Réponse au député Gonnot

Publié le 21 mars 2009 par Micheljanva

A un lecteur qui l'interrogeait sur sa position à propos du projet de loi sur le statut du "faux-parent", le député UMP François-Michel Gonnot (son blog) a répliqué :

"la loi actuelle sur la délégation-partage de l’autorité parentale suppose une procédure très lourde (1) pouvant prendre plusieurs années devant le juge aux affaires familiales. C’est pourquoi, après avoir mené de nombreuses concertations avec toutes les associations familiales, le gouvernement propose à ceux qui le souhaitent le partage de l’autorité parentale avec un tiers si et seulement si les deux parents de l’enfant sont d’accord (2). Ce partage se ferait par une procédure simplifiée sous forme de convention homologuée par le juge (3) aux affaires familiales qui reconnaît et sécurise juridiquement l’intervention de ces adultes qui ne sont pas les parents de l’enfant et qui accomplissent certains actes de sa vie quotidienne. Par ailleurs, le texte renforcerait de manière significative l'autorité parentale conjointe des deux parents (4). Le juge aux affaires familiales pourrait astreindre celui des parents qui ne respecte le droit d’hébergement. Afin de prévenir les enlèvements d’enfants vers l’étranger, le juge aurait également la faculté de prononcer des interdictions préventives de sortie du territoire, et la délivrance de titres d’identité et de voyage pour l’enfant se ferait obligatoirement avec l'accord de ses deux parents."

Ces propos sont faux :

  1. Ce n’est pas le cas du tout, car la procédure est peu contraignante. Le juge aux affaires familiales du lieu où demeure le mineur est saisi par simple requête, et les parties sont dispensées du ministère d'avocat (art. 1203 NCPC). Le juge procède ou fait procéder à toutes les investigations utiles (art. 1205 NCPC). Il entend les père, mère et toute personne dont l'audition lui paraît utile (art. 1208 NCPC). Si la demande est urgente, le juge peut ordonner des mesures provisoires pour la durée de l'instance (art. 1207 NCPC) et, si les parents ne peuvent supporter les frais de justice, le juge fixe le montant de leur participation (art. 1197 NCPC). Certes, toute procédure suppose une contrainte, même minimale comme ici, mais cette contrainte semble tout à fait proportionnée avec l’enjeu.
  2. Si l’on estime que la vie quotidienne des familles recomposées est compliquée, ce n’est pas en tout cas le statut pour le beau-parent qui la simplifiera ! Selon vous, «le gouvernement propose à ceux qui le souhaitent le partage de l’autorité parentale avec un tiers si et seulement si les deux parents de l’enfant sont d’accord», par une convention «qui reconnaît et sécurise juridiquement l’intervention de ces adultes qui ne sont pas les parents de l’enfant et qui accomplissent certains actes de sa vie quotidienne». Permettez-moi de rectifier ce propos : la convention n’a pas vocation à porter sur les actes de la vie quotidienne, qui peuvent déjà être accomplis, sans convention. La convention homologuée dont parle l’avant projet vise à partager l’autorité parentale, ce qui est tout à fait différent et ne concerne pas les actes de la vie quotidienne
  3. Très franchement, je ne vois pas ce que la procédure de la convention homologuée fera gagner en temps et en énergie : il faudra bien saisir le juge, et celui-ci devra bien entendre les intéressés et procéder aux investigations utiles pour vérifier que la convention «est conforme à l’intérêt de l’enfant et si le consentement du ou des parents a été donné librement», ainsi que le prévoit l’avant projet ! Bref, le projet ne va strictement rien changer de ce point de vue !
  4. Tout cela est très intéressant, mais il suffit dans ce cas d’un projet de loi sur la coparentalité, visant à renforcer les garanties pour que l’enfant ne soit pas privé de liens avec l’un de ses deux parents. Nul besoin du reste du projet concernant les tiers.

Ce député a dû lire les conclusions de la mission d’information sur la famille et les droits de l’enfant menée à l’Assemblée nationale en 2005 - 2006 trop rapidement car, précisément, la mission n’est pas favorable à la généralisation du partage de l’autorité parentale, partage qui «conduit à placer un tiers au même niveau de responsabilité qu’un parent légal» (p. 260). La mission ne propose absolument pas de partager l’autorité parentale avec un tiers sous prétexte qu’il vit avec un des parents de l’enfant !

Continuez d'écrire à vos députés (déjà plus de 13000 signataires).

Michel Janva