aux yeux de tous. Et quelque part, ça me peine. Ca me manque de freiner ma plume, de peur aussi, sûrement de trop en dire et de fragiliser par ce biais la force de ce « nous »…
Bref…
Je n’aurais envie que de parler de mon étonnement constant face à ce « nous » qui grandit
sans discontinuer. Etonnement parce que je suis dans une histoire d'amour si sereine, si apaisante, où les choses du quotidien les moins intéressantes prennent une dimension, un quelque
chose qui fait que partagé, ça en nourrit le « nous »… Et j’adore cette sensation. Ce sentiment d’exister au-delà de tout ce qui est si usant quand on le fait tout seul, là c’est
enrichit de l’autre. Et ce sur tous les registres que nous partageons, avec égalité d'intensité, de densité...
Le dimanche après-midi est toujours aussi dur. Juste avant son départ, je sens que je me réinstalle dans ma coquille, comme une huître qui se refermerait soudainement. Je me replie, façon fœtus et j’attends que le temps passe, qu’il parte, qu’il s’éloigne et que ma vie « sans lui » reprenne… Une fois parti, j’attrape une couverture, je me positionne en boule sur mon clic-clac aux mille souvenirs inavouables. Et je m’endors. Je me laisse emporter par ce sommeil qui anesthésie, qui permet d’éviter les ressassements, l’amertume et les pensées noircies. On se laisse emporter par cette fatigue post-émotions. Et le sommeil en est que plus profond.
En général, je dors ainsi deux bonnes heures. Les filles sont à la sieste. C’est l’une d’elle qui me réveille. Je me sens mal alors, dans ce réveil cotonneux, anesthésiée de tout avec cette impression désagréable que les moments vécus si heureux se retrouvent à des années-lumière de là. Le temps distendu par cette torpeur post-traumatique… Pendant ce temps, il est dans sa voiture, égrenant ces kilomètres qui nous séparent dans l’autre sens, dans ce sens synonyme d’ennui, de lourdeur, et de distance infinie. Cette route qui dans l’autre sens s’égrène d’une toute autre façon, entre excitation et grande hâte. L’une est douce, l’autre est violente et douloureuse. Je le sais. Je ressens à l’unisson de lui. Je sais ce qu’il ressent assis dans sa voiture. Je le sais. Je le ressens si fort à mon réveil…
Ensuite les gestes se font, les automatismes sont repris instantanément, jusqu’au coucher des filles, jusqu’au mien ensuite, bien plus tôt que d’habitude, pour finir ce dimanche si long à trépasser… Etre lundi au plus vite. Et décompter enfin la semaine dans l’autre sens. Celle-ci passant plus vite grâce au boulot et attendre, attendre que l’excitation remonte jusqu’au vendredi libératoire, annonçant une nouvelle fois la fin du sursis. Alors goûter à la liberté pendant 2 nuits et une longue journée et demi, puis retourner à l’ombre des semaines si mornes, des jours « sans » mais « avec » pourtant.
Riches que nous sommes d’une nouvelle partie à l’intérieur de soi qu’on porte en permanence et qu’on fait vivre si bien. L’Autre. Son Autre, enfin trouvé, enfin rencontré, enfin aimé, et qu’on chérit et nourrit à l’intérieur de soi autant que durant nos longues conversations téléphoniques, nos échanges de mails, de conversations MSN, de textos enflammés, de billets de blogs ou de commentaires, autant de moyens nécessaires à notre langage, à nos sentiments pour se nourrir de l’autre indéfiniment avec cette soif et cet appétit jamais complètement rassasié et qui ne l’est pas plus lorsque nous sommes ensemble. Un étonnement constant. Un bonheur qui se suffit de nos deux centres aussi proches que possible.
Un simple bonheur d’être.
Ensemble.
Près ou loin.
Ici ou ailleurs.